Deux astronautes échouent sur une planète après que leur mission spatiale se soit mal déroulée. Malheureusement, ils s'aperçoivent qu'ils ont été projetés dans le futur et que la race dominante n'est plus l'homme mais le singe !
Le producteur de LA PLANETE DES SINGES, Arthur P. Jacobs, pense déjà à l'éventualité de transposer le monde inventé par Pierre Boulle à la télévision sous la forme d'une série dès la sortie de LA CONQUETE DE LA PLANETE DES SINGES. Il décide finalement de donner une autre suite pour le cinéma avec le cinquième et plus mauvais film de la saga : LA BATAILLE DE LA PLANETE DES SINGES. Suite à des résultats peu satisfaisants, il apparaît évident au producteur que l'exploitation de la franchise ne peut plus se faire que par le biais du petit écran mais il décéde avant de pouvoir y arriver.
En 1973, la chaîne de télévision américaine CBS paye une énorme somme d'argent, pour l'époque, en vue de diffuser le premier film, LA PLANETE DES SINGES. Le taux d'audience est tel que CBS relance l'idée d'une série télévisée. La production fait appel au scénariste Art Wallace qui avait travaillé entre autre avec Dan Curtis sur le feuilleton fleuve DARK SHADOWS. Le scénariste se met au travail avec Anthony Wilson et il leur apparaît clair que la seule façon d'adapter le concept n'est pas de donner une suite au cinquième film mais bel et bien de reproduire un point de départ proche de celui de LA PLANETE DES SINGES. Deux nouveaux astronautes s'écrasent donc à la surface de la planète et seront pourchassés d'épisode en épisode essentiellement par les gorilles, menés par leur chef, un denommé Urko.
En plus de deux nouveaux astronautes, on fait une nouvelle fois appel à Roddy McDowall pour incarner un chimpanzé. La production offre un gros cachet à l'acteur qui avait interprété Cornelius puis César dans quatre des cinq films, pour qu'il accepte de repasser une nouvelle fois sous le maquillage d'un chimpanzé. Roddy McDowall ne se fait pas prier et rejoint donc le casting de la série aux côtés des «humains» Ron Harper et James Naughton. A leurs trousses, la série ne place que deux véritables personnages récurrents qui réapparaissent dans la plupart des épisodes. Succédant à Maurice Evans, Booth Colman se glisse dans la peau de l'orang-outan Zaïus, grand chef du Conseil, bien qu'il ne soit pas clairement établi qu'il s'agisse du même personnage que dans LA PLANETE DES SINGES et LE SECRET DE LA PLANETE DES SINGES, il lui ressemble énormément ! Enfin, Mark Lenard, acteur essentiellement connu pour avoir interprété le père de Spock dans STAR TREK, incarne Urko, le chef des forces armées et donc des gorilles.
Une série LA PLANETE DES SINGES nécessite forcément de transformer une part des acteurs en singes. C'est le maquilleur Dan Striepeke qui se charge de ce travail. Et il a déjà une certaine expérience en ce qui concerne la transformation d'acteurs en hybride d'animaux puisqu'il a assisté John Chambers sur de nombreux films dont les quatre premiers PLANETE DES SINGES, L'ILE DU DOCTEUR MOREAU ou le déjà bien moins renommé SSSNAKE : LE COBRA. Pour les acteurs, ce fut comme souvent dans de pareils cas une véritable torture. Celui qui en a le plus souffert fut Roddy McDowall qui était transformé chaque jour en chimpanzé au prix de longues heures de travail. Mais étant donné qu'il apparaissait dans une grande majorité des scènes, après de nombreuses journées de tournage, sa peau eut du mal à encaisser de porter un tel maquillage et il dut prendre des vacances forcées de temps à autre s'il ne voulait pas perdre définitivement son véritable visage ! Ce ne fut pas non plus une partie de plaisir pour les gorilles qui se mirent à tomber comme des mouches sous leurs étouffants costumes et masques dès que la chaleur de l'été se mit à grimper considérablement pendant le tournage !
A priori, la série télévisée mettait tout de son côté pour devenir un succès ! Et pourtant, c'est carrément l'inverse qui se produisit. Après plusieurs semaines de diffusion, les téléspectateurs ne suivirent pas et préfèrèrent d'autres feuilletons sur d'autres chaînes tels que L'HOMME QUI VALAIT TROIS MILLARDS diffusé à peu près à la même heure sur la chaîne ABC. Il fut donc décidé assez vite d'arrêter les frais et de stopper la série après que treize épisodes sur les quatorze déjà mis en boîte aient été diffusés. Les Américains auront d'ailleurs attendu très longtemps avant de pouvoir découvrir l'épisode «Libération» alors qu'il fut montré dans les autres pays dès les premières diffusions !
Mais à vrai dire, la série souffrait dès le départ de problèmes assez flagrants. A commencer par quelques incohérences avec les films qui n'ont jamais trouvé d'explication ni de réponse dans les quatorze épisodes. Alors que dans LA PLANETE DES SINGES et LE SECRET DE LA PLANETE DES SINGES, les humains sont muets et retournés à l'état sauvage, la série nous présente une humanité qui vit dans une forme d'esclavage alors qu'elle s'exprime tout à fait normalement. Cela pourrait bien entendu s'expliquer par une version moins «rose» du futur annoncé dans LA BATAILLE DE LA PLANETE DES SINGES. La série se plaçant plusieurs centaines d'années avant l'arrivée de Charlton Heston, il est donc à supposer que l'avenir de l'homme déclinera encore plus par la suite. Pourquoi pas mais les deux astronautes ne devraient pas être surpris par une planète peuplée de singes puisqu'ils sont partis dans l'espace après les événements dépeints dans LES EVADES DE LA PLANETE DES SINGES.
La série, elle-même, développe ses propres incohérences. Par exemple, on apprend dans un épisode que seuls les singes ont le droit de posséder une ferme alors que dans celui qui suit juste après il apparaît évident que des humains en exploitent de leur côté. De petites incohérences de ce type laisseraient à penser qu'il n'y a pas eu un suivi très sérieux dans l'écriture des différents épisodes. Surtout qu'il n'y a aucun développement particulier autre que la fuite des deux astronautes et de leur nouveau compagnon. Le premier et second épisode laissent à penser qu'un disque pourrait amener des développements futurs… «Le Testament» pourrait lancer les personnages dans la recherche des autres refuges de la connaissance humaine mais cela s'oublie dès les épisodes suivants ! Une seule fois, on retrouvera un personnage, Barlow, qui apparaît dans «Les Gladiateurs» puis plus tard alors qu'il a été muté dans «L'Etalon». Avec le disque du vaisseau, il s'agit bien des deux rares fois ou il est question d'une continuité !
Pris indépendamment, chacun des épisodes est plutôt réussi dans son genre. Dans leur intégralité, il existe un manque d'enjeu ou de véritable but pour les héros qui semblent tourner en rond autour de «Central City». Car plus ils s'en éloignent, normal pour une fuite, et plus ils s'en rapprochent donnant l'impression au gré des épisodes de se téléporter d'une région à une autre. En réalité, c'est assez typique des séries télévisées qui n'ont pas encore pris en considération à l'époque la notion de suivi. La série impose donc un concept simple sur lequel les scénaristes vont pouvoir chaque semaine broder une histoire différente sur les thèmes plus ou moins invariables que sont l'esclavage et le racisme. Certains épisodes étant plus marqués que d'autre par ces thèmes comme dans «Déception» où l'on voit carrément un décalque singe du Ku Klux Klan ainsi qu'une idylle interraciale mais basée sur un malentendu. En tout cas, certains épisodes recèlent des séquences inattendues comme la violence d'une exécution sommaire dans "Le Tyran" ou un enfant humain dénué de moralité dans "Le Testament".
D'un point de vue scénaristique, la série est plutôt bancale mais on peut difficilement lui enlever ses qualités. Dans leur ensemble, les personnages, essentiellement les singes, sont très bien retranscrits. Les orang-outangs assez peu présents dans la série, sont toujours de vieux érudits, les chimpanzés des singes plus éclairés alors que les gorilles restent des brutes épaisses et stupides. La série réussit à ne pas sombrer dans le ridicule à ce niveau-là, même lors de passages plutôt comiques tels que celui où Urko, toujours aussi subtil, fait un résumé d'une technique bien à lui du lavage de cerveau. Bien entendu, les maquillages sont le plus souvent très réussis pour les personnages principaux et seules les bouches peu expressives trahissent un côté un peu factice. Hormis cela, l'illusion est totale et, comme dans les films, on oublie assez vite le fait qu'il puisse y avoir des acteurs sous les maquillages ! Les costumes quant à eux ont été repris dans les films et si les décors sont le plus souvent réduits au strict minimum en dehors d'un plan de «Central City» issu de l'un des deux premiers films, cela ne choque pas du tout. Enfin, de nombreuses guest-star viennent en fonction des épisodes donner un peu de leur talent à la série (John Ireland, William Smith, Marc Singer, Royal Dano, Michael Conrad, Sondra Locke, David Naughton en singe...)
Cela peut paraître très étrange mais bien que la série soit bourrée de défauts, elle reste très attractive à condition bien sur de ne pas enchaîner tous les épisodes dans une période de temps trop courte. Dans ce dernier cas, les grosses ficelles redondantes des scénarios risquent de vous sauter au visage ! Ainsi, Galen a toujours une connaissance pour tirer d'affaire ses amis ou alors certaines histoires se répètent avec seulement quelques petites modifications.
Après son arrêt, les développements télévisuels auraient pu s'arrêter à tout jamais. Et pourtant, une autre série fut mise en chantier mais cette fois sous la forme d'un dessin animé. Largement moins connue que celle mettant en scène Roddy McDowall, cette petite série se rapprochait bien plus par certains côtés du livre de Pierre Boulle alors qu'elle reprenait des personnages des premiers films mais aussi de la série mettant en scène des acteurs. Faute d'une audience suffisante, elle fut arrêtée assez vite pour les mêmes raisons que la première série…
Les quatorze épisodes de la série sont répartis sur quatre disques mais la Fox n'aura pas jugé bon de proposer de véritable supplément. Il faudra donc se contenter de la vision des épisodes et de deux bandes-annonces. Ou pour être tout à fait exact, il s'agit plutôt de deux publicités, l'une vantant les mérites de l'édition DVD du remake de Tim Burton et l'autre du coffret reprenant les cinq films originaux.
Tourné en plein cadre comme tout ce qui pouvait se faire à la télévision dans les années 70, l'image des épisodes pourra surprendre. En effet, il se passe rarement plus de quelques secondes avant de voir des nuées de défauts de pellicule. Griffures et tâches sont donc très présentes sur les quatorze histoires du coffret. Il faut aussi noter que la qualité fluctue d'un épisode à l'autre voire d'une séquence à une autre (définition variable, plans plus flous...). Il n'y a pourtant rien de dramatique surtout si l'on considère que les éléments originaux de la série ont dû dormir de longues années sans que personne ne s'en soucie avant d'en réaliser un DVD.
Les pistes sonores sont en mono d'origine. Elles remplissent leur office sans faillir mais le rendu est le plus souvent très plat. L'intégration des voix dans la version originale est assez naturelle alors qu'elles sont bien plus mises en avant dans la version française. Le doublage n'a pas été changé et est le même que celui découvert à l'époque des diffusions télévisées en France et certainement au Canada (Burke devient Bruce).
Malgré ses incohérences, la série est certainement bien meilleure que le dernier film produit pour le cinéma à l'époque (LA BATAILLE DE LA PLANETE DES SINGES). Les attentes ne sont pas les mêmes et surtout les histoires n'essayent pas de faire plus que ce que peut leur offrir leur budget. Les quatre DVD permettent de revoir de façon agréable cette série télévisée qui viendra se placer naturellement à côté du coffret de cinq films en attendant, peut être un jour, une sortie du dessin animé !