Un film d'horreur batave, ça ne se refuse pas. Il est vrai que depuis l'avènement de Dick Maas et son ASCENCEUR, les Pays-Bas se sont fait discrets sur le terrain horrifique. DOOD EIND (qu'on peut traduire par «Sans issue») est allèchant avec ses image en format anamorphique 2.35:1, des effets spéciaux mécaniques et numériques mais aussi par le traitement qui lui est réservé lors de sa sortie en vidéo dans son pays d'origine avec un double DVD collector en boîtier métal. Pourtant, sorti sur 18 écrans en plein mois d'août 2006, le film sombra rapidement dans les tréfonds d'un box office en proie à SUPERMAN RETURNS et autre PIRATES DES CARAIBES 2. Et, de ce fait, avec ses 25.000 entrées en poche, il ne remboursera pas, et de loin, son budget initial d'un million d'euros.
En regardant les prémices du film, un frisson parcourt l'échine. Dieu du ciel, on dirait PROMENONS-NOUS DANS LES BOIS 2 ! Peut être même un BLAIR WITCH PROJECT hollandais... Ou encore un EVIL DEAD à la sauce Gouda ? Ainsi, un groupe d'amis d'enfance se rend en Ecosse afin de passer quelques vacances dans une forêt. Plus bateau, on ne peut pas faire. Mais Suite à l'attaque de deux chiens enragés, ils se retrouvent dans une grande maison abandonnée, agressés par de curieuses nervures noires incandescentes qui courent sur les murs et le plafond.
La première partie réussit le pari de nous mettre mal à l'aise. Une fois passée cette exposition des personnages, le spectateur subit de plein fouet l'attaque canine. Bien que la mise en scène ne donne pas dans la représentation graphique, elle demeure suffisamment efficace pour donner un aspect sauvage et violent aux deux séquences. L'arrivée brutale dans la maison et les premières manifestations surnaturelles étonnent vraiment. Ces espèces de nervures noires surmontées de lumière qui lézardent les murs ou le plafond s'avèrent inattendues et inquiétantes. Le spectateur se trouve irrémédiablement plongé dans une spirale de tension et d'incompréhension, tant le scénario se refuse à toute justification. Avec comme point culminant, cette attaque de panique de l'un des personnages qui en vient à contaminer l'ami qui venait le secourir. Impressionnant !
Malheureusement, dès que le scénario abandonne le terrain du mystère et se met en tête de nous proposer des révélations, le film tombe totalement à plat. Et, il ne retrouve jamais le rythme et le malaise des quarante premières minutes. Déjà, on prend peur lorsque l'on voit une idiote à cheveux longs arborer son statut de fantôme. Et on se dit que l'autre pays du cinéma se prend lui aussi à faire des émules de THE RING et autres THE GRUDGE avec ses actrices. Il est clair que DOOD EIND aime les dames.
Il en résulte donc fantômes, soupçons de sorcellerie, déambulations dans des couloirs… Aaah, le stigmate du film de couloirs. Typique de ce début de siècle. La caméra qui s'agite, les acteurs et actrices qui courent dans tous les sens… On l'a senti récemment dans THE ABANDONNED, c'est encore plus criant ici. Bien que DOOD EIND ait été fait avant, on peut remarquer certaines similitudes entre ces deux films. Ceci dit, du fait qu'ils se soient nourris de nombreux référents antérieurs, cela n'a rien d'étonnant. On notera également que l'argument qui sert de détonateur à toute cette histoire est la copie quasi-conforme de celui de l'épisode FAIR HAIRED CHILD de William Malone (première saison de la série MASTERS OF HORROR). A savoir la perte d'un enfant et l'appel à des forces surnaturelles afin de retrouver la progéniture perdue.
A partir de là, les personnages ne deviennent que pantins intégrés à un mécanisme narratif extrêmement banal et routinier. Si bien que toute velléité d'originalité se trouve rendu à un résultat proche du néant. DOOD EIND ressemble ainsi à n'importe quel produit horrifique américain de consommation courante. Une image léchée, un cadre soigné, des éclairages travaillés au service d'un récit s'inspirant d'une bonne demie douzaine de films existants et tentant désespérément de conclure de manière la moins incohérente possible. Le film demeure malgré tout assez nébuleux quant au pourquoi du comment et le final, se voulant mystérieux, ne fait qu'imiter PRINCE DES TENEBRES de John Carpenter. On a trouvé pire référence, mais le manque de logique propre à l'entreprise fait tomber la fin comme un cheveu sur la soupe et rend le tout indigeste, malgré une solide mise en bouche !
Heureusement, le DVD permet de découvrir DOOD EIND dans les meilleures conditions imaginables. Le télécinéma est de toute beauté, accentuant les contrastes de manière remarquable. Les scènes de nuit (nombreuses) gardent un côté irréel bienvenu. La qualité de la photographie et des éclairages est de suite mise en évidence. De ce fait, le choix d'un cadrage au format 2.35:1 prend toute son ampleur avec un transfert 16/9ème réussi, rendant un hommage judicieux aux images d'origine. Ce qui semble somme toute logique, la technique semblant avoir été préférée à une quelconque logique ou même à l'originalité scénaristique.
La piste sonore hollandaise en Dolby Digital 5.1, avec présence de sous-titres anglais, est particulièrement efficace et elle utilise de façon pertinente l'ensemble des canaux mis à sa disposition pour l'ensemble des bruitages. Elle contribue à l'effet de malaise ressenti dans la première partie du métrage. Encore plus avec les infra graves lors de la réunion au coin du feu dont la puissance monte graduellement et se joint au reste des effets sonores. Les heureux possesseurs de caissons de basse vont avoir une pièce tremblante de premier choix !
Le deuxième disque comprend tout le processus créatif autour du film. Trois fois hélas, ceux qui ne maîtrisent pas le néerlandais (ou le flamand) devront suivre seulement par l'image : aucun sous-titre n'étant disponible. Avec la possibilité de lancer l'ensemble des segments en même temps ou bien les consulter tous les cinq individuellement, nous suivons ainsi les étapes de création de DOOD EIND qu'il s'agisse de plans «pris sur le vif» lors du tournage (l'arrangement de l'accident du combi, l'attaque des chiens…) ou encore d'interviews des acteurs, réalisateur et concepteur des effets spéciaux. On y voit également la pose des maquillages et le traitement de l'image quant à l'ajout de trucages numérique mais aussi le réalisateur au travail avec les acteurs… Un tour de piste assez complet à propos du tournage et ce qu'il implique, sans pour autant que le support de ce Making of soit trop formaté.
On poursuit par un teaser d'une dizaine de minutes qui vendait DOOD EIND lors des marchés du film dès la fin de l'année 2005. Il reprend principalement les premières minutes du film, estampillé «Survival horror». On retrouve pêle mêle des teasers de 17 secondes centré sur chaque acteur et actrice, des spots TV ainsi que le film annonce officiel… L'un des teasers (le quatrième) s'inspire d'ailleurs clairement de THE RING (une image de neige télévisuelle d'où émerge un visage fantomatique...). Ce qui demeure curieux comme publicité, le film contenant certes un fantôme mais n'entretenant aucun rapport avec une quelconque télévision ! La section bonus s'achève avec les résultats d'un concours de courts-métrages organisé pour la circonstance. Le court métrage gagnant est proposé ici en intégralité. Puis, il est possible de découvrir une série de dix films annonces issus des autres participations.
On peut aisément apprécier la richesse de cette édition DVD. Il est cependant dommage qu'aucun sous-titrage ne soit proposé pour le deuxième DVD. Toutefois, c'est peut être normal dans le sens où cette édition est destiné au marché néerlandais. D'ailleurs, la spécificité hollandaise du film, c'est surtout la langue parlée. Le reste n'apporte rien de neuf au genre, comme si le film voulait à tout prix rentrer dans un moule international spécifique et oublier ses propres racines. Un film d'horreur qui soit compris par tous, avec des codes connus de tous et des effets attendus. A force de vouloir faire comme tout le monde, le film perd son identité propre.