Lors d'un tremblement de terre, au Mexique, on découvre dans les décombres
d'un immeuble un vieil homme dont le coeur a été transpercé par une
pointe. Sa maison et ses biens sont vendus aux enchères. Un antiquaire
récupère ainsi une statuette contenant un objet d'or finement ciselé,
dont le mécanisme complexe a été inventé par le défunt quelques 400
ans plus tôt. L'antiquaire, essayant d'en comprendre l'utilité, déclenche
le mécanisme. L'objet s'agrippe à sa main et la lui transperce violemment.
Le lendemain, il se sent étrangement en forme, à la grande surprise
de son épouse qui le trouve rajeuni. L'homme ayant rasé sa moustache,
elle ne s'en étonne pas davantage. En fait, l'antiquaire, prénommé Jesus,
devient immortel malgré lui, par accident, sous les yeux de sa petite-fille
Aurora. Mais l'objet est convoité depuis près de quarante ans par Dieter,
un industriel vénal souffrant d'un cancer en phase terminale, prêt à
tout pour vivre éternellement. Celui-ci demande à son neveu Angel, de
récupérer le précieux objet.
Un film d'horreur dont les héros sont un vieux bonhomme et sa petite-fille, il fallait oser. Pourtant, c'est sans déplaisir qu'on se laisse embarquer dans cette histoire de... vampires. CRONOS, comme son nom le suggère, s'intéresse au temps, et plus précisément au fantasme d'immortalité. Car il s'agit d'une version très personnelle et inventive du mythe qui a inspiré pléthore de films d'horreur. On ne peut que saluer le talent de Guillermo Del Toro, qui remporta un franc succès avec ce premier film. En effet, il était risqué de mettre en jeu l'un des plus gros budgets de l'histoire du cinéma mexicain avec un film à mi-chemin entre la comédie et le film d'horreur, mélange subtil d'humour et de tendresse mâtiné d'horreur. Il en résulte un métrage qui n'est pas sans rappeler, par certains thèmes abordés, les films d'épouvante de la Hammer ou de la Universal, qui ont bercé la jeunesse du réalisateur. Il en a gardé un goût prononcé pour un cinéma horrifique où le facteur humain occupe une place prépondérante, assorti d'une affection particulière pour les "gentils monstres" d'antan. Ici, le monstre n'étant rien de plus qu'un papy-gâteau adorable aidé par sa petite-fille.
Si le scénario est vraiment inventif et intéressant, le grand intérêt de CRONOS réside aussi dans les particularités des personnages. Un embaumeur complètement loufoque qui utilise des méthodes bien à lui pour s'occuper des corps de ses "clients", un malabar, interprété par Ron Perlman, dont la carrière avait été lancée grâce à sa prestation dans LA GUERRE DU FEU, obsédé par la forme de son nez, et un industriel mégalomaniaque qui s'entoure des pots contenant ses différents organes malades. Des personnages décalés et outranciers que l'on ne croise bien souvent que dans les productions des pays latins. Les Etat-Unis n'ont pas les mêmes priorités en matière de cinéma, surtout lorsqu'il s'agit de faire une coûteuse super-production. On y fait souvent l'impasse sur les traits de caractère des personnages, pour se concentrer sur l'action. C'est tout le contraire des films latins, qui privilégient traditionnellement la dérision par le biais de héros souvent grand-guignolesques, citons pour exemple ceux de Alex de la Iglesia (ACCION MUTANTE, EL DIA DE LA BESTIA) ou encore de Pedro Almodovar. Voilà sûrement la raison pour laquelle MIMIC, son film suivant produit par les américains quelques années plus tard, est loin d'avoir la même richesse que CRONOS. Très bien réalisé, MIMIC n'a que peu de rapport avec son premier film si ce n'est un éventuel intérêt pour les insectes.
Un seul supplément est proposé sur ce DVD relativement bon marché : une bande-annonce présentée en version française. En dehors de cela, il y a tout de même de quoi être aux anges de se voir proposer un film tel que CRONOS pour une somme si modique, avec la possibilité de le regarder dans son format cinéma d'origine et en version originale sous-titrée. Un doublage français est également proposé, pour ceux qui rechigneraient à écouter le film avec les dialogues en espagnol et en anglais. Toujours en considérant le prix de ce disque, les défauts mineurs de l'image sont plus qu'excusables. A choisir entre un film obscur dans les rayonnages des supermarchés ou un CRONOS, il n'y a pas photo...