2. Ian Fleming
Le bâtiment de l'Imperial War Museum est aussi imposant
que son nom. Les deux canons géants pointés devant l'entrée
vous feraient presque reculer et les engins militaires placés dans le
hall n'arrangent rien. Mais il s'agit bien d'un musée, non d'une garnison.
Nous sommes ici dans le haut lieu de la commémoration historique et militaire
et Ian Fleming,
avec ses sordides histoires d'espions, de complots, de tortures, de manipulation
et de guerre froide, y a finalement toute sa place ! D'autant que 007 en personne
est venu siroter des Martini en 1995 pour fêter la sortie de GOLDENEYE
juste après la première royale !
Un il dans un rond rouge (un logo très "bondien")
indique l'entrée de l'expo et l'on pénètre tout de go dans
l'univers de James Bond. Une lumière tamisée compose une ambiance
très "services secrets" et la première vitrine nous
présente le smoking de 007 tel que décrit dans les romans. La
reconstitution du bureau de Fleming
à la Jamaïque permet de voir sa mythique machine à écrire,
ainsi que le mapuscrit original de "Casino Royale", corrigé,
raturé et réécrit par l'auteur en 1952. Une citation d'une
ancienne petite amie de Fleming
fait sourire : elle tente de le convaincre de signer son premier roman sous
un pseudonyme, afin que son nom ne soit pas déshonoré
Les origines familiales du romancier sont largement expliquées et racontées (un père idolâtré, une mère castratrice), sa jeunesse sportive est mise en avant (ses nombreuses coupes sont ainsi exposées), ses activités en tant que journaliste sont illustrées par des documents exceptionnels (son laissez-passer en URSS), sans qu'à aucun moment, cela ne soit rébarbatif. Les Anglo-saxons savent rendent attractif ce genre d'exposition par un sens du décor, de la mise en scène, de l'interactivité, et par une totale absence de complexe par rapport à la culture populaire (l'inverse de la France, en somme).
La présence de la célèbre machine allemande
de déchiffrement Enigma (qui inspira le romancier pour "Bons
Baisers de Russie"), permet de raconter comment Fleming, alors qu'il
était pendant la guerre l'assistant de l'Amiral Godfrey, chef de la section
navale des services secrets anglais, avait eu l'idée d'une opération
pour récupérer le livre de codes des Allemands. "Il proposa
qu'une équipe britannique, déguisée en pilotes de la Luftwaffe,
s'abîme dans la Manche avec un bombardier Heinkel (pris à l'ennemi).
Le plan de Fleming était de tromper un navire allemand en lui demandant
de l'aide, et une fois à bord de tuer les membres de l'équipage,
de les jeter par-dessus à la mer et de rentrer en Angleterre avec le
bateau". La mission n'a jamais eu l'aval de l'Amiral et Fleming lui-même
la considérera plus tard comme un "non-sens". Elle prouve en
tout cas les talents d'imagination du bonhomme qui les mettra à profit
dix ans plus tard.