Header Critique : INVADERS FROM MARS (INVASION VIENT DE MARS)

Critique du film et du Blu-ray Zone A
INVADERS FROM MARS 1986

L'INVASION VIENT DE MARS 

Le jeune David Gardner (Hunter Carson) voit un vaisseau spatial atterrir derrière une colline. Personne ne le croit et lorsqu'il comprend que ses parents (Laraine Newman et Timothy Bottoms) comme sa maîtresse d'école (Louise Fletcher) changent de comportement, il n'y a guère que l'infirmière de l'école (Karen Black) qui lui fasse confiance. Possession? Une invasion extra-terrestre serait-elle en marche depuis le tranquille village de Willow Creek?

Juste avant le tournage de LIFEFORCE, Menahem Golan demanda à Tobe Hooper quel type de projet il souhaitait effectuer. Ce dernier ayant toujours été un grand fan des ENVAHISSEURS DE LA PLANETE ROUGE de William Cameron Menzies, le remake se met sur les rails. Ce qui va provoquer une incompréhension avec les attentes du public : Tobe Hooper a juste enchainé des films d'horreurs cathartiques comme MASSACRE A LA TRONÇONNEUSE, LE CROCODILE DE LA MORT, MASSACRES DANS LE TRAIN FANTOME ou encore POLTERGEIST. En effet, personne ne s'attendait vraiment à ce qu'il effectue un film de SF pour enfants. Le film rencontra un échec patent à sa sortie US, et à peu près partout à travers le monde - y compris en France, sorti en aout 86 sous la bannière Cannon France. De manière pertinente, l'éditeur US Scream Factory profite de l'effet-Cannon actuel et sort un Blu Ray bourré de suppléments produits pour l'occasion. INVADERS FROM MARS put enfin revivre dans l'inconscient collectif des amateurs que nous sommes. A noter qu'il sortit chez nous sous le titre de L'INVASION VIENT DE MARS… doté d'un sous-titre qui tue : «Nostradamus l'avait prévu… Tobe Hooper le prouve !».

Après le chaos sublime de LIFEFORCE, INVADERS FROM MARS centre son action autour des relations humaines. Non autour d'une science-fiction gravitationnelle qui régit le récit - mais l'exact opposé. Qui plus est à travers les yeux d'un enfant. Suivant en ce sens le tissu narratif et les choix du film original. Débarrassé des oripeaux du message 50's nimbé de maccarthysme, la nouvelle version semble s'orienter vers une fable pré-adolescente, aux fulgurances Hooperiennes de précieux détails sordides sur une fine lame d'humour noir. Sorte de plaisir coupable qu'Hooper se permet après des années d'horreurs non-stop à destination quasi exclusive des adultes.

Il a également su s'entourer d'une équipe riche, aussi bien en acteurs qu'en techniciens! Entre le choix de Stan Winston, John Dykstra (déjà ayant travaillé sur LIFEFORCE), Alec Gillis, Tom Woodruff Jr pour les effets mécaniques et visuels…toute la crème des artistes d'effets des années 80 est sur le tournage! Un large casting qui met en avant Karen Black, actrice ayant fait ses preuves à la fois chez des auteurs aussi variés que Bob Rafelson, John Schlesinger ou encore Henry Jaglom, Robert Altman, Alfred Hitchcock... tout en parvenant à s'essayer aux blockbusters comme 747 EN PERIL. Et même tâter du bis italien en jouant dans L'INVASION DES PIRANHAS ou AMAZONIA LA JUNGLE BLANCHE ! Elle forme ici un couple hors norme avec son fils Hunter Carson qu'elle eut avec le scénariste L.M Kit Carson. L'auteur de PARIS,TEXAS et de... MASSACRE A LA TRONÇONNEUSE 2... puis ami de Tobe Hooper par la même occasion. Suivent noms prestigieux comme Timothy Bottoms (LE TOBOGGAN DE LA MORT, L'OURAGAN), Bud Cort (M.A.S.H, HAROLD ET MAUDE) et surtout Louise Fletcher (VOL AU DESSUS D'UN NID DE COUCOUS, BRAINSTORM) qui s'en donne à coeur joie dans le rôle de la vilaine et revêche Mrs McKeltch. Notamment sa fameuse scène d'engloutissement de grenouille. Qui révulsa Fletcher au moment du tournage, tout en donnant en fait le ton à sa garde-robe verte!

A noter que Christopher Young, auteur de musiques pour LA MUTANTE, PLUIE D'ENFER ou encore LA PART DES TENEBRES, fut engagé pour composer la musique du film. Sa composition trop expérimentale fut rejetée par la production. Le choix se porta alors sur David Storrs qui livra une partition électronique moins ardue, bien que sombre. Young put néanmoins élaborer des morceaux plus orchestraux (le générique de début ainsi que les scènes d'action finales), se trouvant cependant seul crédité au générique. Les différentes éditions de la musique furent travesties : le 33T de 1986, la réédition CD de 1993… ce ne fut qu'en 2008 que le Label Intrada édita pour la première fois les deux oeuvres complètes de Storrs et Young pour le film. Une édition épuisée en l'espace que quelques heures!

En fait, INVADERS FROM MARS fait office de grand film incompris. Pas de SF sérieuse à l'horizon, mais une volonté délibérée de second degré. Ce qui semble être passé totalement à la trappe du ressenti des spectateurs. Tout est dans le registre du « camp ». Qu'il s'agisse du choix de Laraine Newman dans le rôle de la mère (une actrice comique reconnue à l'époque pour sa participation à Saturday Night Live), l'interprétation de Bud Cort (et sa destinée, en clin d'oeil à celle du prêtre dans LA GUERRE DES MONDES !) ou de James Karen, des éléments de direction d'acteurs (les morts dans le bureau de James Karen, entre autres), les décors démesurés, les créatures grotesques, les éclairages baroques... tout est dans l'exagération d'un adulte retrouvant les émotions premières d'une âme d'enfant. Dès la pré-production, on sent que le sens de l'humour quelque peu tordu de Hooper et son équipe transparait. Le réalisateur s'amuse avec son sujet, ne se prend pas du tout au sérieux. Il s'agira très probablement d'une des raisons de l'échec du film.

Hooper n'oublie pas d'honorer son illustre aîné et l'époque qu'il chérit. Entre multitudes de clins d'oeil, et en respectant plutôt la progression dramatique de l'original, il reprend Jimmy Hunt (le David Gardner de 1953) pour le rôle d'un flic «qui n'est pas monté sur cette colline depuis des années» ! Le jeune Gardner se rend à la «Menzies Elementary School», tout comme «l'Intelligence Suprême» de 1953 sous son globe est vu dans les sous-sols de l'école ! Egalement, regardez bien la plaque minéralogique de la voiture de Karen Black, en écho au final du film original... ou encore le nom de Santa Mira qui surgit là aussi en hommage à L'INVASION DES PROFANATEURS DE SEPULTURES.

INVADERS FROM MARS s'avère à revisiter de manière impérative. Il fait partie de ces films qui se bonifient invariablement avec le temps. Toujours fun, bien mieux pensé et mise en scène que le sujet ne le laisse présager. Garni de décors au parfum de Dante, bourré d'humour en filigrane à la noirceur tangible mais en plein dans le cauchemar enfantin où les adultes peuvent se retrouver sans complexe via des éclairs de violences et de répulsion inattendus. Peu importe si on ne croit guère au malheur qui peut frapper l'humanité via cette invasion, INVADERS FROM MARS fait passer une excellent moment de SF délirante, culottée tendance paranoïa galopante (et drônes-monstres dentés).

Le Blu Ray de capacité 50 GB, en 1080p, encodé en AVC-MPEG4, son début régulier apporte un upgrade hallucinant par rapport au DVD MGM région 1 sorti il y a plus de dix ans - sans parler du Laserdisc NTSC. Tourné en J-D-C-Scope, à l'instar de LIFEFORCE, INVADERS FROM MARS possède le format 2.35:1, parfaitement restitué ici. Le grain d'origine est bien présent, ce qui constitue une bonne chose. Même si l'on constate quelques scènes où celui-ci devient trop envahissant. (Comme si plusieurs sources avaient été utilisées pour ce master?) Malgré quelques griffures, le résultat est plus qu'honorable : une avalanche de couleurs gorgées de chaleur, d'images aux détails précis : voir en ce sens les scènes de l'intérieur du vaisseau à l'approche de l'être suprême. Idem pour les plans américains, le souci du détail est partout : par exemple à la 39e minute, avec Louise Fletcher littéralement hypnotisée par l'arrivée de la créature martienne. On constate plusieurs niveaux d'éclairage : bleuté sur le visage de l'actrice, orangés sur le fond et rougeoyant/foncés sur les monstres. Le tout couplé aux costumes découpés et ressortant aisément, les contrastes saisissants et les contours de chaque intervenant : brillant. A noter également une très bonne gestion des teintes sombres et noirs, surtout dans la dernière partie du long-métrage se passant quasi intégralement dans l'obscurité du vaisseau et la nuit. La volonté de Tobe Hooper d'en faire un thème proche de Jonas et la Baleine surgit à tous les coins du magnifique décor. Eclairages multiples, sources de lumières multi-directionnelles : la somme délirante de talents visuels éclate à l'écran. On EST dans le ventre d'une bête fantasmagorique aux moindres recoins qui se décèlent habilement. Idem pour les effets spéciaux visuels (l'explosion de la fusée, sublime) qui démontrent que le passage à la HD ne signifie pas systématiquement une perte qualitative (comme hélas pour THE BLOB de Chuck Russell dans son édition Twilight Times aux USA) si la source utilisée est soignée. Typiquement le cas ici. Dernier bémol: la galette est codée région A.

La piste audio DTS HD MA 5.1 en langue anglaise (donc non compressée) donne dans le grand art, un net gain en spatialisation, étendue des possibles audiophiles sur la l'environnement sonore choisi : le générique de début file des frissons! Il s'agit précisément de maintenant qu'on peut se rendre compte du travail extrêmement minutieux opéré sur le mixage et montage sonore. Une richesse et une texture que les précédentes versions (on passera sous silence les épouvantables VHS recadrées et au son pauvret) n'ont même pas caressé du doigt. La piste DTS HD MA 2.0 transpose elle de manière là aussi agréable le mixage original Dolby Stereo dans lequel le film est sorti au cinéma. Le regret : aucune piste francophone (a contrario du DVD Z1) et que des sous-titres anglais amovibles. L'accès au menu s'effectue depuis la matrice habituelle de chez Scream Factory, avec cette bien pratique option de menu pop up permettant de naviguer facilement pendant la vision de la galette. Le tout avec des sous-titres anglais optionnels, mais seulement pour le film.

Le commentaire audio de Tobe Hooper, modéré par Michael Felscher, s'avère très plaisant ! Hopper possède une débit très posé, ce qui permet aux anglophones de facilement comprendre ses propos et ses explications sur les sujets de la mise en scène, l'élaboration des effets… Cela s'avérera très surprenant pour ses détracteurs : il possède une culture et une vision créatrice bien précise. Il sait ce qu'il veut et tout éclate à l'écran. Le ton, la teneur des effets spéciaux, le travail avec le directeur photo Daniel Pearl, la relation avec Alan Jakubowicz pour le montage. Tout comme les problèmes logistiques sur la scène du tourbillon de sable, l'intervention de l'armée qui a prêté roquettes et éclairages... absolument passionnant!

Pour les suppléments, Scream Factory a été à la pêche aux intervenants - et tout en HD. On retrouve donc non seulement Tobe Hooper, mais également Hunter Carson ainsi que deux spécialistes des effets spéciaux, Alec Gillis et Gino Crognale. On y apprend d'ailleurs que James Cameron est venu sur le tournage débaucher Stan Winston pour ALIENS ! Et qu'un feu, ravageant les décors de la scène de l'Intelligence suprême attaquée vers la fin, a provoqué un départ précipité de chacun - dont Gino Crognale, harnaché dans la tête pour bouger les différents contrôles faciaux, et sauvé in extremis. En regardant d'ailleurs précisément la scène, vous verrez quelques flammes autour sur le haut de l'écran (vers 85mn46). On y croise aussi Christopher Young, d'une remarquable humilité, revenant sur les soucis rencontrés avec la musique, donnant un début d'explication sur l'existence de deux noms à la composition de la musique. Et sur ce qui n'aura pas été retenu malgré les demandes de Hooper. Young indique être très déçu de ne pas avoir pu honorer la commande initiale (Hooper voulait une partition de la même teneur que MASSACRE A LA TRONÇONNEUSE), bien que disant avoir composé l'une de ses musiques les plus originales, dans tous les sens du terme. En tous les cas : un supplément filmé et monté de manière très pro : cadrages, ton, lumière, photo… tout est rythmé chronologiquement pour bien mettre en avant les artistes interviewés, tout comme leurs propos dirigeants sur cette expérience qui leur laisse à tous un excellent souvenir - et qu'ils savent faire partager.

Pendant près d'un quart d'heure (en HD), le directeur artistique William Stout revient en voix off sur le processus de création des créatures, décors via ses dessins de pré-production sur INVADERS FROM MARS. Ses influences, ses discussions avec Rick Baker et notamment l'une de ses rares créations qui n'est pas parvenue à l'écran : les langues rétractiles et visqueuses des drones martiens! Riche en anecdotes - notamment une hilarante sur la position officielle des Marines US sur d'éventuelles attaque martiennes!-, ce moment est une petite perle de cette édition.

Une galerie photo, des storyboards et des films annonces (eux en SD) viennent compléter le tout. Un regret : la featurette se trouvant sur le DVD MGM Zone 1 de la collection Midnite Movies n'a pas été reprise. Une bonne raison donc pour celles et ceux qui l'ont acheté, de ne pas s'en séparer - d'autant que des sous-titres français s'y trouvaient.

Pour le reste, cette galette Blu Ray de chez Scream s'avère vivement recommandée. INVADERS FROM MARS n'aura jamais été aussi beau à voir.

Rédacteur : Francis Barbier
Photo Francis Barbier
Dévoreur de scènes scandinaves et nordiques - sanguinolentes ou pas -, dégustateur de bisseries italiennes finement ciselées ou grossièrement lâchées sur pellicule, amateur de films en formats larges et 70mm en tous genres, avec une louche d'horreur sociale britannique, une lampée d'Albert Pyun (avant 2000), une fourchettée de Lamberto Bava (forever) et un soupçon de David DeCoteau (quand il se bouge). Sans reprendre des plats concoctés par William Friedkin pour ne pas risquer l'indigestion.
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L'édition vidéo
INVADERS FROM MARS Blu-ray Zone A (USA)
Editeur
Scream Factory
Support
Blu-Ray (Double couche)
Origine
USA (Zone A)
Date de Sortie
Durée
1h39
Image
2.35 (16/9)
Audio
English DTS Master Audio 5.1
English DTS Master Audio Stéréo
Sous-titrage
  • Anglais
  • Supplements
    • Commentaire audio de Tobe Hooper
    • The Martians are coming! - Making of (36mn33)
    • Galerie d’illustrations de production originale par William Stout (14mn03)
    • Storyboards originaux (4mn16)
    • Galerie Photos (2mn12)
    • Film annonce (1mn28)
    • TV spot (0mn32)
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