Durant plus de vingt ans, Walt Disney demande à P. L. Travers de lui céder les droits cinématographiques de «Mary Poppins», le cinéaste ayant fait la promesse à ses enfants de porter le livre à l'écran. Mais la romancière ne veut rien entendre jusqu'au jour où, au bord de la faillite, elle accepte de se déplacer aux Etats-Unis pour superviser la création de MARY POPPINS.
Contrairement à ce qui pourrait sembler évident, DANS L'OMBRE DE MARY : LA PROMESSE DE WALT DISNEY n'est pas, à l'origine, une idée de Walt Disney Pictures. En effet, c'est du côté de la télévision australienne que le projet va germer en 2002. Le producteur Ian Collie s'occupe d'un métrage d'un peu moins d'une heure intitulé THE SHADOW OF MARY POPPINS, un documentaire retraçant l'histoire de P.L. Travers (Pamela Lyndon Travers). L'histoire de cette romancière anglaise, née en Australie, lui donne l'idée de l'adapter pour le grand écran. Mais une dizaine d'années vont s'écouler avant que le film ne se concrétise. Gros écueil, la biographie de P.L. Travers ne peut aucunement oublier l'adaptation cinématographique de «Mary Poppins» et de la relation conflictuelle que l'auteur a entretenu avec Walt Disney durant plus d'une vingtaine d'années. Si la branche cinéma de la BBC est prête à coproduire le film, il apparaît évident que le métrage aura du mal à se passer de Walt Disney Pictures pour se monter. Néanmoins si le scénario est écrit, ce n'est qu'en 2011 que la maison de production en prendra connaissance. DANS L'OMBRE DE MARY va alors devenir le premier long-métrage dramatique de Walt Disney Pictures...
Bien que DANS L'OMBRE DE MARY s'intéresse à la création du film MARY POPPINS, il ne couvre pas l'entière production du classique de Disney. En réalité, le film se focalise essentiellement sur la romancière. Ici, la mise en chantier de MARY POPPINS sert à mettre en avant la jeunesse de la romancière de manière à expliquer ce qu'elle est devenue et, éventuellement, d'où provient son inspiration. De fait, le film n'est pas non plus une biographie complète puisqu'elle laisse à l'écart une grande partie de l'existence de la romancière. Il est bon aussi de préciser que DANS L'OMBRE DE MARY prend des libertés et déforme par endroits la réalité. Ainsi, de nombreux aspects des personnages réels sont oubliés que ce soit Walt Disney ou P.L. Travers. De même, la fin du film se montre très optimiste alors qu'en réalité la romancière a bloqué les droits des huit livres dédiés à «Mary Poppins» après avoir vu l'adaptation cinéma, empêchant une suite ou d'autres adaptations pour le grand écran. Evidemment, tordre la réalité dans un métrage mettant en scène des personnages ayant réellement existés est plutôt gênant. Mais DANS L'OMBRE DE MARY évoque un peu le thème principal de L'ODYSSEE DE PI. Retracer l'histoire dans toute sa véracité est parfois bien moins jolie que lui donner un aspect plus romanesque, pour que ce soit aussi plus acceptable. Cette idée, on la retrouve dans cette histoire d'une romancière acariâtre qui réinterprète son passé au travers de ses écrits. Ainsi, l'enfance de P.L. Travers ne prête pas à la rigolade donnant au métrage des passages réellement tragiques et poignants. Les spectateurs qui s'attendraient à découvrir une comédie légère risque d'être assez surpris en suivant les deux heures de projection. De l'humour, le film n'en est pas pour autant dénué. Toute la partie traitant des relations entre la romancière et les employés de Disney regorgent de moments amusants, la vieille femme ayant beaucoup de mal à voir son œuvre réinterprétée avec chanson et passages animés. Les demandes de P.L. Travers étant même assez souvent absurdes. Le film évoque ainsi l'attachement d'un auteur à son travail au point de ne pouvoir le laisser entre d'autres mains. Tout cela s'intègre à merveille avec les retours vers le passé de la romancière. Pourtant, au départ, ces flashs back sur l'enfance de l'héroïne sont un peu déstabilisants avant de devenir intrigants puis pertinents quant au parcours de P.L. Travers. Cela rappelle un peu un film totalement oublié, passé une seule et unique fois en France au Festival du Film Fantastique du Rex. DREAMCHILD évoquait une vieille dame qui fantasmait tout en se souvenant de son enfance au contact de l'auteur de «Alice au Pays des Merveilles». Cela s'avère largement plus sobre avec DANS L'OMBRE DE MARY qui s'ancre quant à lui entièrement dans le réel sans que le personnage principal ne se perde entre fiction et réalité.
Tom Hanks interprète Walt Disney et le comédien s'intègre une nouvelle fois naturellement dans son personnage. Il est aussi aidé par une reconstitution de l'époque particulièrement réussie que ce soit dans les décors et les costumes. Le film met même le comédien dans un show télévisé en noir et blanc, exercice que pratiquait régulièrement Walt Disney pour ses émissions. Néanmoins, Walt Disney n'est, en réalité, qu'un second rôle. Déterminant mais il n'est pas réellement au cœur du métrage ou, tout du moins, n'a pas une présence continuelle dans le film. Le titre français, DANS L'OMBRE DE MARY : LA PROMESSE DE WALT DISNEY, est d'ailleurs un choix surprenant mais peut être plus évocateur et vendeur pour un large public. Le titre original, SAVING MR. BANKS, ne mettait pas le cinéaste en avant et évoquait le sujet réel du métrage. Quoi qu'il en soit, la vedette du film, c'est Emma Thompson qui interprète le vrai rôle principal de l'histoire. Celle qui avait écrit pour le cinéma et interprété les deux NANNY McPHEE, fortement inspiré par MARY POPPINS, se montre parfaite dans un rôle qui semblait écrit pour elle, bien qu'à l'origine la production visait Meryl Streep. A ces deux têtes d'affiches, on peut encore ajouter Colin Farrell mais aussi et surtout Paul Giamatti qui est excellent dans un rôle bien plus discret et sobre. DANS L'OMBRE DE MARY regorge de qualités et cela donne, à l'arrivée, un métrage particulièrement réussi. Il faudra donc accepter que les faits réels aient été légèrement retouchés, gommant les aspects plus sombres de P.L. Travers et Walt Disney, pour y voir une très belle histoire qui est à même de provoquer le rire et les larmes. Enfin, si vous voulez entendre la vraie P.L. Travers, restez durant le générique de fin qui diffuse des extraits des bandes enregistrées lorsque la romancière travaillait avec les scénaristes de Disney.