Spécialisée dans les troubles psychologiques, la clinique du Professeur Osterman traite de belles patientes dans un cadre somptueux et agréable. Mais le calme de l'endroit va changer lorsqu'un inconnu commence à traîner dans les couloirs pour éliminer certaines des résidentes !
Frappé par le succès de L'OISEAU AU PLUMAGE DE CRISTAL de Dario Argento, la production cinématographique transalpine découvre une nouvelle veine sanglante à exploiter. Les producteurs sautent sur l'occasion et passent commande auprès des réalisateurs disponibles. C'est dans ce contexte que Fernando Di Leo se retrouve derrière la caméra de LA BESTIA UCCIDE A SANGUE FREDDO. Cela se fera d'ailleurs très vite puisqu'il aurait fallu seulement douze jours pour emballer le tournage. A la vue du résultat final, quelle que puisse être la version du film que vous pourrez découvrir, le cinéaste n'avait que faire du mystère et il traite finalement ses meurtres par-dessus la jambe. Une constatation qui pourrait signer de suite un jugement négatif à l'encontre du film de Fernando Di Leo. Pourtant, ce drôle de giallo s'avère plus que consommable de par son traitement du genre très particulier !
Mais laissez vos préjugés au générique, LA CLINIQUE SANGLANTE n'est pas un giallo qui suit une trame conventionnelle. Sa trame, le film la perd parfois de vue pendant assez longtemps pour que le spectateur en fasse de même. Vous êtes prévenu. L'expérience est donc des plus curieuses tout comme ce préambule gothique où un mystérieux personnage déambule dans les couloirs de la clinique en quête de sa victime. Une très longue séquence qui s'étire démesurément mais ne vous faites pas terrasser par cette première impression ! La suite sera plus rythmée ou, en tout cas, plus attractive. L'ennui de cette séquence va donc s'oublier assez vite et on pourrait même dire que l'on va par la même occasion en oublier le tueur lui-même. En effet, le récit va s'orienter vers une étude des désirs réfrénés au sein de la clinique. Coup de chance, les patientes sont plutôt jolies : Margaret Lee, Rosalba Neri et Jane Garret. Trois femmes qui ont des affinités érotiques à même de multiplier les séquences suggestives. A force de voir Rosalba Neri faire tout son possible pour laisser libre cours à ses accès nymphomanes ou Jane Garret découvrir sa bisexualité en compagnie d'une infirmière (Monica Strebel), le film prend des airs de métrages érotiques sur lequel plane une ambiance étrange.
Dès lors, il n'est plus question de rigueur ou de scénario réglé comme une horloge suisse. Bien au contraire, l'intrigue est des plus invraisemblables tout comme les grossières ficelles utilisées. Tout bon giallo se doit ainsi de multiplier les coupables potentiels mais dans LA CLINIQUE SANGLANTE, on ne tentera finalement que de vous imposer un thérapeute très zélé auprès de sa patiente. Et quand ce même psychiatre n'est autre que Klaus Kinski, cela parait normal que tout puisses l'indiquer comme le tueur présumé y compris sa coupe de cheveux ! Mais peine perdue, cela s'avère bien trop gros pour qu'on puisse gober cette éventualité. D'ailleurs, Kinski, impérial, traverse la clinique avec une sobriété des grands jours. Mais alors qui peut bien être le tueur qui rôde entre deux scènes érotiques ? Ne cherchez pas trop, on n'arrête pas de vous le dire depuis le début, il ne s'agit pas d'un giallo conventionnel !
Peu crédible dans sa révélation finale, certains auront déjà vu arriver le truc une heure avant, le récit accumule les invraisemblances. Comme l'implication de la police un peu trop tardive pour être jugé honnête ou bien encore la démence qui s'empare inexplicablement de l'assassin et qui vient combler en quelques petites minutes le quota de morts violentes. Une façon de nous rappeler que nous sommes bien en train de regarder un film d'horreur ! Dans son ensemble, le film de Fernando Di Leo oscille donc entre un érotisme osé, pour l'époque, et un giallo bancal. Mais, au moins, il a le mérite de ne pas laisser indifférent et de proposer une mise en image très soignée !
Ce sera en tout cas le seul «véritable» giallo de Fernando Di Leo qui s'illustrera bien mieux dans le registre du polar à l'Italienne avec MILAN CALIBRE 9 ou encore en dirigeant Ursula Andress dans URSULA L'ANTIGANG.
En France, lorsque le film sort dans les salles, il n'est pas titré LA CLINIQUE SANGLANTE et encore moins une traduction littérale de son patronyme original qui aurait pu être LA BETE TUE DE SANG FROID. Son distributeur va plutôt opter pour un très surprenant LES INSATISFAITES POUPEES EROTIQUES DU DOCTEUR HITCHCOCK. Très surprenant car si la mention «d'insatisfaites poupées érotiques» est plutôt bien vue en regard des nanas en proie à leurs envies, on a bien du mal à saisir le rapport avec un docteur Hitchcock totalement absent du film. On ne peut même pas penser à une éventuelle affiliation avec L'EFFROYABLE SECRET DU DR. HICHCOCK ou LE SPECTRE DU PROFESSEUR HICHCOCK, tout deux de Riccardo Freda, puisqu'ils étaient sortis une dizaine d'années auparavant. Peut être étais-ce tout simplement une façon de rallier le film de Fernando Di Leo à la filmographie d'Alfred Hitchcock dont une histoire de tueur en série, FRENZY, fut distribuée en France plus ou moins à la même période. Le mystère demeure !
En tout cas, la version distribuée en France proposait un montage plus épicé que ceux distribués aux Etats-Unis et en Italie. On pouvait ainsi y découvrir quelques gros plans sur l'entrejambe de Rosalba Neri et Monica Strebel. Mais, si pour cette dernière il semble que ce soit bien l'actrice qui s'adonne à cette caresse solitaire, cela n'est pas certain en ce qui concerne Rosalba Neri. En fonction des sources, il semblerait qu'il s'agisse d'un plan ajouté par la suite avec une autre actrice. Pour d'autres, le fantasme marche à fond et il n'y a aucun doute, cette séquence salace en gros plan ne peut appartenir qu'à Rosalba Neri. A vous de trancher à la vision du film !
LES INSATISFAITES POUPEES EROTIQUES DU DOCTEUR HITCHCOCK, LA CLINIQUE SANGLANTE ou quel que soit le titre que vous lui prêté, a donc fait l'objet de plusieurs montages en fonction des pays où il fut exploité. Ce qui nous fait entrer dans une zone d'ombre dès lors que l'on aborde un DVD avec le doute de savoir s'il s'agit bien d'une version intégrale auquel nous allons pouvoir assister. Dans le cas de ce film de Fernando Di Leo, il faudra surtout reconnaître qu'il va être difficile de vous donner une réponse claire à ce sujet. Ce qui l'est, clair, c'est que le disque français a tout pour plaire puisqu'il ne propose pas un montage du film mais deux ! En effet, bien que cela ne soit pas indiqué, si vous choisissez la version française ou la version italienne, vous pourrez voir un montage différent. Par exemple, la séquence entre Rosalba Neri et le jardinier est bien plus longue sur la version française, les deux amants s'ébattent plus durablement sur le sol. Etrangement, dans la version italienne, la musique démarre et se coupe d'ailleurs brusquement à cet endroit. Pourtant, si la version italienne oublie ce passage, elle s'avère tout de même plus longue de plusieurs minutes !
Que ce soit la version française ou la version italienne, les deux arborent un transfert 16/9 de bonne facture. Il sera possible de noter ici ou là quelques petits défauts de pellicule mais, franchement, le boulot est très honorable. Il en va de même en ce qui concerne les deux pistes sonores qui restent en mono d'origine. On ne vous conseillera ni d'écouter l'une ou l'autre puisque vous ne verrez pas exactement le même montage en fonction de votre choix. En plus de proposer les deux montages, le disque contient aussi la psychédélique bande-annonce, des filmographies et une fiche technique. De plus, on retrouve aussi une petite galerie de photos qui est finalement peu attrayantes dans le sens où les clichés semblent avoir été pris directement dans le film. En matière de suppléments, les éditions américaine et italienne font mieux puisqu'elles proposent des interviews récentes mais aucune ne vous offrira deux montages, ni même d'option francophone (langue et sous-titrage). S'il y a un regret à formuler, c'est à l'encontre de ces horribles menus tout verts !
Des trois premiers DVD sortis par BL Films, cette CLINIQUE SANGLANTE est la plus belle réussite. Déjà l'éditeur ramène le souvenir de ce giallo déviant qui transpire la sensualité et le sexe. Mais il le fait en proposant deux versions du film ce qui est d'autant appréciable pour un film qui a été touché et retouché un peu partout dans le monde.