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Critique du film
AMERICAN GRINDHOUSE 2010

 

Les documentaires sur l'histoire du cinéma de genre ont le vent en poupe. En 2010, nous avions déjà eu droit à deux documentaires lors du Festival du Film Fantastique de Gérardmer avec NIGHTMARES IN RED, WHITE AND BLUE et VIANDE D'ORIGINE FRANCAISE. Cette année, lors de l'édition 2011 du même festival, nous avons pu assister à une nouvelle tentative de vulgariser le thème du cinéma d'exploitation avec AMERICAN GRINDHOUSE.

Le mot «Grindhouse» a été remis au goût du jour par Quentin Tarantino et Robert Rodriguez pour leur double programme BOULEVARD DE LA MORT / PLANETE TERREUR. Hommage à un certain type de cinémas projetant des films d'exploitation identifiés d'abord comme étant des années 70. Depuis, nombre de société de distribution de DVD et autres diffuseurs mettent du «Grindhouse» à toutes les sauces. Le documentaire proposé va justement mettre les points sur les "I" en tentant une approche chronologique – peut-être trop classique mais clairement à vocation éducative. Donnant ainsi l'opportunité de comprendre les racines du terme et ce qu'il représente réellement.

Les aficionados n'apprendront sans doute pas grand-chose d'AMERICAN GRINDHOUSE qu'ils ne savent déjà. Hormis un aspect historique important remontant aux origines mêmes du cinéma – le fameux TRAFFIC IN SOULS de 1913 - et à son enracinement dans une réalité qui se verra confisquée par le code Hays jusque dans les années 50. Le travail effectué par les auteurs est à ce titre minutieux et remarquable. Et le film s'adjuge la voix de Robert Forster pour narrer l'ensemble. Un must, quoi.

Amusant de constater que la première vision dans un film d'un cinéma dit «Grindhouse» se trouve dans l'excellent thriller de série B I WAKE UP SCREAMING de Bruce Humberstone, où l'on voit les héros (Betty Grable et Victor Mature) dans une salle de cinéma. En fait, AMERICAN GRINDHOUSE est pétri d'anecdotes, de références (et d'extraits de films) qui, à défaut d'éclairer complètement le mystère du pouvoir d'attraction de ces métrages qui "exploitent", maintient facilement l'intérêt jusqu'au bout de ses 81 minutes. Les interventions amusées et hautement intéressantes de Fred Williamson, Larry Cohen, Don Edmonds comptent pour beaucoup. Don Edmonds qui justement avoue avec beaucoup d'humour se considérer comme prostitué dans la manière d'avoir fait ILSA LA LOUVE DES SS. D'autant plus que le réalisateur Elijah Drenner sait équilibrer son propos : avoir un côté informatif à propos du Grindhouse, l'enrober dans une structure facilement appréhendable tout en parsemant les propos des intervenants d'extraits à forte contribution titillatoire. On vient voir AMERICAN GRINDHOUSE pour certes apprendre quelque chose, éventuellement se remémorer des VHS vues subrepticement mais aussi pour se rincer l'œil. Tout le sujet du genre en question !

L'indéniable plus du film est d'avoir amené journalistes et historiens du genre à donner un input sociologique à un sous-genre cinématographique. En replaçant les œuvres dans leurs contextes propres (des nudies en passant par les horreurs d'Herschell Gordon Lewis, le cycle des films de prison de femmes, au porno soft et hard), ces films apparaissent ainsi comme des excroissances économiques logiques d'un marché en pleine évolution. Eu égard également à la structure de diffusion des films avant 1970.

Les interventions de John Landis, toujours pleines d'entrain et amusantes (voir ses commentaires sur LA PASSION DU CHRIST, qu'il rebaptise TEXAS CHAINSAW JESUS !), sont parfois à la limite de la moquerie ; tout en étant parfaitement conscient du système dans lequel ce type de cinéma a évolué, d'un point de vue créatif, qualitatif et économique. Mais il s'agit surtout en filigrane de l'importance de ce cinéma qui a finalement plus qu'influencé le cinéma «grand public». A préciser par ailleurs que John Landis et Joe Dante interviennent également dans un autre documentaire présenté lui aussi au Festival du Film Fantastique de Gérardmer en 2011 : MACHETE MAIDENS UNLEASHED ! A voir ces deux métrages coup sur coup, il semble ainsi y avoir une redite dans certains de leurs propos. Mais c'est peut être aussi et surtout parce que les deux documentaires traitent du même thème en dehors de leur localisation géographique.

Au finish, il est plus qu'improbable de voir AMERICAN GRINDHOUSE sur grand écran. Il aura beaucoup plus de valeur et d'impact sur les téléviseurs et autres moniteurs (et moins de risque pour le distributeur, vu l'échec total de sa sortie cinéma aux Etats-Unis). En même temps, ce documentaire s'adresse quasi-exclusivement aux fans des films de genre, aux connaisseurs du sujet. Il aura du mal à accrocher les éventuels curieux, sans parler du grand public pour qui les films éducatifs sur la naissance des enfants, les méfaits de la marijuana, les tortures nazies et autres films ultra-gore sont relativement étrangers. Néanmoins, le fan de base saura se satisfaire de l'exigence et de l'enthousiasme contenus dans ce AMERICAN GRINDHOUSE !

Rédacteur : Francis Barbier
Photo Francis Barbier
Dévoreur de scènes scandinaves et nordiques - sanguinolentes ou pas -, dégustateur de bisseries italiennes finement ciselées ou grossièrement lâchées sur pellicule, amateur de films en formats larges et 70mm en tous genres, avec une louche d'horreur sociale britannique, une lampée d'Albert Pyun (avant 2000), une fourchettée de Lamberto Bava (forever) et un soupçon de David DeCoteau (quand il se bouge). Sans reprendre des plats concoctés par William Friedkin pour ne pas risquer l'indigestion.
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