Nora, une jeune américaine, se rend à Rome. Dès
la première nuit, elle est le témoin involontaire d'un
meurtre. La police la retrouve inconsciente et a du mal à avaler
son histoire puisqu'il n'y a plus aucune trace de l'assassinat. Est-ce
que tout cela n'est pas le fruit d'une nuit un peu trop dure psycholo-giquement ?
Dès le début du film, l'intrigue nous explique qu'il ne faut pas se fier aux apparences. Le personnage de Nora est une lectrice assidûe de romans policiers de Edgar Wallace à Mickey Spillane en passant Agatha Christie. Comme beaucoup, elle se délecte de ces histoires machiavéliques apportant une bonne dose de frisson. Pourtant, en dehors de ces livres, Nora est aussi une très jeune femme candide. Elle est donc une proie idéale pour un jeune play-boy courtois assis à ses côtés dans l'avion qui l'amène à Rome. Un jeu des apparences auquel Nora sera confrontée tout au long de l'histoire qui va la plonger rapidement dans le type de récits qu'elle affectionne en tant que lectrice. Mais pas forcément en tant que personnage central !
Des apparences trompeuses ? On ne peut s'empêcher de penser à Alfred Hitchcock et avec un titre tel que "LA FILLE QUI EN SAVAIT TROP", il n'est plus permis de douter. Le titre faisant une référence directe à L'HOMME QUI EN SAVAIT TROP du cinéaste anglais, même si les deux histoires n'ont pas grand chose à voir. Néanmoins, Mario Bava y apporte sa petite touche personnelle à commencer par une mise en image très soignée. A cet effet, la première nuit romaine de Nora est l'une des parties les plus réussies. Le réalisateur nous met rapidement dans une ambiance telle que la suite des événements prend définitivement une dimension cauchemardesque pour notre infortunée héroïne. C'est aussi cette séquence qui mènera, en grande partie, à se demander si LA FILLE QUI EN SAVAIT TROP posait déjà les bases du giallo tel que Mario Bava les imposera quelques années plus tard avec SIX FEMMES POUR L'ASSASSIN.
L'un des personnages de l'histoire met donc en garde notre héroïne en lui expliquant que ces lectures sont dangereuses. Une petite touche amusante qui rétrospectivement nous permet de comprendre que certaines formes de loisirs ont été, de tous temps, montrées du doigt. Avant le cinéma, les jeux de rôles ou les jeux vidéo, la littérature policière était apparemment bien mal perçue tout comme le rock'n'roll. Surtout que pour beaucoup, avant de devenir les classiques que l'on connaît, il ne s'agissait ni plus ni moins que de romans de gare. Pas mal de films ont d'ailleurs connus des parcours similaires avant de trouver une reconnaissance parfois bien tardivement. Ce qui fut le cas de Mario Bava qui, pendant très longtemps, n'était pas considéré comme un auteur.
En grande partie financé par l'A.I.P. de Samuel Z. Arkoff et James H. Nicholson, LA FILLE QUI EN SAVAIT TROP existe en deux versions. Une italienne et une américaine. Elles diffèrent dans le ton, la version américaine étendant encore plus l'aspect "comédie" du film. En fait, LA FILLE QUI EN SAVAIT TROP était un film de commande ne devant être rien de plus qu'une comédie romantique et policière. Avec l'arrivée de Mario Bava à la barre, cela ne pouvait en rester simplement là. Ainsi, le réalisateur mit en boîte une version pour les Américains telle qu'ils la voulaient ainsi qu'une version italienne. Quelques scènes apparaissent ou disparaissent en fonction de la version, américaine ou italienne, donnant une interprétation très différente de l'histoire. Sur le DVD, on ne trouve que la version italienne, celle qui reste dans l'esprit de Mario Bava : plus macabre et plus noir. La fiche historique du DVD, que l'on nomme communément les notes de production, vous donnera à cet effet un peu plus de détails sur les deux versions du film.
Si l'on ne peut pas dire grand chose en ce qui concerne les bandes sonores en mono d'origine tant elles ne posent pas de réels problèmes, l'image souffre de nombreux défauts de pellicule inhérents à l'âge du film. De plus, son statut d'uvre méconnue ne lui a sûrement pas permis de bénéficier des mêmes traitements que ceux du MASQUE DU DEMON (du point de vue de la copie et non du transfert). En dehors de cela, on notera de temps à autres une luminosité changeante intervenant parfois dans un même plan. Ce genre de problème se retrouve souvent dans les films muets mais pas vraiment de ceux de l'époque où a été tourné LA FILLE QUI EN SAVAIT TROP. Il est à peu près certain que les éléments qui ont permis de réaliser ce DVD proviennent de la même source que ceux utilisés pour les éditions américaines de Image Entertainment. Seule véritable différence, en dehors des bonus présentés, l'adjonction d'une version française et de sous-titrages (en français et en anglais). Toutefois, comme pour LE MASQUE DU DEMON, on notera une image ne respectant pas exactement le format d'origine ainsi qu'un noir et blanc comportant des traces colorées dû à un problème lors du transfert vidéo. Elles seront plus ou moins détectables en fonction des personnes et du matériel utilisé.
Déjà évoqués, les bonus se résument à un long texte à propos de la genèse du film ainsi qu'à une biographie de Mario Bava. Etrangement, la filmographie du réalisateur présente sur le disque du MASQUE DU DEMON a disparu. A noter, enfin, que sur LA MAISON DE L'EXORCISME, troisième disque consacré à Mario Bava à sortir chez Films Sans Frontières, même la biographie a disparu.
Plus ou moins méconnu, LA FILLE QUI EN SAVAIT TROP a la chance grâce au DVD de sortir de l'ombre. Tout comme une énorme part de la filmographie de Mario Bava grâce à ce support (tout du moins aux Etats-Unis). Pas exempt de défaut et avec peu de bonus, ce disque aura quand même le grand avantage de proposer ce film en France à un large panel de spectateurs.