Laura Karnstein, souffre de cauchemars qui seraient attribués à une vieille malédiction planant sur sa famille. Désemparé, son père, le Comte Karnstein, fait appel à un spécialiste dans la restauration d'œuvre d'art pour venir enquêter dans son château de manière à prouver que la malédiction est sans fondement.
Actif dans l'industrie cinématographique italienne depuis les années 30, Camillo Mastrocinque fait une embardée vers le cinéma d'épouvante alors qu'il est en fin de carrière. Il va ainsi réaliser LA CRYPTE DU VAMPIRE puis UN ANGE POUR SATAN. Rien de très surprenant durant les années 60 puisque l'Italie s'est mise à produire des films d'horreur après avoir constaté le succès financier, à l'exportation, du MASQUE DU DEMON de Mario Bava. Durant quelques années, les producteurs italiens vont ainsi œuvrer dans le registre du gothique et de l'horreur, suivant ainsi les traces des productions britanniques de la Hammer Films. A un détail près, alors que les Anglais tournent en couleurs, les Italiens conservent pendant quelques temps le noir et blanc, choix dicté à l'origine par des raisons économiques. Mais cette «contrainte» va leur donner une patte assez particulière. La plupart d'entre eux vont ainsi jouer sur l'ambiance et les éclairages, flirtant de loin avec le cinéma expressionniste.
Au milieu des années 60, Ernesto Gastaldi, déjà scénariste de pas mal de métrages d'épouvante en Italie, s'associe à Tonino Valerii pour l'écriture de LA CRYPTE DU VAMPIRE. Comme souvent, à cette époque, les deux cinéastes vont prendre des pseudonymes anglais, le premier se fait ainsi appeler Julian Berry et le second Robert Bohr. C'est ainsi qu'ils seront crédités au générique d'un film dont l'histoire est fortement inspirée par Sheridan Le Fanu. Le nom de l'écrivain irlandais sera, quant à lui, non mentionné bien qu'il n'y ait aucune équivoque. En effet, le simple nom de la famille maudite de LA CRYPTE DU VAMPIRE renvoie directement à Carmilla, l'un des ouvrages fondateurs à propos du vampirisme, d'ailleurs publié avant le Dracula de Bram Stoker. Et ce jusque dans le titre espagnol, LA MALDICION DE LOS KARNSTEIN, le film étant une coproduction hispano-italienne. Mais les emprunts du scénario ne se borne pas à utiliser le nom des «Karnstein» puisque l'intrigue reprend certains éléments comme, par exemple, l'incident de carrosse. LA CRYPTE DU VAMPIRE étant clairement une adaptation non officielle de Carmilla. Mais le récit ne se montre pas vraiment fidèle pour autant. Evidemment, ceux qui sont familiers de l'œuvre de Sheridan Le Fanu ne seront pas surpris par le dénouement, pas plus que par l'amitié ambiguë entre les deux jeunes femmes. Encore que sur ce dernier point, LA CRYPTE DU VAMPIRE se montre extrêmement frileux, à la limite de l'interprétation subjective pour qui connaît l'œuvre originale. On retrouve même l'expédition pour mettre un terme à l'existence du vampire jusqu'à atteindre son cercueil. Néanmoins, le film réserve, à ce moment là, une surprise de taille. Probablement l'un des passages les plus incongrus de LA CRYPTE DU VAMPIRE que nous ne révèlerons pas ici.
Cette adaptation de Carmilla n'est donc pas totalement fidèle. Cela est dû à l'intrusion d'idées extérieures issues du MASQUE DU DEMON. Le film reprend l'idée d'une malédiction ancestrale jetée sur la famille des Karnstein quelques siècles auparavant par une femme maléfique. Le métrage intègre un flashback nous permettant de découvrir son «supplice» et sa fameuse malédiction. LA CRYPTE DU VAMPIRE fonctionne du coup un peu étrangement entre vampirisme et sorcellerie. Le film mettant en scène une créature suceuse de sang mais sans nous dévoiler clairement les oripeaux habituels de ce type de personnage. Une gouvernante pratique la magie noire sans que l'on ne comprenne vraiment son but. Tout cela aurait un peu de mal à s'imbriquer si Camillo Mastrocinque ne parsemait pas son film de passages étranges, de déambulations nocturnes dont on ne sait s'il s'agit de rêve ou de réalité et d'images bizarres. A l'instar d'une main tranchée utilisée pour un rituel mais aussi comme chandelier pour se déplacer au milieu de couloirs lugubres. Ce type de séquence permet d'avancer sans trop d'ennui face à une histoire déjà connue et utilisant des recettes qui le sont tout autant. Il faudra dès lors oublier la cohérence très relative du scénario, certains pans de l'intrigue sont amorcés et semblent abandonnés en cours de route sans trouver de résolution satisfaisante. C'est le cas, par exemple, d'un inquiétant bossu qui sera au centre de l'un des passages les plus réussis et les plus cruels du film.
Ernesto Gastaldi et Tonino Valerii reprendront peu après, une nouvelle fois, le nom des Karnstein pour LA SORCIERE SANGLANTE qui reprend surtout des idées du MASQUE DU DEMON, le film de Mario Bava ayant nettement marqué de nombreuses œuvres qui l'ont suivi. Si LA SORCIERE SANGLANTE bénéficie de Barbara Steele, pour LA CRYPTE DU VAMPIRE, le métrage se paie Christopher Lee au milieu d'un casting plus anecdotique. Depuis sa révélation dans LE CAUCHEMAR DE DRACULA, le comédien britannique est sollicité de toutes parts et il fait des allers et retours entre la Grande Bretagne et l'Italie depuis la fin des années 50. On a ainsi pu le voir dans quelques métrages écrit par le même Ernesto Gastaldi comme LA VIERGE DE NUREMBERG de Antonio Margheriti ou bien LE CORPS ET LE FOUET de Mario Bava. Dans LA CRYPTE DU VAMPIRE, le comédien se montre plutôt sobre, usant de sa prestance pour camper un aristocrate dépassé par les événements. A vrai dire, rien de bien exceptionnel si ce n'est qu'il n'interprète pas ici le rôle du vampire comme on pourrait éventuellement le croire. Il campe ici un personnage bien plus proche de celui qu'il interprétait dans LE CHIEN DES BASKERVILLES mais de manière bien plus statique.
Pas forcément le meilleur film d'épouvante gothique produit en Italie, LA CRYPTE DU VAMPIRE se montre tout de même plutôt sympathique. Camillo Mastrocinque se laissera de nouveau tenter par le genre en réalisant deux ans plus tard UN ANGE POUR SATAN mettant en scène Barbara Steele.
Artus Films nous propose de revoir LA CRYPTE DU VAMPIRE au sein de sa collection dédié au cinéma gothique. L'image nous est proposée dans un cadrage aux alentours du 1.66 d'origine avec un transfert 16/9. Ce n'est pas extrêmement détaillé, les contrastes sont lors de certains passages exagérés ou bien les contours ne sont pas toujours très naturels. Mais cela n'entache pas vraiment la vision du métrage. Nous sommes en effet loin de certains transferts plus litigieux vus sur des films libres de droits commercialisés par l'éditeur. Ici, le boulot est donc très honnête. De plus, on nous propose de choisir entre la version «originale» italienne et le doublage français d'époque. Les deux pistes audio ne rivalisent pas avec ce que l'on fait de nos jours mais cela ne pose pas de réel problème à l'écoute. Evidemment, un sous-titrage français est disponible sur la piste audio italienne.
En complément du film, l'éditeur permet de revoir des bandes-annonces, dont celle de LA CRYPTE DU VAMPIRE en version française d'époque. Un ajout des plus sympathiques. On peut aussi consulter une galerie de photos bien fournie en clichés, affiches et photos d'exploitation. Enfin, on nous propose aussi une interview d'Alain Petit intitulé «Le Crypte et l'Incube». Pourquoi «Le Crypte» ? Une coquille ? Peut importe... Durant une vingtaine de minutes, Alain Petit nous parle surtout des comédiens et des scénaristes du film. Cela permet ainsi, pour ceux qui en auraient besoin, d'éclairer un peu la carrière des uns et des autres.