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Critique du film et du Blu-ray Zone A
THE BUBBLE 1966

 

A bord d'un avion, Mark (Michael Cole) et sa femme enceinte Catherine (Deborah Walley) sont pris dans une violente tempête. Malgré les talents du pilote (Johnny Desmond), ils sont obligés d'atterrir au milieu de nulle part. Ils se retrouvent alors dans une ville sans nom où chaque habitant semble pris dans une boucle infinie, répétant ad nauseam les même gestes et les mêmes paroles. Mais, surtout, la ville est recouverte d'une bulle invisible d'où il est impossible de s'échapper et où le temps apparait dilué.

Le moins qu'on puisse dire est que THE BUBBLE demeure presque quarante après un film "autre" et ce par de nombreux aspects. Techniquement, d'abord, il fut le premier à expérimenter le système "Space-Vision" par son réalisateur, scénariste et producteur, Arch Oboler. A savoir un système permettant de répliquer la 3D sur non plus deux mais un seul projecteur. Il n'en était pas à son coup d'essai puisqu'il fut le premier à tourner un film en 3D : BWANA DEVIL, qui fit l'objet d'une simili-remake par Stephen Hopkins (L'OMBRE ET LA PROIE avec Michael Douglas). Pour mémoire, ce magicien de l'image avait réalisé un film de science-fiction nommé CINQ SURVIVANTS, devenant l'un des films les plus rentables en 1951 malgré son sujet et son budget minimal. Il utilisa ici le matériel optique spécial camera 3D et lentilles de Robert V. Bernier. Le destin de THE BUBBLE se verra cependant contrarié. Malgré l'avancée technologique, le film rencontra un échec public qui le plongera quelque peu dans l'oubli. Un premier montage d'une heure et cinquante deux minutes poussa les auteurs à trancher dans le vif. Ce qui se sent parfois vue la teneur de certaines ellipses ! Pour donner le montage à voir sur le Blu-ray de chez Kino Classics, à savoir quatre vingt onze minutes. Les scènes ont été coupées du négatif original et sont considérées comme définitivement perdues aujourd'hui. Avant de ressurgir quelques années après via un autre distributeur nommé Sherpix en 1972... Puis sous un autre titre, Oboler ayant revendu les droits à une société de distribution américaine nommé Monarch Releasing. Quelque peu remonté à quatre vingt quatorze minutes et avec une affiche mensongère, à savoir FANTASTIC INVASION OF PLANET EARTH en 1977. Il fut publicisé sous la bannière "StereoVision 3D" du fait que StereoVision International fournissait l'ensemble des projecteurs optiques d'occasion.

Oboler excelle dans la mise en scène de la ville-fantôme, où plusieurs siècles semblent s'être télescopés brutalement. Une entrée de station de métro new-yorkaise côtoie un temple grec, des gargouilles venues d'ailleurs...un semblant d'aspect western qui cohabite avec une science-fiction qui se base sur l'étrange et le bizarre. Le réalisateur provoque des spéculations à la fois chez ses personnages et chez les spectateurs. Il donne délibérément très peu d'informations sur le pourquoi de cette bulle transparente : extra-terrestres menant une opération? une expérience sur les humains? Une apocalypse s'est-elle déclenchée hors la bulle et les seuls survivants sont ceux prisonniers? Pourquoi est-ce que l'avion et ses trois passagers ont pu passer à travers la bulle? Un mélange d'ésotérisme, de fantastique science-fictionnel parcourt le film, sans jamais forcer chacun à la compréhension de sa finalité. Un peu comme si les personnages se trouvaient transportés dans un long épisode de LA QUATRIEME DIMENSION ou d'AU-DELA DU REEL. C'est d'ailleurs le principal souci de THE BUBBLE. Le sentiment de se retrouver dans un épisode de la QUATRIEME DIMENSION étiré de manière artificielle sur plus d'une heure et demie. Une écriture parfois incohérente, laissant des personnages en marge de l'histoire. Comme pas vraiment apeurés de ce qui leur arrive. Des événements qui se déroulent en dépit du bon sens et dont les vagues explications laissent planer plus de l'à peu près scénaristique qu'une réelle volonté de jouer la carte du fantastique. Certaines décisions prises par Mark et Catherine vis-à-vis de leur bébé à peine né font peine à constater pour des parents, voire un mari responsable! Oboler semble également reprendre la trajectoire animant la narration de FIVE, avec son groupe d'étrangers pris au piège d'un événement qu'ils ne maitrisent pas - jusqu'à se déchirer afin de trouver une éventuelle solution. Avec toujours au coeur de cela l'enfant naissant, le départ vers une nouvelle ère. Autant le message chrétien apparaissait sans ambages dans CINQ SURVIVANTS, autant ici il demeure plus en filigrane. L'Apocalypse nucléaire en 1951 et un phénomène surnaturel et/ou paranormal pour 1966. Les peurs évoluent avec les décades ! Ce qui n'empêche pas des moments chocs inattendus, comme les habitants violemment aspirés vers le haut de la bulle, le véhicule en feu projeté vers le ciel ou l'espèce de fauteuil dans l'étrange monticule orangé causant le changement de personnalité via un traitement de choc. Entre cela, beaucoup de plages de dialogues, d'allers et retours inutiles: les scènes de l'hôpital et du saloon au début du film remplissent plus le métrage que cela n'apporte à l'action. Qui plus est, la culture américaine semble opérer un cycle bien particulier, puisqu'une série télévisée nommée UNDER THE DOME, réalisée par Niels Arden Oplev, a fait surface en 2013, racontant l'histoire... d'une ville américaine se retrouvant coupée du monde, sous un dôme de verre. Stephen King aurait-il été plus qu'influencé par THE BUBBLE, hmm?

On sent néanmoins que le budget ne fut pas à la hauteur des espérances pour un tel sujet. Tourné dans les anciens studios Republic, Oboler multiplie les angles de prises de vue afin de faire oublier que la "ville" ne se trouve en fait qu'une intersection de deux rues, visiblement un lieu de tournage réaménagé pour l'occasion. Et il se pourrait aussi que des décors (UN MONDE FOU FOU FOU pour la Statue de Lincoln, par exemple) d'autres films aient contribué à l'étrangeté voulue et intégrés ici pour pas cher. A noter que la scène du saloon fut tourné dans un décor de la série GUNSMOKE !

Le film n'échappe pas à quelques facilités afin de promouvoir la profondeur de champ que permet le système Space-Vision. Si la 3D apparait généralement immersive, certains effets semblent cependant grossiers, le spectateur amusé verra une showgirl lever la jambe pour entamer un can-can mécanique mais affriolant avec ses dessous qui jaillissent à la figure des porteurs de lunettes 3D. Ou encore ce plateau volant, avec ses bières et ses verres à 13mn40, qui viennent se coller à l'écran... mais misère, la précision de la copie laisse apparaître les vilains fils de nylon transparent qui portent le plateau depuis le bar jusqu'au milieu de l'écran. L'effet "spécial" est quelque peu mis par terre!

Pour la première fois, il nous est possible de voir THE BUBBLE dans son format d'origine : à savoir en 2.55:1 et 3D, via le Blu-ray de chez Kino Classics. Sur un BD 50, en 1080p, encodage MPEG-4 et Codec MVC pour la 3D ainsi qu'AVC pour la 2D. Un point important : il est nécessaire de posséder un écran 3D et un lecteur Blu-ray 3D afin de bénéficier de l'expérience. Ceci posé, la 2D se lance immédiatement dans le cas d'installations ne pouvant décoder le signal 3D. Bien qu'ayant été considérablement nettoyée et remasterisée, l'image sert quelques aspérités et poussières le long du film. Comme à la scène à l'hôpital à partir de la 6e minutes, où les plans fixes laissent apparaitre divers points noirs et blancs (comme à 53mn46, la scène où Richard Cole se promène devant le manège). Le négatif ne devant pas être en grande forme, ceci explique vraisemblablement cela. Mais le respect du grain d'origine est appréciable, tout comme de voir certaines couleurs resplendissantes (le rouge du camion des pompiers à 55mn49), les contrastes ressortir malgré une pellicule couleur que l'on sent ne pas être optimale à la base. Certains plans semblent virer selon les scènes, donnant des tentes de peau pas toujours naturelles, notamment sur le plans en extérieur.

Concernant la 3D, elle se trouve "à l'ancienne", à savoir quelques images gratuites d'éléments sautant aux yeux des spectateurs, mais pas que. Tout du moins, il s'agit du meilleur atout de ce Blu-ray, et du film par la même occasion. La texture palpable de cette nouvelle dimension d'image est redoutable : les effets de l'aile l'avion (au début du film), via une caméra habilement placée, donne pleinement les sensations escomptées. Si THE BUBBLE ne reste en aucune manière une pierre d'angle du patrimoine cinématographique mondial, il demeure un must pour les amateurs de 3D. La restauration appliquée ici est superbe pour les effets 3D !

Profitant d'un BD 50, la piste sonore DTS HD MA 2.0 s'offre une belle stabilité quand au débit. Des effets stéréophoniques "Space-Vision" le temps de quelques moments, jusqu'à la partition parfois électronique des hyper-prolifiques Paul Sawtell (ayant oeuvré sur plus de 100 épisodes de VOYAGE AU FOND DES MERS d'Irwin Allen) et Bert Schefter, là aussi audacieuse. Même si les auditeurs les plus pointus auront reconnus quelques moments repiqués à la partition de... KRONOS ! On ne se trouve pas dans le niveau inventif de Louis et Bebe Barron pour PLANETE INTERDITE, mais à quelques encablures. ce qui ajoute à la bizarrerie de l'entreprise. Ici, la musique réussit de belles percées sans pour autant nuire à l'action, ni aux dialogues qui demeurent parfaitement clairs le long du film.

Provenant du négatif original 35mm, le film a été restauré par la 3D Film Archive aux USA. Le comparatif avant/après nettoyage de la copie (1080p - 1mn39, en 2D ou 3D) montre bien l'énorme travail accompli afin de rendre le Blu-ray le plus optimal possible. Disparition de griffures, poussières blanches et diverses saletés qui parasitaient grandement l'image.

Si le disque est inséré dans un lecteur Blu-ray sur ordinateur, il est possible d'accéder à un essai de Bob Furmanek sur THE BUBBLE. Ce texte revient de manière extensive sur le système Space-Vision, la carrière du film, sa trajectoire nationale, le travail de restauration... Le tout adoubé de photos de tournages, galerie de photos en noir et blanc, d'extraits de scénario, des images des optiques utilisées, le descriptif technique, le système de projection... un monceau d'informations précieuses sur le système Space-Vision, qui non seulement fit un bond en avant dans le traitement de la 3D, mais révolutionna entièrement la production de la 3D pendant les presque 30 ans qui suivirent. En effet, tous les films produits en 3D dès lors utilisèrent ce système. Enfin, une séquence alternative d'ouverture ainsi que les films annonce d'origine de 1966 et la ressortie de 1976 complètent le tableau.

THE BUBBLE 3D chez Kino Classics est donc recommandé à tout curieux amateur de 3D, et aux autres recherchant une expérience cinéphile hors de ce temps !

Rédacteur : Francis Barbier
Photo Francis Barbier
Dévoreur de scènes scandinaves et nordiques - sanguinolentes ou pas -, dégustateur de bisseries italiennes finement ciselées ou grossièrement lâchées sur pellicule, amateur de films en formats larges et 70mm en tous genres, avec une louche d'horreur sociale britannique, une lampée d'Albert Pyun (avant 2000), une fourchettée de Lamberto Bava (forever) et un soupçon de David DeCoteau (quand il se bouge). Sans reprendre des plats concoctés par William Friedkin pour ne pas risquer l'indigestion.
56 ans
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Une expérience filmique "autre" et rare
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Aucun sous-titrage d'aucune sorte
une copie pas exempte de petits défauts
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L'édition vidéo
THE BUBBLE Blu-ray Zone A (USA)
Editeur
Kino Lorber
Support
Blu-Ray (Simple couche)
Origine
USA (Zone A)
Date de Sortie
Durée
1h31
Image
2.35 (16/9)
Audio
English DTS Master Audio Mono
Sous-titrage
  • Aucun
  • Supplements
    • Démonstration de la restauration( 1080p - 1mn39)
    • Extraits du scénario - scènes coupées (16mn)
    • Essai de Bob Furmanek (accessible en BD-Rom - format PDF)
    • Galerie photos, scènes de tournage et images de cinémas projetant le film (1080p - 39mn)
    • Film annonce original (1mn41)
    • Film annonce ressortie 1976 (1mn12)
    • Générique d'ouverture alternatif (0mn31)
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