Tom Newcliffe, millionnaire excentrique et chasseur réputé, s'est fixé pour but d'ajouter un loup-garou à son impressionnant tableau de chasse. Il invite alors cinq personnes dans son luxueux manoir truffé de micros et de caméras parce qu'il est persuadé que l'un d'eux se transformera à la pleine lune…
Au milieu des années 1960, les deux américains Max J. Rosenberg et Milton Subotsky fondent la compagnie de production Amicus pour rivaliser avec l'horreur gothique rendue célèbre au travers de la Hammer Films. Alors que cette dernière se concentrait exclusivement sur les films d'épouvante, Amicus élargit son catalogue pour y inclure de la science-fiction (les deux adaptations cinématographique du DR WHO), de l'aventure fantastique (LE SIXIEME CONTINENT, CENTRE TERRE : SEPTIEME CONTINENT) ou encore des films d'espionnage (DANGER ROUTE). Le dernier film produit par Amicus fut LE CLUB DES MONSTRES, sorti en 1980 juste avant que la firme ne ferme boutique (tout comme la Hammer, d'ailleurs). Et bien que plusieurs acteurs se retrouvent dans des films «rivaux», comme Peter Cushing ou Christopher Lee, la Amicus ne rencontra jamais le même succès que leur concurrent plus gothique. Pourtant, la firme essayait le plus souvent d'insuffler un peu de modernité dans leurs films, comme c'est le cas pour THE BEAST MUST DIE mais le mélange ne prend toujours pas.
Curieux hybride de film de loup-garou classique et de Blaxploitation tant à la mode dans les années 1970, le métrage de Paul Annett est certes intéressant dans sa démarche mais souffre d'une crise identitaire et d'un manque de rythme constant. Mis à part l'introduction où nous assistons à une haletante chasse à l'homme façon Comte Zaroff mais en hélicoptère, le reste du film est presque ennuyeux et se cherche sans cesse. Pas assez baroque pour être considéré comme un véritable film d'épouvante gothique et pas assez Blaxploitation pour séduire les fans de ce genre, le film ne trouve jamais sa place et laisse le spectateur largement sur sa faim.
Le mélange de ces deux genres peut sembler bizarre mais ce film n'en constitue pas une première. Des films comme BLACULA ou ABBY ont vu le jour suite au succès de SHAFT au début des années 1970 et, à l'évidence, inspirés d'œuvres d'horreur marquantes (Dracula et L'EXORCISTE). Leurs réalisateurs respectifs étaient des habitués du genre Horreur ou Blaxploitation ce qui aura contribué aux réussites relatives de leurs films mais Paul Annett ne peut pas être considéré comme un expert en la matière. Réalisateur versatile, ce qui est un compliment, Annett a surtout œuvré pour la télévision sur des titres aussi divers que SHERLOCK HOLMES ou le soap anglais au succès mirifique de l'autre côté de la Manche, EASTENDERS. Il a également travaillé sur les anthologies télévisuelles que sont HISTOIRES SINGULIERES et BIZARRE, BIZARRE mais il s'est surtout concentré sur des séries à suspense.
Pourtant, le métrage ne manque pas de qualités sur le papier. L'idée de réunir plusieurs personnes pour découvrir le loup dans la bergerie inspirée des Dix Petits Nègres est attirante et les méthodes mises en œuvre par Newcliffe sont nombreuses et insolites (pour l'époque, du moins). Les invités essaient également de s'échapper mais se rendent vite compte que c'est peine perdue alors ils préférent abandonner laissant l'histoire se dérouler sans surprises ni aucun véritable suspense.
Dès les premières images, des cartons titres nous signalent que le film s'arrêtera vers la fin pour laisser au spectateur une chance de deviner par lui-même qui est le loup-garou. C'est une idée fort sympathique pour une soirée DVD entre amis – le problème c'est qu'arrivé à ces trente secondes d'arrêt, le spectateur n'a plus envie de jouer, d'autant plus que les indices sont franchement maigres et que l'on nous donne qu'un seul véritable suspect. Par ailleurs, l'identité de la bête est assez facile à deviner si l'on procède par élimination mais la fin réserve malgré tout une petite surprise et ne manque pas d'ironie. A force de focaliser sur un seul but, on perd le reste de vue et on en paie le prix fort ce qu'apprendra Newcliffe à ses dépens.
Parmi les invités, nous trouvons Peter Cushing dans le rôle d'un expert en lycanthropie nordique à l'accent improbable. Mais que la jaquette ne vous induise pas en erreur, c'est un rôle secondaire, tout au plus. Newcliffe est bien plus présent à l'écran, voire dans quasiment chaque plan. Le millionnaire est joué par Calvin Lockhart que les fans de Blaxploitation reconnaîtront aisément et qui a également participé à de nombreuses séries télévisées, tels STARSKY ET HUTCH ou DYNASTIE (…). Les films d'horreur ne sont pas nombreux sur son CV mais les plus perspicaces l'auront peut-être reconnu sous les traits du surréaliste King Willie de PREDATOR 2. Né en 1934, l'acteur est décédé en mars 2007 d'une crise cardiaque.
Autour de ses deux personnages, nous retrouvons deux acteurs ayant déjà œuvré dans l'un ou l'autre des genres. La femme de Newcliffe, Caroline, est jouée par Marlene Clark qui est apparue dans ATTENTION AU BLOB, BLACK MAMBA ou encore un hybride, GANJA & HESS, un film de vampires avec Duane Jones de LA NUIT DES MORTS VIVANTS. Anton Diffring qui incarne Pavel est un acteur allemand dont les traits l'ont souvent mené à interpréter d'inquiétants personnages (LE CIRQUE DES HORREURS...). On retrouve aussi Charles Gray, le maléfique Mocata des VIERGES DE SATAN, ou encore Michael Gambon devenu Dumbledore suite au décès de Richard Harris dans la série des HARRY POTTER. En ce qui concerne les autres invités, Ciaran Madden et Tom Chadbon, ces acteurs ont surtout oeuvré à la télévision anglaise.
En comparaison avec le personnage principal, les autres invités des festivités de la pleine lune demeurent un peu en retrait, non pas à cause de leurs interprétations individuelles mais surtout à cause d'un curieux manque d'interaction. Au départ, ils s'amusent de l'excentricité de leur hôte mais petit à petit, l'ennui et l'agacement s'installent et provoquent le repli de chacun sur lui-même. On aurait plutôt aimé voir de l'animosité entre eux, voire un brin de folie causée par une ambiance confinant à la paranoïa instaurée par Newcliffe dès le départ. Il y avait de quoi faire mais Annett semble s'être dit que cela aurait peut-être éloigné les fans de Blaxploitation.
Cette difficulté à mélanger les genres se confirme aussi durant les rares scènes de violence qui se déroulent parfois hors champ et dont les résultats sont, au mieux, plus que timides. Aucune scène gore, donc, hormis quelques blessures légères et un mur aux traces de sang peu convaincantes. Quant au loup-garou lui-même, il se limite à un grand chien noir qui n'est pas spécialement menaçant. Aucune transformation en vue non plus mais cela s'explique peut-être aussi par un budget que l'on devine limité et ayant surtout servi à louer les décors naturels magnifiques ou à installer ce qui devait être du matériel de surveillance électronique haut de gamme dans les années 1970.
A l'instar de L'IMPASSE AUX VIOLENCES sorti dans la même collection chez D'Vision, cette édition vous est présenté dans un strict minimum, sans aucun supplément. Le format image aux alentours de 1.75 manque de netteté et de contrastes en dépit de jolies couleurs mais cela peut être dû à la qualité du matériau original plus qu'à un quelconque défaut du DVD. Toutefois, l'absence du 16/9 apparaît comme très handicapant pour un DVD commercialisé en 2007. La piste sonore unique est en anglais aux sous-titres français amovibles et présentée dans son mono d'origine sans souffrir de défauts particuliers.
Malgré le manque de rythme et de véritable suspense, THE BEAST MUST DIE ne manque pas d'intérêt. Le film ne figure peut-être pas au panthéon des films de loup-garou inoubliables mais reste une petite curiosité à voir quand même.