Dans le tranquille village de Folklypå, le vieil inventeur Reodor vit avec ses deux amis : Solvan le canard brailleur et Ludvig le hérisson peureux. Noël approche mais aucune trace de la neige ! Frimand Pøsen, l'éditeur du journal local, demande à Reodor une machine à fabriquer de la neige, et ce de façon à calmer le mécontentement de ses lecteurs auxquels il promet le froid à grand renfort d'annonce en une de son quotidien. Mais lorsque l'éditeur vole la machine afin de provoquer un record neigeux et s'assurer des scoops sensationnels, Solan et Ludvig décident de prendre les choses en main.
En 1975, la Norvège produisit un long métrage d'animation image par image qui fait désormais office de classique, d'après l'univers de Flåklypa par l'écrivain Kjell Aukrust : GRAND PRIX. Il a pour héros un génial inventeur, Reodor, participant à une grande course automobile. Tellement classique que le musée du cinéma d'Oslo réserve une partie de ses expositions permanentes à ce film. On peut ainsi y trouver les figurines ainsi que l'histoire du tournage. Quelques 38 ans après, la notoriété du film ne retombe pas et une suite pointe le bout de son nez. Reprenant les personnages principaux de GRAND PRIX, le scénariste Karsten Fullu s'inspire d'un roman d'Harald Sommerin Simonnæs et c'est donc SOLAN OG LUDVIG : JUL I FLÅKLYPA qui débarque sur les écrans. La traduction littérale du titre donne «Solan et Ludvig : Noël à Flåklypa» mais pour sa (timide) sortie dans les salles de notre pays, le distributeur français a opté pour un très passe-partout DE LA NEIGE POUR NOEL. Et bizarrement, la village de Flåklypa devient Pinchcliffe. Le film est sorti le 8 novembre 2013 en Norvège et il fut le plus gros succès de l'année mais aussi l'un des plus importants depuis longtemps. Au point que plus d'un Norvégien sur cinq s'est déplacé pour voir le film !
Voici un conte de Noël quelque peu atypique, très loin des torrents de glucose, de leçon de vie et de musique sirupeuse dont la plupart des films qui s'adressent aux enfants nous abreuvent. DE LA NEIGE POUR NOEL reprend le principe de la course, mais pas de voitures automobiles : il s'agit d'une course à la tempête de neige ! Comme le film original, DE LA NEIGE POUR NOEL adopte l'animation image par image, un procédé quelque peu tombé en désuétude et, en même temps, revigoré par quelques cinéastes comme, par exemple, les Studios Aardman. On notera d'ailleurs que le personnage de Wallace et ses inventions font furieusement penser à Reodor. C'est à se demander d'où est venue l'inspiration aux Studios Aardman pour élaborer Wallace. Et ça donne un sacré caractère au film ! Même si le numérique a été utilisé pour quelques rares effets de fumée et de nuages menaçants, nous sommes ici à des année lumières des images de synthèse en tous genres qui finissent par tuer l'originalité à la fois du propos et du visuel. DE LA NEIGE POUR NOEL offre une alternative idéale pour quiconque ne souhaite pas subir des oeuvres coulées dans un même moule.
Chaque intervenant possède un caractère unique : Solan le canard hâbleur et aventureux qui boit de l'alcool, accroc de la vitesse sur son traineau supersonique ! Le timide, pessimiste et peureux Ludvig qui finira par devenir un héros valeureux. Le rédacteur en chef du journal local qui pour asseoir son aura, passe par des manchettes à grands renforts de prévisions fumeuses au lieu de diffuser de vraies histoires. Tout en brossant et brassant des thématiques aussi variées que l'invisibilité, la voracité des médias prêts à tout pour le scoop accrocheur... Ce qui n'est pas sans rappeler un film diamétralement opposé et à la même période en France : NIGHT CALL. Le côté jusqu'au-boutiste de certains médias norvégiens se trouve visé mais il existe un côté résolument universel à cette charge. Le meilleur étant que cela ne vire pas à la leçon de morale généralisée, mais à un divertissement pétri d'une bonne humeur ambiante mêlant gags non-sensiques tendance slapstick que Tex Avery n'aurait pas renié (la scène de poursuite finale avec le robot-journaliste). Même le doublage français tente de retrouver le ton et l'esprit des voix originales
Jubilatoire, gentiment moqueur, techniquement superbe de par la stop-motion utilisée et l'expressivité des personnages, le film offre à la fois un récit pour les enfants mais également une parabole que les adultes sauront largement apprécier. DE LA NEIGE POUR NOEL s'adresse en effet à chacun : il serait très dommage de se passer d'un petit bijou d'animation, drôle, intelligent qui opte pour le parti-pris de la différence, tout en célébrant les joies de Noël qui approchent. De quoi retrouver son âme d'enfant et de savoir s'émerveiller devant une oeuvre certes candide, mais pas dupe ni de son public, ni de la manière dont il s'y prend pour faire passer les émotions. Rafraichissant !
