Bruno, jeune compositeur de musiques de film, vit dans une grande villa, aux alentours de laquelle des disparitions mystérieuses vont avoir lieu...
Lamberto Bava, fils de Mario Bava, commence, dès le milieu des années 1960, par assister son fameux géniteur dans ses divers projets. Puis, il s'émancipe en devenant un collaborateur régulier de Ruggero Deodato (notamment pour LE DERNIER MONDE CANNIBALE et CANNIBAL HOLOCAUST) et de Dario Argento (INFERNO et TÉNÈBRES). Il réalise son premier film, le thriller BAISER MACABRE, en 1980. Malgré un accueil critique correct, le public ne suit pas, et Lamberto doit attendre 1983 pour tourner son film suivant : LA MAISON DE LA TERREUR, dont le scénario est signé par les infatigables Elisa Briganti et Dardano Sacchetti. Destiné à être diffusé à la télévision, sous la forme de quatre épisodes représentant chacun 27 minutes de métrage (soit 108 minutes en tout), il est tourné en 16mm dans la villa du producteur, avec un seul objectif à la disposition de l'équipe, les autres ayant du être empruntés à des amis du chef-opérateur ! Le casting met en scène la jeune garde du bis italien de l'époque : Andrea Occhipinti (L'ÉVENTREUR DE NEW YORK et CONQUEST de Fulci...), Valeria Cavalli (2072, LES MERCENAIRES DU FUTUR encore de Fulci...), Lara Naszinsky (AENIGMA, toujours de Fulci !...)...
On y remarque aussi Giovanni Frezza, enfant-acteur du fantastique italien, particulièrement connu pour avoir été harcelé par le cruel Freudstein dans LA MAISON PRÈS DU CIMETIÈRE. Quant à Michele Soavi, qui tint régulièrement des petits rôles, il incarne ici Tony, et fait office d'assistant réalisateur ; il était appelé à devenir un des plus grands réalisateurs de l'épouvante italienne, malgré sa trop faible productivité. Finalement, LA MAISON DE LA TERREUR sortira dans les salles transalpines, gonflé en 35mm, dans un montage de 96 minutes. En France, il est d'abord distribué en Province, puis en vidéo. Il lui faudra attendre 1987 pour avoir le droit à une "exclusivité parisienne" la semaine de Noël au Brady, célèbre cinéma permanent des Grands Boulevards, alors spécialisé dans le fantastique. Une semaine avant, son distributeur, les Films Jacques Leitienne, venait de sortir sur Paris un autre giallo de Lamberto Bava : MIDNIGHT HORROR, en fait un téléfilm.
Bruno est un jeune compositeur, travaillant sur la musique d'un film d'épouvante réalisé par Sandra. Il enregistre dans une villa qu'il loue à un dénommé Tony. La nuit de son installation dans la demeure, le musicien reçoit la visite de Katia, une jeune voisine entreprenante. Pourtant, elle disparaît rapidement sans laisser de trace. Finalement Bruno est rejoint pas sa compagne Julia. Les évènements mystérieux vont se multiplier, tandis qu'une autre voisine disparaît. En fait, les jeunes femmes ont été victimes d'un mystérieux assassin, qui pourrait bien avoir un rapport avec le film sur lequel travaille Bruno...
Thriller pour le moins classique, LA MAISON DE LA TERREUR se caractérise par de nombreux emprunts à des oeuvres antérieures. Le scénario semble particulièrement s'être inspiré de deux films de De Palma : PULSIONS et surtout BLOW OUT (le faux prologue, le jeune homme qui travaille sur un film d'horreur, l'indice capturé accidentellement sur un enregistrement sonore...). Quant à l'idée de limiter l'action quasiment au seul décor d'une maison, elle était à la fois imposée par des moyens financiers restreints et réminiscente de classiques du thriller et de l'horreur, comme DEUX MAINS LA NUIT, LA VIERGE DE NUREMBERG ou LA MAISON PRÈS DU CIMETIÈRE. Quoi qu'il en soit, le récit policier fonctionne très correctement, parvenant à entretenir un certain suspens en jouant assez habilement sur les soupçons du spectateur. La première heure nous tient ainsi remarquablement en haleine.
D'autres emprunts se retrouvent dans le style de certaines scènes. La musique électronique moderne et le décor de la villa contemporaine renvoient à TÉNÈBRES, tout comme la première scène de meurtre, très réminiscente de celui de la fille du directeur de l'hôtel dans le film d'Argento. Hélas, les moyens ne sont pas au rendez-vous, et les éclairages bien moins soignés, ainsi que les architectures, nettement plus quelconques, entraînent un indéniable écart qualitatif en défaveur de l'œuvre de Lamberto Bava. LA MAISON DE LA TERREUR s'ouvre sur un hommage amusant à LA MAISON PRÈS DU CIMETIÈRE, tandis qu'un passage du premier meurtre (la victime traînée dans l'escalier, dont la tête se cogne contre les marches) y fait encore référence. Dans le domaine de l'horreur, le crime dans la salle de bain, très bien amené, soignant le détail macabre et sadique (le couteau planté dans la main...), est, sans doute, le clou de cette oeuvre de Bava fils. Celui-ci confessera avoir poussé, ici, le gore particulièrement loin, car on lui avait reproché d'avoir été trop sage sur BAISER MACABRE. Néanmoins, il avoua aussi se sentir assez mal à l'aise avec les crimes sadiques et misogynes du giallo, genre qu'il dit n'avoir jamais vraiment aimé en tant que réalisateur.
LA MAISON DE LA TERREUR souffre de défauts évidents. La seconde moitié du métrage devient assez laborieuse, et Lamberto Bava semble souvent hésiter entre la comédie et l'épouvante. Si les scènes de meurtre ne prêtent pas à sourire, la manière dont certains moments de suspens sont désamorcés (la voisine qui surgit du placard...) démontre une approche ironique de l'angoisse au cinéma, tout en frustrant un peu le spectateur. Au niveau technique, le film est soigné, comme le soulignent de nombreux mouvements de caméras. Mais Lamberto Bava semble manquer d'idées vraiment personnelles et paraît se contenter de reprendre, en moins fulgurants, les acquis de ses illustres prédécesseurs.
Somme toute, LA MAISON DE LA TERREUR est un agréable divertissement horrifique. Limité par un budget serré, il se contente de resservir, avec modestie et ironie, des idées déjà vues ailleurs. L'affaire étant techniquement assez rondement menée, on peut se laisser tenter par ce giallo sympathique, sans autre ambition que de proposer un suspense horrifique "qui fonctionne".
EC Entertainment propose ici la version complète du film (les 108 minutes de la version télévisée) dans un transfert passable, bien qu'en 16/9. Le grain naturel de la pellicule est rendu de façon peu naturelle par la compression, qui semble créer un voile un peu désagréable sur l'image. Sinon, la copie est en assez bon état et la gestion des lumières et des couleurs est globalement acceptable.
Signalons que le minutage du film déconne complètement ; à chaque changement de chapitres, le timecode s'emballe, perdant quatre minutes par ci, en récupérant deux par là !
La bande-son n'est disponible qu'en anglais, sans aucun sous-titre. Techniquement, cette piste mono sonne assez dur, avec un peu de souffle. Vu les moyens limités de cette oeuvre, cela reste correct. Néanmoins, lorsqu'on sait que ce doublage contient des erreurs monstrueuses de traduction, que le casting est italophone, et que Lamberto Bava n'était pas satisfait par les post-synchronisations anglophones des films de son pays, on aurait tout de même aimé avoir accès à une bande-son italienne...
En bonus, cette édition "Collector" propose une bande-annonce anglophone et une abondante galerie de photographies et de matériel promotionnel. L'insert fourni avec le DVD contient, lui, une courte biographie de Lamberto Bava, ainsi que sa filmographie. Parmi les divers DVD de ce titre, seul le DVD américain d'Anchor Bay (zone 1, NTSC et 16/9), accompagné d'une bande-annonce, de biographies et d'une featurette d'une dizaine de minutes, semble rentrer en concurrence avec cette édition.
EC entertainment propose donc une édition correcte de LA MAISON DE LA TERREUR, en tout cas la plus intéressante actuellement disponible en Zone 2 (Pal et aucun problème de zone), pour ce giallo sans prétention ni complexe.