Le monde a basculé depuis qu'un virus transforme les humains en individus enragés, propageant leur mal par le sang et les morsures. Marco et Sonia tentent désespérément de fuir. C'est alors qu'ils trouvent une immense bâtisse, un Sanatorium abandonné et situé au cœur de la montagne. Ils décident de s'y terrer afin d'attendre d'éventuels secours mais Marco est déjà rongé par le virus…
Plutôt pressé d'aller se faire la main sur le terrain, David Morley ne fera qu'un furtif passage dans une école de cinéma avant de devenir assistant-réalisateur. Fort de cette expérience il mettra en scène DOMINO CASS' CRAD, une comédie de quelques minutes mise en boite avec les moyens du bord. Cela lui permettra cependant d'obtenir de quoi réaliser LE PELOTON, un nouveau court métrage avec cette fois-ci Lorànt Deutch au casting. ORGANIK, le troisième film de David Morley, connaîtra une genèse plus longue qui se verra cependant récompensée à Gérardmer par le Prix du meilleur Court. Premier pas remarqué dans le monde de l'horreur, ce film permettra donc d'envisager la mise en chantier d'un long métrage. David Morley proposera alors de s'attaquer à la thématique du zombie et rassurera ses investisseurs en tournant MORSURE, un court-métrage dont nous vous avions déjà parlé (cf. News du 9 janvier 2009). MUTANTS, le résultat, sortira finalement dans les salles en mai 2009 avant donc de rejoindre les linéaires du marché vidéo en novembre de la même année…
Si les films de mort-vivants (ou «infectés») se suivent et se ressemblent pour la plupart ces dernières années, MUTANTS change quelque peu la donne en montrant des ambitions autres, bien plus axées sur les personnages. Ce sera du moins le cas durant une première heure, avare en créatures, centrée quasi-exclusivement sur son couple vedette… Durant cette première portion, Hélène de Fougerolles et Francis Renaud assurent donc le spectacle et tentent de créer à l'écran l'image d'un couple soudé et touché par une terrible tragédie. En effet, lui est infecté et perd heures après heures son humanité sous le regard de sa compagne… La mutation se montre lente et douloureuse, évoquant très clairement celle du professeur Brundle de LA MOUCHE version Cronenberg. Au détour de quelques scènes ou idées, on pourrait même parler de copie pure et simple tant David Morley semble ponctionner son modèle. Cette étonnante resucée, à peine voilée, s'avère d'autant plus gênante que si les effets spéciaux sont à la hauteur, la performance des acteurs l'est malheureusement moins…
Après la triste prestation de Marie-Sohna Condé dans l'introduction, Hélène de Fougerolles rehausse le niveau mais ne parvient malheureusement pas à honorer l'ensemble du contrat placé sur ses épaules. L'alchimie ne prend pas, l'implication ne semble pas suffisante et certaines lignes de dialogues, pourtant capitales, tombent totalement à plat («Tu ne peux pas me demander ça», vingt-septième minute). A partir de là, les dialogues semblent s'éterniser, les plans s'enchaîner mollement et la transformation traîner en longueur. La belle performance de Francis Renaud et les superbes maquillages de Frédéric Lainé ne suffisent plus, le temps devient long et, face à l'ennui, on en vient à espérer que MUTANTS va finalement se réorienter vers le film d'«infectés» plus classique, Bis et nerveux.
C'est se qui se produira sur le tard, grâce à l'arrivée d'un petit groupe armé en quête d'essence. Parmi eux, Dida Diafat, le kickboxer de CHOK-DEE qui versera ici le premier sang… A partir de cet instant, MUTANTS oublie LA MOUCHE pour se nourrir de 28 JOURS PLUS TARD, tics de réalisations inclus. La caméra tremble à l'excès, les monstres galopent, vomissent un sang noir-pétrole et se montrent particulièrement agressifs. La mise en scène n'a rien d'inventive mais le rythme s'envole et David Morley mène très habilement sa barque. On retrouve ici la brutalité de MORSURE et l'on s'étonne du soin apporté à des maquillages qui n'apparaîtront pourtant que quelques secondes à l'écran. Ce pointillisme vient du reste accompagner une photographie globalement léchée, aidée en cela par un décor (un sanatorium abandonné) des plus sordides, personnage à part entière à l'image de l'hôtel de SHINING…
Avec MUTANTS, David Morley nous livre donc un film en demi-teinte. Particulièrement soigné et plutôt ambitieux, le métrage est cependant rongé par des influences trop marquées, voire étouffantes. L'ombre de Cronenberg plane ainsi durant trois quarts d'heure, menant à une comparaison guère flatteuse pour le travail de notre jeune réalisateur Français. Gageons que David Morley saura à l'avenir proposer des œuvres plus personnelles et, surtout, rythmer son récit de manière plus homogène…
MUTANTS s'est vu édité en DVD dans l'hexagone par CTV International. L'image nous est proposée en 16/9ème et respecte bien évidemment le ratio 1.85 d'origine. Elle se montre d'assez bonne facture, restituant bien le travail de photographie réalisé lors du tournage en 16mm puis en post-production numérique. Le grain est agréable, la teinte bleutée parfaitement rendue et ce sans que la compression ne vienne entacher notre plaisir. Les contrastes délibérément puissants ressortent clairement et achèvent de composer une photographie rude, mais appréciable car parfaitement dans le ton du film.
Sur le plan sonore, la version originale française sera déclinée en Dolby Digital 5.1 ou en DTS 5.1 et dans les deux cas, nous n'aurons guère de prouesse en terme de spatialisation. Bien que solides, les mixages semblent relativement confus et l'action se localisera davantage sur les enceintes frontales. Reste que les dialogues sont ici parfaitement clairs et que nous n'avons noté aucun incident particulier.
Cette édition DVD s'offre en outre un contenu éditorial des plus sympathiques. Attaquons tout d'abord par le court métrage MORSURE, ici introduit par David Morley et proposé dans une qualité très convenable. Toujours aussi efficace visuellement, ce court reste cependant et avant tout une ébauche de MUTANTS sur le plan de la mise en scène. Hormis cela, le récit demeure pauvre et il est surtout intéressant d'observer l'évolution des effets spéciaux d'un film à l'autre. Celle-ci sera du reste évoquée dans le documentaire dédiés aux «Effets de maquillages» d'une durée excédant les six minutes. Intéressant, ce petit reportage nous dévoile des trucages réalisés avec soin par une équipe des plus réduites. On pourra ainsi suivre sans ennui la mutation de Francis Renaud de A à Z.
Le bonus suivant donne la parole à David Morley durant plus de huit minutes. Détendu et souriant, le jeune homme nous parle de la genèse de MUTANTS, de ses différentes sources d'inspirations (très évidentes !) et des ambitions qui étaient les siennes avec ce premier long. Nous ne sommes pas aussi convaincu que lui qu'il y soit parvenu mais qu'importe, le bonhomme est à l'évidence sincère et se laisse écouter sans déplaisir. Il en sera d'ailleurs de même sur le commentaire audio. Le réalisateur partage alors son temps de paroles avec son chef opérateur, Nicolas Massart. Leur propos est fluide, accompagne parfaitement le film et les interruptions se font rares. Les anecdotes sont bien souvent pertinentes et l'on apprendra par exemple que David Morley et Louis-Paul Desanges ont dû ré-écrire une partie du script suite à la découverte du fameux Sanatorium. Quand on voit l'importance que joue cette bâtisse dans l'ambiance du métrage, on ne peut bien évidemment que saluer ce choix...
L'interactivité du DVD s'achèvera avec un diaporama dévoilant quelques belles photos de tournage, le teaser du film, sa bande-annonce ainsi que celle de MAJESTIC, lancée pour sa part à l'insertion du disque. Malgré la provision de compléments, leur qualité ainsi que l'implication du réalisateur, nous regretterons tout de même que les autres courts-métrages ne soient pas proposés...