En Afrique, Jill Young adopte un bébé gorille. Quelques années plus tard, la petite fille a grandi et est devenue une jeune femme alors que son bébé s'est transformé en un gigantesque gorille !
Déçu de ne pas réussir à monter un film épique et aérien, Merian C. Cooper change d'optique et décide de produire un nouveau film dans la veine de KING KONG. Avec sa maison de production, fondée avec John Ford, il va donc se lancer dans MR JOSEPH YOUNG OF AFRICA dont le titre deviendra finalement MIGHTY JOE YOUNG. Pour les effets spéciaux, il fait inévitablement appel à Willis O'Brien avec qu'il a déjà travaillé auparavant notamment sur KING KONG ou LES DERNIERS JOURS DE POMPEI. La réalisation sera bien évidemment donnée à Ernest B. Schoedsack et le scénario sera écrit par Ruth Rose en fonction des idées de Merian C. Cooper, du réalisateur et de Willis O'Brien.. Autant dire que la majeure partie de l'équipe de KING KONG est de retour. Devant la caméra, Robert Armstrong revient, lui aussi, dans le rôle relativement similaire d'un entrepreneur américain qui se sert du gorille à des fins mercantiles !
Pourtant, le film ne va pas se faire du jour au lendemain et plusieurs années vont s'écouler entre l'idée de départ et sa sortie sur les écrans. La RKO s'avère quelque peu réticente à débloquer l'argent nécessaire à la création du film. La production reste donc assez indécise de 1945 jusqu'à la fin de l'année 1947 où une enveloppe d'un million et demi de dollars est allouée au film. En réalité, il finira par coûter deux millions essentiellement en raison de la longue durée de production puisque le film ne sera terminé finalement qu'en 1949. Durant 14 mois, l'équipe d'animation va ainsi s'employer à donner vie à monsieur Joe, un gorille articulé miniature qui deviendra un imposant primate à l'écran. En plus d'animer le gorille, l'équipe va devoir aussi s'occuper de lions ainsi que d'autres effets… Tout au long de cette longue gestation, le scénario se verra modifié et quelques scènes vont disparaître. Par exemple, il était question d'un crash sur une île lors du retour du continent africain vers les Etats-Unis où Joe aurait sauvé les humains des lions que l'avion transportait. Autre modification, le grand final était à l'origine le combat entre Joe et un autre gorille agressif. Cette idée fut abandonnée au profit du sauvetage dans un orphelinat.
Ray Harryhausen, débutant plein d'enthousiasme et admiratif du travail accompli sur KING KONG, avait rencontré depuis longtemps Willis O'Brien avec qui il était resté en contact. Le spécialiste des effets spéciaux donne donc sa chance à Ray Harryhausen qui va devenir l'animateur principal du film. D'autres techniciens viendront prêter main forte tel que Buzz Gibson (LE FILS DE KONG…) ou Marcel Delgado (THE LOST WORLD…) mais ce qu'ils feront ne sera jamais utilisé. Les effets spéciaux seront ainsi conçus par Willis O'Brien et animé en majeure partie par Ray Harryhausen aidé pour quelques scènes par Pete Peterson. En matière d'animation, on fera aussi appel à Scott Whitaker seulement pour créer des pièces lancées par le public à Joe sous forme de dessin animé.
Pendant un temps, il est question de tourner le film en Technicolor. Mais, compte tenu du budget et de quelques tests tournés pour l'occasion, il sera finalement décidé de réaliser le film en noir et blanc. Mais sur les copies d'époque, la scène d'incendie de l'orphelinat sera teintée en rouge. Toutefois, par la suite, cette teinte sera souvent oubliée et le film diffusé intégralement en noir et blanc.
A sa sortie, le film rencontrera un succès critique mais le public ne sera pas au rendez-vous malgré l'Oscar qu'obtiendra Willis O'Brien pour les effets spéciaux. Cela n'empêche pas Merian C. Cooper et Sol Lesser, producteur des Tarzan à la RKO, d'annoncer un MIGHTY JOE YOUNG MEETS TARZAN avec, bien évidemment, Lex Barker dans le rôle de l'homme singe. Toutefois, le film ne se fera pas… Presque 50 ans plus tard, Disney revisitera MONSIEUR JOE en produisant un remake assez réussi sous le même titre original, MYGHTY JOE YOUNG, et qui deviendra MON AMI JOE en France.
Merian C. Cooper avait déjà essayé de renouer avec le succès sans précédent de KING KONG en produisant trop rapidement LE FILS DE KONG. Cette suite était handicapée par un humour malvenu et qui était certainement dicté par la probable envie de proposer un spectacle plus familial. C'est aussi dans ce registre que se place MONSIEUR JOE mais il se distingue grandement du FILS DE KONG grâce à un scénario intéressant et des effets spéciaux réussis. De plus, MONSIEUR JOE suit une trame quelque peu similaire à celle du KING KONG original. Le film propose ainsi une première partie exotique en Afrique avant le retour aux Etats-Unis où le gorille fini par s'échapper en provoquant la panique… Toutefois, l'histoire a été astucieusement réinventée !
Dans le KING KONG original, une bête sauvage était subjuguée par la beauté d'une jeune femme. Dans MONSIEUR JOE, la relation entre le gorille et la jeune femme n'a rien d'ambiguë. Ayant grandi ensemble, ils sont plutôt liés par un sentiment filial ou en tout cas amical. Cela donne tout de suite un côté fort sympathique à Joe qui devient l'animal fantasmé que tous les gamins aimeraient avoir. L'ouverture du film se fait d'ailleurs sur la mignonne adoption de Joe où tendresse et humour se marient merveilleusement bien. La suite du film confirme l'aspect fortement sentimental de l'entreprise lors de l'exploitation outrancière du sympathique gorille pour le seul amusement des riches clients antipathiques d'un night club civilisé. Et les attractions auxquelles participent Joe sont ainsi de plus en plus dégradantes jusqu'à ce que le gorille ne saccage tout sur son passage. Si ce passage est l'un des points culminants de MONSIEUR JOE, le film réussi à aligner tout du long de nombreux passages spectaculaires et divertissants.
Pour son premier long métrage à destination du cinéma, Ray Harryhausen émerveille par une maîtrise incroyable de l'animation image par image. Car en plus de donner du mouvement au gorille, il lui donne aussi une véritable personnalité qui en fait un personnage à part entière. Toute la magie des effets spéciaux est d'ailleurs là. Car ils s'avèrent réussi, même s'ils peuvent paraître imparfaits aujourd'hui, à partir du moment où on commence à les oublier. Le plus étonnant dans MONSIEUR JOE, c'est que Joe éclipse même les acteurs de chair et de sang. La prestation du gorille étant largement plus crédible que celle de Terry Moore qui incarne Jill Young. A ses côtés, on reconnaît donc Robert Armstrong comme nous l'avons déjà dit précédemment mais aussi Ben Johnson qui est avant tout connu pour avoir jouer un grand nombre de seconds rôles plus particulièrement dans le domaine du Western.
Avec cette édition de MIGHTY JOE YOUNG, l'éditeur a choisi de conserver le titre anglais. Curieux puisque les autres films de la collection sont bel et bien commercialisés sous leur titre français. Ce n'est donc pas MONSIEUR JOE qui se trouve sur la jaquette mais bel et bien MIGHTY JOE YOUNG.
Le DVD des Editions Montparnasse offre une belle image en plein cadre d'origine. Image plutôt nette et pourvue d'un bon contraste, le film se laisse voir avec grand plaisir. On notera que la copie du film contient bien la teinte rouge sur l'image lors de la séquence d'incendie de l'orphelinat comme prévue à l'origine. Mais, si on compare avec l'édition parue chez Warner aux Etats-Unis, il faut relativiser car les Américains dispose d'un DVD offrant une image bien meilleure avec un encodage parfait et une image beaucoup plus détaillée.
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Deux pistes sonores nous sont proposées. En premier, la version originale anglaise, en mono d'origine, sur laquelle on peut afficher un sous-titrage français ou non selon son désir. Toujours en mono d'origine, le disque contient aussi un doublage français que l'on ne trouvera sur aucun autre DVD. Les deux pistes sont de bonne qualité compte tenu de leur âge.
En matière de suppléments, la seule petite introduction de Serge Bromberg, courte et concise, ne fait carrément pas le poids face à ce que Warner a produit aux Etats-Unis. En effet, le DVD américain dispose de Ray Harryhausen dans un commentaire audio accompagné de Terry Moore et de Ken Ralston ainsi que d'interviews du magicien de l'animation dont une avec les frères Chiodo (KILLER KLOWNS FROM OUTER SPACE) pour enfin terminer sur la bande-annonce. Alors, bien sûr, il faut préciser que les suppléments du DVD américain ne sont pas sous-titrés et cela sera donc exploitable seulement à ceux qui comprennent parfaitement l'anglais.
Distribué dans sa collection de films de la RKO à petit prix, MIGHTY JOE YOUNG aura comme atout de poids son doublage français qui donnera la possibilité de la découverte à ce mignon spectacle auprès d'un jeune public. Car MONSIEUR JOE est un film particulièrement vivant. Le type même de métrage où bons sentiments ne riment pas avec mièvrerie et que l'on a envie de montrer à ses amis et à des enfants.