Eva assiste, de la fenêtre de son appartement, à la tombée de missiles nucléaires sur sa ville. Son petit ami l'emmène rapidement dans l'escalier dans l'espoir de fuir en compagnie des autres habitants. Avant que l'immeuble ne soit touché par l'onde de choc, ils réussissent à s'enfermer dans le sous-sol avec quelques autres résidents. Ils vont dès lors devoir vivre ensemble… mais pour combien de temps ?
Après HITMAN et FRONTIERE(S), Xavier Gens se lance dans un troisième métrage bien différent de ce qu'il a pu faire auparavant. Tout du moins en apparence puisque FRONTIERE(S) possède tout de même quelques liens avec THE DIVIDE. Mais ce troisième long métrage vient s'ajouter à la longue filmographie des films post-apocalyptique. Il suit ainsi le destin d'une poignée de survivants après une attaque nucléaire. En soit, le sujet n'est pas spécialement nouveau, les Américains ayant déjà largement couvert le sujet dès les années 50. Toute la période de la guerre froide, avec la paranoïa d'une attaque communiste, avait suscité des métrages tentant d'exposer ce qu'il adviendrait de la population en cas d'une apocalypse nucléaire. On citera LE DERNIER RIVAGE ou encore LE MONDE, LA CHAIR ET LE DIABLE. Impossible de lister ici tous les films ayant traités de ce sujet mais il apparaît intéressant de rapprocher THE DIVIDE de métrages se focalisant sur des personnages contraint de vivre ensemble à l'image de CINQ SURVIVANTS, PANIQUE ANNEE ZERO, TERRE BRULEE ou encore DAY THE WORLD ENDED. Ainsi, des individus très différents les uns des autres sont obligés de cohabiter, la promiscuité ne manquant pas de déclencher des frictions exacerbées par la situation catastrophique de base mais aussi par le manque d'eau ou de nourriture. Dans la plupart des cas, les survivants conservent l'espoir, si ce n'est de retrouver une vie normale au moins de reconstruire une société. Dans THE DIVIDE, Xavier Gens annihile l'espoir de ses protagonistes. On sera d'ailleurs étonné qu'aucun échange entre les personnages n'aborde le sujet de l'absence d'avenir. A la place, le film expose la scission entre deux groupes, les uns conservant des préceptes moraux alors que les autres cèdent à la loi du plus fort. Xavier Gens avoue ainsi s'être inspiré de SA MAJESTE DES MOUCHES mais son film semble pourtant bien plus proche du plus récent BLINDNESS. On retrouve ainsi la déshumanisation progressive des survivants jusqu'à des rebondissements relativement similaires.
La première partie de THE DIVIDE est une véritable réussite. Plaçant le spectateur au milieu d'une catastrophe, Xavier Gens nous enferme très vite dans le sous-sol avec des individus que l'on va devoir apprendre à connaître au fur et à mesure. Une mise en place assez exemplaire qui est grandement aidée par les comédiens avec, en tête, Michael Biehn et Rosanna Arquette. Celui-ci s'impose dès le départ comme le maître des lieux, son personnage étant le locataire du sous-sol mais aussi à l'évidence le plus autoritaire du groupe. On comprendra pourquoi par la suite lorsque l'intrigue fouillera un peu son passé douloureux lié aux attentats du 11 septembre. Mais on émettra tout de même des réserves sur l'utilisation du drapeau américain comme pour nous exposer le symbole d'une société qui fabrique des paranos individualistes, racistes et adeptes de la survie. Surtout qu'au final, c'est justement grâce à cet Américain pur jus que notre petit groupe trouve un illusoire refuge. Là où le film réussit à marquer clairement des points, c'est plutôt en nous surprenant comme lorsque Michael Biehn s'adresse directement à la seule gamine faisant partie des survivants. La tension se montre palpable et surtout le traitement des personnages, même s'ils sont assez stéréotypés, paraît assez crédible. Des surprises, le film en contient d'autres comme l'arrivée des «secours». Malheureusement, THE DIVIDE perd un peu de sa crédibilité en avançant et laissera, à l'arrivée, pas mal de zones d'ombres. Outre l'étrange laboratoire dont on ne saura pas grand chose, une scène coupée l'évoque mais sans apporter de réponse, THE DIVIDE perd la notion du temps et du placement des lieux. Alors que le film se déroule, on n'a ainsi un peu de mal à jauger le temps qui s'est écoulé, donnant un aspect étrangement rapide à l'évolution de certains des personnages. Pire, l'emplacement des toilettes dans une scène semble s'être déplacé miraculeusement pour les besoins du scénario. Des défauts, THE DIVIDE en contient mais le métrage tient plutôt bien la route sur la longue. Même lorsque celui-ci tend vers des extrêmes pour illustrer la déchéance psychologique de ses personnages, des séquences un peu «too much», THE DIVIDE se rééquilibre assez vite. Ne donnant ainsi pas l'impression que le métrage se vautre dans la vulgarité gratuite. Certainement plus réussis que FRONTIERE(S), ce troisième long-métrage de Xavier Gens nous offre une vision très noire de l'humanité et tend à prouver que le cinéaste s'améliore de film en film.
Contrairement à HITMAN et FRONTIERE(S), le nouveau film de Xavier Gens n'a pas eu l'honneur d'une distribution dans les salles. Quelque part, cela semble étrange puisque le film paraît finalement un cran au-dessus de ses deux premiers essais cinématographiques. Tant pis, il faudra donc se contenter d'une sortie directement en vidéo. Et l'éditeur français qui s'en occupe fait un choix des plus curieux. En effet, BAC Vidéo propose le film en DVD et en Blu-ray mais les suppléments ne sont absolument pas les mêmes sur ces deux éditions. Pour avoir l'intégralité des suppléments, il faudra donc opter pour une troisième édition contenant le Blu-ray, le DVD ainsi qu'un disque supplémentaire contenant une interview de plus et trois courts-métrages. En soit, cela ne devrait pas gêner ceux qui sont équipés en Blu-ray puisqu'ils pourront lire tous les suppléments sans aucun problème. Cela s'avère un poil plus compliqué si vous n'avez qu'un lecteur DVD.
Première constatation à la vision du film sur le Blu-ray, il s'agit d'un transfert 1080i/50hz. Cela ne respecte donc pas le défilement normal de l'image et du son. Evidemment, on peut arguer que cela ne se voit pas à l'œil nu. Mais dans le cas de THE DIVIDE, il s'avère que l'image manque de pêche et si la résolution ressemble bien à de la haute définition, l'ensemble n'est pas super convaincant. Il est d'ailleurs difficile d'affirmer d'où vient le problème dans le sens où le DVD n'arbore pas non plus une image de compétition. Problème dans la chaine de traitement des images du film ? Problème lors du transfert du métrage en vidéo ? En tout cas, dans le cas du Blu-ray, la qualité fluctue, certains plans sont acceptables alors que d'autres fourmillent à l'extrême, visible particulièrement en basse lumière, ou bien donne l'impression qu'une sorte de quadrillage se plaque en transparence sur l'image. Il nous est arrivé de défendre des Blu-ray décriés à tort mais dans le cas de THE DIVIDE, cela nous laisse un peu perplexe.
Heureusement, les pistes sonores se rattrapent avec la version originale sous-titrée et le doublage français, les deux en DTS HD Master Audio 5.1. On passera rapidement sur le doublage français qui s'il ne contient pas de défaut technique ne réussit pas vraiment à retranscrire la tension naturelle des protagonistes dans la version originale anglaise. En tout cas, si pas mal de passage se montre très intimiste, les pistes audio se lâchent durant quelques passages franchement réussis. L'attaque de l'abri avec la musique minimaliste en est un très bon exemple au même titre que les passages où on imagine l'effondrement d'un immeuble.
Comme déjà dit, les suppléments sont répartis sur trois disques. Commençons par le Blu-ray qui contient un bonus incontournable. Il s'agit d'une petite Featurette expliquant les soucis de financement du film avec des interventions de Xavier Gens et de tous les producteurs de THE DIVIDE. A côté, on peut encore découvrir une interview du compositeur de la musique qui donne donc la parole à un Jean-Pierre Taieb plutôt sympathique mais qui semble ramer face aux questions de son interlocutrice. Ce supplément comporte d'ailleurs un gros problème avec la prise de son, les questions de la journaliste sont largement en retrait et le niveau sonore est d'une manière générale trop bas. On retrouve ce défaut sur tous les suppléments produits par les Français sur cette édition. Cela inclut les deux interviews de Xavier Gens, l'une sur le Blu-ray et l'autre sur le troisième DVD, ainsi que sur celle du technicien en charge des effets spéciaux numériques du film. Sur le Blu-ray, il nous explique donc les trucs de manière à intégrer les effets numériques aux séquences tournées avec les comédiens, révélant aussi un plan impossible avec un miroir. Curieusement, il existe au moins un autre plan impossible dans le film mais on ne nous expliquera pas ici comment on peut faire passer la caméra dans le faux plafond pour suivre des personnages avant de ressortir à l'air libre. Xavier Gens est aussi interviewé en langue française mais cela s'avère en grande partie très redondant avec le reste des suppléments produits, eux, en langue anglaise et qui s'avère bien plus attrayant. Ici, le réalisateur se retrouve seul, face caméra à répondre à une interlocutrice invisible dont on peine à entendre les questions… Enfin, le Blu-ray contient aussi la bande-annonce de THE DIVIDE ainsi qu'une fin alternative dont les effets spéciaux n'ont pas été finalisés.
Sur l'édition DVD, on peut suivre un making-of intitulé «Les coulisses du tournage». 24 minutes découpées en plusieurs parties n'ayant pas de lien les unes avec les autres, donnant à l'ensemble un côté un peu bordélique. Pour autant, le résultat se montre fort sympathique, peut être parce que justement cela tranche littéralement avec l'aspect épuré des interviews françaises. Là, on peut donc découvrir tous les intervenants du film qui s'expriment entre deux images de tournage. On notera que malgré son jeune âge, à une même question posée aux autres comédiens, Abbey Thickson nous fait la réponse la plus argumentée et la plus mature. Le DVD contient aussi une scène coupée où deux personnages évoquent un point mystérieux de l'intrigue sans pour autant apporter plus d'éclaircissement. Au moins, cela prouve que, comme les spectateurs, les personnages se posent des questions. Durant près de huit minutes, on peut aussi assister à un melting-pots de séquences entre bêtisier et plantages devant et derrière la caméra d'où le titre «Les dérapages du tournage». Les suppléments du DVD se terminent avec la bande-annonce de THE DIVIDE mais aussi celle de deux autres films édités par BAC Vidéo.
Le troisième disque s'intéresse exclusivement à Xavier Gens. On commence par une interview en français, avec les mêmes défauts déjà notés, où le réalisateur revient sur son parcours et sur ses expériences passées et particulièrement HITMAN qui semble lui avoir retiré une grosse part de naïveté. Après un peu plus de treize minutes d'interviews, on peut découvrir trois courts-métrages de Xavier Gens : AU PETIT MATIN, BORN TO KAST et LES INCROYABLES AVENTURES DE FUSION MAN. De quoi réjouir les fans du cinéaste qui auront ainsi à loisir de découvrir ses travaux précédents !