Header Critique : EXISTS

Critique du film
EXISTS 2014

 

En route vers une maison au fond des bois pour une weekend de fun, un groupe de potes heurte quelque chose au bord d'une route avec leur voiture. Un animal? N'y prêtant pas plus attention, ils vont tout de même être confrontés à une bête qui va les traquer et tenter de les tuer un par un.

Les cinéphiles auront tôt fait de reconnaître en Eduardo Sanchez comme l'un des deux artisans qui ont eu la géniale idée de BLAIR WITCH PROJECT. Qui a relancé la mode du « found footage » en 1999 et généré un record au Box Office mondial. Faisant également du film le plus rentable de l'histoire du cinéma vu son coût dérisoire. Il ne s'en est jamais vraiment remis, puisque l'essai n'a jamais été transformé. Il revient encore aujourd'hui avec du found footage + épouvante avec EXISTS qui s'avère, malgré ses nombreux handicaps, l'un des meilleurs films sur les BigFoot et autres Sasquatch qui pullulent sur les écrans bis depuis près de 50 ans.

Sanchez prolonge son expérience de film à la première personne en GoPro de V/H/S 2 (segment « a Ride in the park », voir notre critique pour plus d'informations) sur un long métrage. Autant dire que cela ne va pas donner dans la finesse. On retrouve globalement les mêmes qualités et les mêmes défauts sur EXISTS : une brillance dans la mise en scène des attaques, la montée en puissance du suspense et du sentiment d'épouvante. Sous des traits finalement bien conventionnels et balisés. Le film définitif sur « le groupe d'amis parti au fond des bois à qui il arrive quelque chose », c'était justement LA CABANE DANS LES BOIS, excellente expérience postmoderne de relecture du film de genre et de ses stéréotypes. EXISTS se situe à pas mal de crans au-dessous, reprenant au premier degré tous les clichés attendus. IL explose même les compteurs habituels : les filles seront là pour hurler, faire joli et débiter âneries à longueur de métrage. Le téléphone portable va BIEN SUR ne rien capter au moment opportun. On brise bien évidemment un tabou à savoir qu'on ne doit pas aller dans cette maison - mais l'un des deux neveux a volé la clé et quoi de plus fun que de ne pas respecter les règles établies, hein? On aura aussi l'octroi de Todd (Roger Edwards),le black de service à la surpuissance corporelle, le technicien spécialisé en caméra un brin geek sur les bords, barbu-hipster à la mode et fumeur de pétards, nommé Brian (Chris Osborn)… aucune distance propre au sujet, même pire : il embrasse les situations éculées avec une saine distraction. Quelle tristesse de constater que les auteurs ne pensent pas plus loin que le bout de leur nez et ne cherchent pas ne serait-ce qu'une once d'originalité dans l'approche scénaristique?

Pleins feux sur l'action-cam sous toutes ses coutures. Il faudra donc tenter de prêter le moins attention possible sur des personnages inexistants pour se concentrer sur les morceaux de choix. A savoir les attaques du Bigfoot. Il revient et il n'est pas content. Mais alors pas du tout. Sanchez en profite pour livrer quelques séquences haute tension qui prennent une dimension inattendue sur grand écran. A commencer par une séquence renvoyant directement à V/H/S 2 : la traque de Matt (Samuel Davis) en vélocross, sa GoPro vissée sur la tête, avec le BigFoot qui se rapproche dangereusement en montage alterné. C'est puissant, tendu et hyper efficace. Idem pour l'attaque de la maison où les humains retranchés vont subir un assaut carnassier du meilleur effet. Sanchez tire le meilleur parti de l'espace sonore pour lancer à la fois des décibels puissants alliés aux hurlements terrifiants de la bête. Oubliez les pseudos documentaires LEGEND OF BIGFOOT, le pourtant sympa CREATURE FROM BLACK LAKE (qui arrive en Blu ray courant 2015) ou encore la saga des BOGEY CREEK : EXISTS est LE film de la créature maintes représentée qui réussira à faire sursauter (certes de manière là aussi un peu prévisible). A comparer à un autre DTV, ABOMINABLE de Ryan Schiffrin, qui réussissait aussi à provoquer quelques tourments bienvenus.

L'autre difficulté demeure la représentation du Bigfoot.Le piège du cascadeur dans le costume à poil, en gros. A l'instar d'ABOMINABLE, Sanchez ne montre que très peu la créature le long du film, et la révèle graduellement. Une approche intelligente, d'autant que la révélation finale montre non seulement la bête et surprise : les maquillages réussissent à non seulement être crédibles mais également à « humaniser » un être sauvage. Le dernier quart s'avère ainsi le meilleur des 81 minutes en termes à la fois de pression, de rebondissements et de narration.

Reste le sempiternel problème des films de found footage, à savoir trouver une logique narrative à ce que les détenteurs des caméras filment en permanence l'action. Si CLOVERFIELD pouvait trouver sa raison d'être, il ne s'agit pas du même cas ici. On assiste à une multiplication de points de vue, sans raison particulière, avec des motivations à toujours filmer vaguement exposées au début du film. A savoir le hipster-fumeur-cameraman-geek en chef obsédé des médias sociaux qui a disposé des micro caméras et autres GoPro autour de la maison. On pourrait presque supposer que le placement de produit bien en vue des caméras aura pu payer une partie du budget…

Autant donc laisser la logique narrative au placard, ne pas faire attention à la grossièreté du trait, du caractère interchangeable des protagonistes sans aucun intérêt. Pour profiter d'EXISTS, il faut se focaliser sur la créature, son apparition cruelle, sa vélocité quasi surnaturelle et l'enchaînement de violences bienvenues - avec ce sentiment étrange que les personnages absolument insupportables provoquent l'envie irrépressible des auteurs de s'en débarrasser via la créature. Apportant ainsi presque un sentiment d'empathie de la part des spectateurs. Bref, avec ses gros défauts, EXISTS emporte néanmoins la sympathie et devrait un des hôtes idéaux (et horribles) de vos soirées et après-midis ténébreux dans votre salon.

Rédacteur : Francis Barbier
Photo Francis Barbier
Dévoreur de scènes scandinaves et nordiques - sanguinolentes ou pas -, dégustateur de bisseries italiennes finement ciselées ou grossièrement lâchées sur pellicule, amateur de films en formats larges et 70mm en tous genres, avec une louche d'horreur sociale britannique, une lampée d'Albert Pyun (avant 2000), une fourchettée de Lamberto Bava (forever) et un soupçon de David DeCoteau (quand il se bouge). Sans reprendre des plats concoctés par William Friedkin pour ne pas risquer l'indigestion.
56 ans
1233 news
397 critiques Film & Vidéo
RECHERCHE
Mon compte
Se connecter

S'inscrire

Notes des lecteurs
Votez pour ce film
Vous n'êtes pas connecté !
-
0 votes
Ma note : -