Alors qu'il participait à une expérience militaire américaine en 1943, David Herdeg s'est vu projeté en plein coeur du Nevada, en 1983. Il y a poursuivi son existence et a même connu les joies de la paternité. Mais après dix ans de cette nouvelle vie, David ressent à nouveau les effets d'une distorsion temporelle. La cause en est le Docteur William Mailer, un dément qui décide d'utiliser la technologie du vortex pour envoyer une bombe atomique sur Washington, en 1943. Dès lors, 1993 s'en voit bouleversé et les Etats-Unis ne sont plus que l'annexe industrielle d'une Allemagne nazie victorieuse. Dans ce présent alternatif, William Mailer est bien évidemment le dictateur menant le monde d'une poigne de fer. Quant à David Herdeg, il est ce que l'on pourrait appeler une mouche dans le lait. Celle par qui la rébellion entend bien renverser le pouvoir en place et, plus que cela, s'offrir une Histoire plus heureuse.
En 1984 sortait sur les écrans THE PHILADELPHIA EXPERIMENT, un métrage de Stewart Raffill balançant deux militaires dans le futur. Assez modeste dans ses ambitions, le film s'amusait à broder une aventure assez familiale autour de l'expérience du titre, aussi intrigante qu'improbable. L'argument «basé sur des faits réels» se suffisait alors à lui-même, le charisme des acteurs faisant le reste... PHILADELPHIA EXPERIMENT II sera donc une suite assez tardive puisque n'arrivant qu'en 93. Plus question ici de déterrer un dossier militaire ésotérique, mais plutôt de prolonger les aventures de notre héros perdu dans le futur. Pour cela, Kim Steven Ketelsen et Kevin Rock partent d'une idée intéressante quoique déjà exploitée par le passé : Retourner dans le temps pour y modifier le cours de l'Histoire.
Ce postulat aura fait les belles heures de la science-fiction et traversera par exemple l'esprit des protagonistes de NIMITZ, RETOUR VERS L'ENFER. Mieux encore, elle sera mise à profit par un Sonny Chiba assoiffé de pouvoir dans LES GUERRIERS DE L'APOCALYPSE. Mais l'idée même d'une uchronie mettant en scène une Allemagne victorieuse à l'issue de la seconde guerre mondiale évoque également (et surtout) «Le Maître du Haut-Château», roman de 1962 rédigé par le Maître Philip K. Dick. En 1992, soit un an avant la sortie de PHILADELPHIA EXPERIMENT II, l'écrivain Robert Harris livre également le récit d'un monde conquis par les nazis. Ce sera «Le crépuscule des Aigles», adapté pour la télévision sous le même titre deux ans plus tard. Il est également bon de rappeler que plus près de nous, JIN-ROH : LA BRIGADE DES LOUPS suggère lui aussi une victoire des allemands. La série télévisée SLIDERS : LES MONDES PARALLELES l'envisage dans sa quatrième saison via l'épisode «Un Monde de Répression», et MISFITS fera de même dans l'épisode «Allo, Hitler ?» de sa troisième saison...
PHILADELPHIA EXPERIMENT II s'inscrit donc dans ce registre, transposant son héros dans une Amérique tristement nazifiée. Et autant dire que ce n'est pas beau à voir ! Deux ou trois couloirs, quelques hangars vides ou fort peu meublés, une poignée d'ordinateurs bricolés avec les moyens du bord... On sent bien que cette suite n'a bénéficié ni des moyens, ni des ambitions de son prédécesseur. Stephen Cornwell, faiseur pour le moins modeste, s'en accommodera difficilement et Michael Paré, interprète du héros dans le premier volet, ne reprendra pas son rôle. La chose est d'autant plus surprenante que les deux hommes venaient de collaborer sur KILLING STREETS et que la carrière de l'acteur prenait sérieusement l'eau. Il sera cependant remplacé par Brad Johnson avec lequel, avouons-le, il partage une certaine ressemblance physique. Les deux acteurs ont également en commun une «gloire» éclair qui interviendra en début de carrière et se résumera dans le cas de Johnson à ALWAYS : POUR TOUJOURS et LE VOL DE L'INTRUDER. Après cela, le bonhomme versera dans la série B, catégorie dont PHILADELPHIA EXPERIMENT II fait indiscutablement partie.
Car en plus de proposer des décors incroyablement fauchés, le métrage aligne quelques fautes de goût pour le moins surprenantes. Son dictateur vêtu comme le J.R Ewing de la série Dallas en est une belle, tout comme un certain nombre de répliques à l'orientation curieusement second degré. Celles-ci sont généralement débitées par de bien piètres acteurs, que l'on a bien du mal à sentir concernés. Dans ce registre, Cyril O'Reilly se distingue tout particulièrement, rivalisant avec un Gerrit Graham à la prestation outrancière. A croire que l'entreprise n'était prise au sérieux par personne...
Et pourtant. Les nombreuses références au «1984» de Georges Orwell témoignent d'une certaine intelligence. L'endoctrinement perpétuel, le rabâchage des idées, l'affichage de verbes simples et le révisionnisme historique sont là. On déplorera d'autant plus qu'ils ne soient présents qu'en retrait et finissent par se perdre au sein d'un métrage au rythme laborieux. Car on s'ennuie ferme lors du visionnage de PHILADELPHIA EXPERIMENT II ! Le joli minois de Marjean Holden n'y changera pas grand chose et les déambulations nonchalantes des personnages ne feront qu'enfoncer le clou. Au chapitre des coupables, nous pointerons également les dialogues, aussi longs qu'ils sont creux, ne meublant en aucun cas les quatre vingt quinze minutes de pelloche. Nous l'aurons compris, il devient dès lors très difficile d'argumenter en faveur de cette suite motivée par sa seule idée de base, et bien évidemment l'attrait d'un gain potentiel. Reste que nous doutons fort que les dollars aient pu pleuvoir en masse, et que cet avant-dernier métrage de Stephen Cornwell ne soit un jour ré-évalué à la hausse.
Plusieurs possibilités s'offrent au curieux voulant découvrir ce médiocre PHILADELPHIA EXPERIMENT II. La première date de mars 2005 et peut se dégoter de l'autre côté de l'Atlantique. L'éditeur Lions Gate avait en effet sorti une galette aux spécifications simplistes, à savoir une image 4/3 au ratio 1.33, accompagnée de la version originale en stéréo, non sous-titrée. L'autre possibilité est d'aller fouiner dans nos solderies françaises pour y dénicher un disque là encore peu satisfaisant, mais francophone... Le doublage français est donc proposé via une stéréo assez étouffée, voire sourde. Pas d'anicroche mais un résultat plus proche d'une bonne vieille VHS que d'un DVD sérieux. Inutile cependant de se plaindre puisque ce disque ne vous offrira pas d'alternative et, donc, ni version originale, ni sous-titrage.
Sur le plan de l'image, le disque français se démarque de son homologue américain en proposant un ratio 1.66 encodé en 16/9ème ! Mais ne nous emballons pas car à l'évidence, cette copie est tout aussi recadrée que celle du DVD américain, certains plans se montrant plus que douteux, voire très étriqués. Ajoutons que les couleurs sont ternes et ne se gênent pas pour baver. Les contrastes sont mous, les tâches nombreuses et la définition est très loin des standards du support. En bref, nous avons là une copie tout juste bonne à rendre la découverte possible... Bouclons tout de même le tour de cette galette en évoquant la présence d'un chapitrage et de la bande-annonce française d'époque, elle aussi proposée en 16/9ième et au ratio 1.66.