Brian Trenchard-Smith commence sa carrière de réalisateur en Australie, dans les années 1970, à l'époque où, suite à des mesures fiscales fortement incitatives, la production cinématographique de ce pays était en pleine explosion. On le trouve ainsi aux commandes de L'HOMME DE HONK KONG, une co-production avec Honk Kong, justement, mettant en vedette Wang Yu. Pour le tandem de producteurs William Fayman - Antony I. Ginnane (déjà responsables de titres australiens tels que PATRICK, SOIF DE SANG - titre vidéo - et HARLEQUIN), il accepte de réaliser le film de science-fiction LES TRAQUÉS DE L'AN 2000. La production ne se fait toutefois pas sans heurts : elle se met en place alors que le gouvernement australien revoit à la baisse ses encouragements financiers à la création cinématographique. Par conséquent, deux semaines avant le début du tournage, Trenchard-Smith apprend que son budget est largement revu à la baisse. Le scénario doit être précipitamment remanié, et notamment amputé de toute une première partie qui devait décrire la société totalitaire servant de cadre à l'intrigue. Afin d'assurer à cette oeuvre une distribution mondiale, on réunit un casting de comédiens à la réputation internationale. Comme vedettes, on trouve donc l'américain Steve Railsback (Charles Manson dans le téléfilm HELTER SKELTER...), Olivia Hussey (Pour Zeffirelli, elle a été Juliette dans ROMÉO ET JULIETTE et Marie dans JÉSUS DE NAZARETH...), ou l'anglais Michael Craig (mari jaloux de Claudia Cardinale dans SANDRA de Visconti, narrateur de L'ÎLE MYSTERIEUSE de Cy Endfield...).
En 1995, sous un régime dictatorial, la police d'Etat capture les résistants et ceux qu'elle considère comme des déviants, afin de les envoyer dans des camps de rééducation extrêmement sévères. Les prisonniers y subissent des humiliations et des sévices inhumains, destinés à les briser. Pour l'agrément de plusieurs de ses amis sadiques, Thatcher, le directeur d'un tel établissement, décide d'organiser une chasse à l'homme dans la forêt entourant le camp. Le gibier est tout simplement composé par quelques prisonniers triés sur le volet : ceux qui survivront à cette partie de chasse seront libérés...
LES TRAQUÉS DE L'AN 2000 s'ouvre comme un film de science-fiction dénonçant les méfaits d'un régime totalitaire. Se déroulant dans un "futur proche" (pour l'époque), on y déploie une technologie peu futuriste. Et, en fait, une fois l'alibi idéologique rapidement expédié, on se tourne vers un récit d'aventures assez classique. D'une part, sont mises en scène les difficiles conditions de survie de prisonniers dans un monde carcéral extrêmement dur (dans la tradition du PONT DE LA RIVIÈRE KWAÏ, ou de L'ÎLE DU CAMP SANS RETOUR de Val Guest). D'autre part, la plus grande part du métrage est dédiée à une cruelle chasse à l'homme, s'inspirant sans vergogne de titres antérieurs comme LES CHASSES DU COMTE ZAROFF, A GAME OF DEATH, LA CHASSE SANGLANTE (titre vidéo) ou LA PROIE NUE.
Les séquences de cette chasse sont sans doute les plus réussies des TRAQUÉS DE L'AN 2000. Truffées de rebondissements sanglants et de scènes d'action, elles alignent sur un tempo infernal les inventions les plus délirantes, parmi lesquelles l'utilisation d'un catcheur mutant, semblant sortir de L'ILE DU DOCTEUR MOREAU, n'est pas la moins étonnante. De plus, malgré des moyens réduits, les scènes d'action ne donnent que rarement l'impression de radiner. Les paysages tropicaux du Queensland australien participent sans doute pour beaucoup à leur caractère ample et spectaculaire.
Pourtant, LES TRAQUÉS DE L'AN 2000 n'a pas que des qualités. Si le cinéma fantastique australien a acquis, au cours des années 1970, une image de marque mariant originalité et subtilité, le film de Trenchard-Smith semble se contenter d'être un pur produit d'exploitation, amusant, mais sans réelle personnalité. Mariant anticipation pessimiste et ultra-violence, il se contente de marcher sur les traces de MAD MAX, MAD MAX 2 et NEW YORK 1997, en traitant son sujet science-fictionnel à la va-vite et en alignant des personnages qui sont autant de clichés.
LES TRAQUÉS DE L'AN 2000, grâce à son rythme vivace et à certaines embardées d'un mauvais goût assez réjouissant, reste un divertissement efficace. Il sort en Australie, légèrement coupé par la censure locale, sous le titre TURKEY SHOOT, puis aux USA, dans une version encore moins complète, sous la dénomination plus futuriste de ESCAPE 2000. En France, il est aussi montré en salles, à partir du 8 juin 1983.
En DVD, le titre sort en automne 2003 aux USA, chez l'éditeur Anchor Bay (zone 1, NTSC). Le disque est fourni dans un superbe boîtier gris, agrémenté d'une jaquette bleu métallisé du plus bel effet. Le disque propose la version intégrale du film, élaborée à partir d'un internégatif d'époque, tiré avant que les censeurs ne s'intéressent aux TRAQUÉS DE L'AN 2000. Le générique porte encore son nom australien TURKEY SHOOT. L'image est tout à fait magnifique, avec une copie d'une propreté quasiment impeccable et un étalonnage des contrastes et des couleurs irréprochable. Quelques plans trahissent des soucis de compression (dans le camion, au début), mais ils sont tout à fait marginaux. C'est de l'excellent travail.
La bande-son est proposée dans des remix Dolby Digital 5.1 ou Dolby Stereo. Ils sont tout à fait réussis, sachant rester assez sages et ne souffrant pas de ruptures tonales déplaisantes. Toutefois, la prise de son d'origine étant un peu dure et étouffée, certains dialogue ne sont pas toujours évidents à suivre. De plus, peut-être aurait-on aussi aimé avoir la piste mono d'origine ?
Le DVD propose aussi une section de suppléments bien fournie. Brian Trenchard-Smith livre un nouveau commentaire audio, intéressant, révélant les nombreuses astuces nécessaires à la mise en scène d'un tel film avec un budget réduit. Dans un documentaire de 24 minutes ("Turkey shoot : blood and thunder memories"), trois acteurs (Lynda Stoner, Michael Craig et Roger Ward) reviennent, au cours d'interviews récentes, sur les souvenirs que leur a laissé ce tournage. Une interview de dix minutes de Brian Trenchard-Smith vient le compléter, dans lequel le réalisateur revient, notamment, sur la production tourmentée.
On peut accéder à deux génériques de début alternatifs (sous les titres ESCAPE 2000 et BLOOD CAMP THATCHER), quasi-identiques à celui de la copie du DVD. Enfin, on trouve une bande-annonce australienne d'époque, ainsi qu'une petite galerie d'images. Le scénario original du film est disponible en format PDF, en guise de bonus DVD-Rom. Enfin, le boîtier contient un feuillet relatant l'enquête minutieuse qui a permis à Anchor Bay de mettre la main sur la version complète du film.
En Australie (zone 4, PAL) et en Grande-Bretagne (zone 2, PAL), des DVD sont sortis parallèlement. Ils contiennent bien la même version intégrale des TRAQUÉS DE L'AN 2000, mais aucun des deux n'inclut la piste 5.1, ni l'intégralité des bonus du DVD américain, qui reste l'édition la plus complète de ce titre. Aucune de ces trois éditions ne propose un doublage ou un sous-titrage français, et ce film reste, hélas, réservé aux anglophones pour le moment.