Rendu fou par une opération expérimentale, un babouin sème la mort dans une école de médecine durant toute une nuit...
Vers le milieu des années 1980, apparaissent sur les écrans plusieurs oeuvres mettant en scène des singes utilisés comme cobayes dans des laboratoires de recherche. PROJET X (titre vidéo) de Jonathan Kaplan, relève plutôt de la science-fiction, puisque l'armée américaine y tentait d'apprendre à un singe comment piloter un avion. Dans INCIDENT DE PARCOURS de George Romero, le drame rencontre le fantastique : un tétraplégique se fait aider dans sa vie quotidienne par une petite guenon, qui a auparavant été utilisée dans un programme de recherches scientifiques. Enfin, dans LINK, de l'australien Richard Franklin, Elisabeth Shue est une apprentie-zoologue harcelée par un orang-outang agressif.
Chronologiquement, SHAKMA arrive bon dernier, puisqu'il ne sort qu'en 1990. Tourné entièrement en Floride, son réalisateur principal est Hugh Parks, pour qui il s'agit du premier travail à ce poste, et qui est, par ailleurs, son propre producteur. Le générique crédite Tom Logan en tant que co-réalisateur. Auparavant acteur, il se consacrera ensuite à la mise en scène pour la télévision. Le rôle principal du film est confié à Christopher Atkins, révélé en 1981 par LE LAGON BLEU et, par ailleurs, interprète du rôle-titre dans la production Corman DRACULA RISING (titre vidéo). Il est entouré de comédiens globalement de second rang, dont la plupart n'a pratiquement rien fait d'autre au cinéma. En guise de guest-star, Roddy McDowall (LA PLANETE DES SINGES) est malicieusement invité à tenir un petit rôle.
Dans une école de médecine, une opération expérimentale est tentée sur le cerveau du babouin Shakma. A son réveil, l'animal se montre particulièrement agressif, et le professeur Sorenson se résigne à le faire piquer. Malheureusement, l'élève chargé de mettre à mort ce cobaye s'embrouille dans sa manœuvre : il ne fait qu'endormir Shakma... Justement, c'est cette nuit-là que le professeur et ses élèves ont décidé d'organiser une grande partie de jeu de rôles grandeur nature dans les locaux de l'école. Sorenson est le "maître du jeu", et il reste en contact avec ses joueurs à l'aide d'un réseau de talkie-walkie. Shakma sort de sa léthargie chimique et commence à semer la mort parmi les participants...
Pariant sur une formule archi-simple afin de dégager le maximum d'efficacité, SHAKMA limite son action à une unité de temps (une nuit) et une unité de lieu (un immeuble) rigoureuses. A partir du commencement du jeu, les évènements progressent de façon linéaire, en développant un suspens pour le moins traditionnel. D'abord inconscientes de la menace représentée par SHAKMA, ses premières victimes sont attaquées par surprise. Une fois le danger identifié, les survivants vont devoir s'organiser pour échapper aux crocs du babouin, puis, enfin, l'affronter. Sur ce schéma classique, oscillant entre un ALIEN et un VENDREDI 13, une vague histoire de jeu de rôles, un peu débile, a été plaquée, ainsi que des personnages dénués d'épaisseur, voire franchement crétins. Les péripéties se succèdent de façon un peu répétitive, tandis que quelques invraisemblances, dures à avaler, émaillent certains rebondissements.
Quoi qu'il en soit, SHAKMA se laisse agréablement regarder. Malgré des moyens financiers réduits, il élabore une progression du suspens et de la tension suffisamment solide pour que l'ennui ne puisse jamais s'installer longtemps. Proposant quelques séquences horrifiques et sanglantes efficaces (l'opération chirurgicale, le meurtre dans les toilettes...), le film va s'ouvrir sur un ton plutôt badin, pour progresser vers un affrontement de plus en plus tendu et éprouvant, jusqu'à un final cauchemardesque et sans concession.
La star de SHAKMA, c'est indéniablement le babouin-comédien Typhoon. Sa frénésie destructrice, lorsqu'il s'attaque à une porte verrouillée ou se met en tête de démolir le contenu d'un laboratoire, éclate spectaculairement à l'écran, tout comme quand il court et bondit, avec une rapidité et une agilité stupéfiantes, sur ses victimes, totalement impuissantes face à cette boule d'agressivité. Outre, ce singe, l'équipe du film a employé, pour certains plans qui auraient mis en danger la santé de l'animal, des modèles mécaniques, la plupart du temps indécelables.
Film à petit budget, interprété par des acteurs dont le jeu frise parfois l'amateurisme, SHAKMA se défend néanmoins honnêtement. S'il n'a pas vocation à devenir un classique du genre, il est un agréable divertissement horrifique, très correctement réalisé.
SHAKMA (originellement distribué directement en vidéo dans notre pays) est arrivé en DVD français en tant que troisième livraison de la parution kiosque "DVD Gore". Puis, il a été vendu dans un circuit plus traditionnel. Ce titre n'a, semble-t-il, jamais été proposé en DVD auparavant, sauf en Allemagne.
L'image de ce DVD (1.33, format d'origine semble-t-il...) est globalement passable, souffrant d'une définition un peu floue, ainsi que de contrastes et de couleurs fades. Il se laisse néanmoins regarder.
La bande-son est proposée en français et en anglais. La version originale est supposée avoir été enregistrée en ultra-stereo, mais j'ai bien l'impression que la piste anglophone présentée ici est en mono, tout comme la française. Ces pistes souffrent de petits défauts (sons forts parfois criards ; léger bruit de fond sur la version française ; un peu de post-écho sur la piste anglaise), mais restituent toujours les dialogues avec une grande clarté. Par contre, on note un "oubli" de taille : il n'y a pas de sous-titrage français pour la VO !
En bonus, on trouve quelques bio-filmographies (soignées) des acteurs Roddy McDowall, Christopher Atkins, Amanda Wyss et Ari Meyers. Toutefois, le supplément le plus "attractif" de ce DVD reste la présence du film THE TERROR, réalisé, entre autres, par Roger Corman, et interprété par Boris Karloff et Jack Nicholson.
D'une édition à petit budget de ce petit film, il ne fallait pas s'attendre à des miracles, et ce DVD remplit donc correctement son contrat. Toutefois, l'absence du sous-titrage sur la version originale est anormale.