Header Critique : STREET TRASH

Critique du film et du DVD Zone 2
STREET TRASH 1987

 

James Muro, passionné par le cinéma d'épouvante, commence par aider Frank Henenlotter sur le tournage de FRÈRE DE SANG. Il intègre ensuite la School of Visual Arts de New York. Avec un camarade de classe, il réalise un court-métrage nommé STREET TRASH, qui enthousiasme un de ses professeurs : Roy Frumkes. Celui-ci lui propose d'en tourner une autre version, au format d'un long métrage. C'est aussi Frumkes qui se charge de rédiger le scénario et de réunir, avec beaucoup de difficulté, le financement nécessaire à cette aventure. Le casting se compose, à quelques exceptions près, de comédiens pour lesquels il s'agit d'une première expérience cinématographique. Si, pour la plupart d'entre eux, elle est aussi la dernière, d'autres ont réussi à s'imposer dans le domaine des seconds rôles et des petites productions, comme Tony Darrow (LES AFFRANCHIS...) ou James Lorinz (Jeffrey Franken dans FRANKENHOOKER de Henenlotter...).

Dans le quartier de Brooklyn, le tenancier d'un magasin de boissons alcoolisées découvre, cachée derrière une paroi de sa boutique, une caisse de flacons "Viper". Il vend ces bouteilles à des clochards qui vivent dans une casse de voitures, partiellement reconvertie en un véritable bidonville. Les premiers vagabonds à consommer le mystérieux breuvage en sont pour leurs frais : il s'agit d'un violent poison ayant pour effet secondaire de les liquéfier vivants !

Le point de départ de STREET TRASH dénote donc un argument surnaturel, ouvrant la voie à des effets gore qui ont fait sa célébrité. Pourtant, ces transformations délirantes et les bouteilles de "Viper" n'ont en fait qu'un rôle marginal dans le récit, se contentant d'être développé au début et à la fin du film. STREET TRASH se veut beaucoup plus la chronique du quotidien d'une communauté de clochards, vivant dans une casse de voiture, métamorphosée pour l'occasion en une véritable cour des miracles. Frumkes dit s'être inspiré du film DODESKADEN d'Akira Kurosawa, dans lequel est dépeinte en détails la vie de plusieurs habitants d'un bidonville japonais. Faut-il en déduire que STREET TRASH est porté par le même souffle humaniste et compatissant que l'œuvre du réalisateur des SEPT SAMOURAÏS ?

Pas vraiment ! A la sortie de son film, Muro avoue que ses influences se situent surtout du côté des premiers films provocateurs de John Waters et de l'esprit assez méchant de Russ Meyer. Il n'est pas étonnant, dès lors, que sa vision rappelle des classiques du cinéma indépendant gore des années 1960-70, pétris d'humour noir, comme 2000 MANIACS ou BLOODSUCKING FREAKS (titres vidéo). Multipliant les situations les plus scabreuses, STREET TRASH n'hésite pas à pousser l'excès jusqu'à des cimes anthologiques, comme lorsqu'une nymphomane ivre-morte est jetée en pâture à des clochards qui la violent à mort toute la nuit. Son corps est retrouvé au petit matin par le patron de la casse qui, avant de signaler ce cadavre à la police, le besogne encore un peu pour son compte ! On est alors beaucoup plus proche des comédies italiennes du style AFFREUX, SALES ET MÉCHANTS ou L'ARGENT DE LA VIEILLE, qui décrivent les misérables banlieues de Rome et leurs habitants sur un ton grinçant, que de DODESKADEN.

Toutefois, STREET TRASH, qui se revendique comme une comédie, s'avère assez peu drôle. Contrairement à des titres comme TOXIC ou aux oeuvres de Waters, ce titre ne distille pas un esprit particulièrement sympathique, et ne s'avère réellement amusant qu'exceptionnellement (les échanges entre le portier et Duran, ou entre Wendy et son employeur). De plus, l'absence totale de personnages un minimum attachants, ainsi que la manière dont le récit s'éparpille à travers des anecdotes sans avoir de ligne conductrice précise, aboutissent à un résultat d'ensemble très inégal.

Heureusement, STREET TRASH est aussi un film bénéficiant d'une mise en forme très soignée. Muro, qui a investi dans un équipement steadicam, utilise abondamment cette technique, et donne ainsi à ses plans une mobilité frénétique collant tout à fait à son propos. Cela peut parfois donner lieu à des effets un peu "gadgets", mais, la plupart du temps, Muro parvient à restituer le dynamisme d'une BD d'épouvante. Il place ainsi son titre dans la tradition des oeuvres antérieures dont les auteurs revendiquaient l'influence des comics horrifiques américains et / ou de la littérature Pulp : George Romero (qui, à travers ZOMBIE et CREEPSHOW, déclare vouloir rendre hommages aux EC Comics), Dan O'Bannon avec LE RETOUR DES MORTS-VIVANTS, Stuart Gordon avec RE-ANIMATOR, ou Sam Raimi avec EVIL DEAD. De même, les effets spéciaux gore sont tout à fait étonnants, qui font exploser des clochards dans des gerbes multicolores, là aussi très proches d'un esprit de bande-dessinée.

Film intransigeant dans sa volonté de pousser la provocation aussi loin que possible, STREET TRASH porte fort bien son nom ! Dommage, toutefois, que, faute d'un fil directeur solide, il paraisse trop souvent laborieux et hésitant. En France, STREET TRASH est accueilli avec enthousiasme par les amateurs de cinéma d'épouvante. Il repart d'Avoriaz avec un Prix et est distribué en salles par Metropolitan Film Export en juin 1987. Par la suite, Muro, qui tient, à la sortie de STREET TRASH, des propos véhéments contre le système hollywoodien, quitte New York et son cinéma indépendant pour devenir un des plus célèbres opérateur de Steadicam de la Mecque du cinéma.

En DVD, la seule édition véritablement intéressante a été distribuée par l'éditeur allemand Dragon (NTSC, multizone) : elle était pourtant loin d'être totalement satisfaisante (format de projection non respecté, pas d'options pour francophone). En France sort donc chez Aquarelle une nouvelle édition de ce titre.

DVD allemand
DVD français

Le film est montré dans son format de projection original (1.85), avec option 16/9. Au vu des conditions de tournage, ce nouveau télécinéma est une belle réussite, offrant une bonne luminosité et des contrastes réussis, notamment dans les scènes sombres qui passent très bien. Les couleurs sont parfois un peu fades, mais cela est sans doute un défaut d'origine.

Le doublage français, truculent à souhait, est proposé uniquement dans son mixage mono d'origine, réparti sur deux canaux. Le résultat est tout à fait acceptable. Mais c'est surtout sur la piste originale anglaise que le gros du travail a été accompli : on peut la consulter dans sa version mono d'origine (sur deux canaux), ou bien dans un nouveau mixage Dolby Digital 5.1, et même dans un mixage DTS 5.1 ! Ces deux dernières pistes sont assez réussies, puisqu'elles parviennent à donner une bonne impression d'homogénéité et propose un espacement et une dynamique améliorée, sans pour autant arriver à un résultat manquant de naturel. Toutefois, au vu du matériel d'origine, il n'est pas recommandé de trop pousser le volume de son amplificateur, les timbres sonnant un peu dur et pouvant provoquer une certaine lassitude auditive. Le sous-titrage français est amovible à volonté.

Ce DVD propose aussi une assez large section de bonus. Celle-ci s'ouvre par une courte présentation audio du film (3 minutes), qui revient sur la production du métrage et sur son contenu. Hélas, certains détails s'avèrent imprécis, voire en contradiction avec des informations fournies dans d'autres bonus du disque. Le supplément suivant nous propose une interview de Guillaume Castagné et Frédéric Lainé, deux jeunes maquilleurs ayant travaillé sur des films fantastiques français comme BLOODY MALLORY ou MALÉFIQUE. Ils commentent ainsi de façon intéressante certaines scènes à effets spéciaux de STREET TRASH.

Le supplément suivant consiste en une interview (9 minutes) du scénariste David Neiss et du réalisateur Michel Leray, notamment complices sur les courts-métrages français BLOODY CHRISTMAS et PAQUES MAN. Ils reviennent sur la sortie française de STREET TRASH et sur son accueil par le public français amateur de films d'épouvante.

Le gros morceau du DVD consiste en une interview de Roy Frumkes, producteur de STREET TRASH. Certes, ce supplément est présentée sous la forme, peu sexy, d'une interview téléphonique illustrée d'extraits du film, mais Frumkes s'avère un excellent client et revient avec de très nombreux détails sur la production et le tournage de STREET TRASH, ainsi que sur les personnes impliquées dans sa création, et ce durant plus d'une demi-heure. Une autre interview téléphonique est disponible : celle de l'actrice Nicole Potter (9 minutes), qui incarne la compagne du clochard Bronson. Ce supplément est un peu moins informatif que le précédent, mais il est tout de même intéressant d'avoir l'avis d'une actrice incarnant un des rôles féminins les plus ingrats de l'histoire du cinéma !

Bref, avec son nouveau télécinéma, ses nombreux suppléments et ses pistes sonores soignées, ce DVD français de STREET TRASH s'avère la meilleure édition actuellement disponible pour ce titre. Un DVD américain collector devrait sortir, avec notamment un "Making Of" extrêmement complet dirigé par Roy Frumkes ; mais cette édition présumée "ultime" n'est pas censée sortir rapidement et encore moins avec sous-titrage ou doublage français.

Rédacteur : Emmanuel Denis
Photo Emmanuel Denis
Un parcours de cinéphile ma foi bien classique pour le petit Manolito, des fonds de culottes usés dans les cinémas de l'ouest parisiens à s'émerveiller devant les classiques de son temps, les Indiana Jones, Tron, Le Dragon du lac de feu, Le Secret de la pyramide... et surtout les Star Wars ! Premier Ecran fantastique à neuf ans pour Le retour du Jedi, premier Mad Movies avec Maximum Overdrive en couverture à treize ans, les vidéo clubs de quartier, les enregistrements de Canal +... Et un enthousiasme et une passion pour le cinéma fantastique sous toutes ses formes, dans toute sa diversité.
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L'édition vidéo
STREET TRASH DVD Zone 2 (France)
Editeur
Aquarelle
Support
DVD (Double couche)
Origine
France (Zone 2)
Date de Sortie
Durée
1h37
Image
1.85 (16/9)
Audio
English DTS 5.1
English Dolby Digital 5.1
English Dolby Digital Mono
Francais Dolby Digital Mono
Sous-titrage
  • Aucun
  • Supplements
    • Présentation du film (3mn12)
    • Les effets spéciaux : interview de Guillaume Castagné et Frédéric Lainé (8mn56)
    • Un point de vue sur le film : Interview de David Neiss et Michel Leray (9mn14)
      • Interview audio
      • Roy Frumkes (33mn32)
      • Nicole Potter (6mn26)
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