A Marseille, au début des années 1930... Après la mort de son ami François Capella, abattu d'une rafale de mitrailleuse, le gangster Roch Siffredi se retrouve le seul parrain à Marseille. Il fait son enquête et découvre que le meurtre de Capella a été commandité par Volpone, un italien fasciste qui cherche à faire main basse sur le milieu de la cité phocéenne. Par vengeance, Siffredi fait tuer le frère de Volpone. Ce dernier organise, en une nuit, toute une série de meurtres et d'attentats qui vont jeter à bas l'empire criminel de Siffredi. Ce dernier est capturé et torturé par les hommes de Volpone...
En 1970, Delon décide de produire l'adaptation de BANDITS DE MARSEILLE d'Eugène Soccomare, livre qui relatait la vie des gangsters Carbone et Spirito, deux grandes figures réelles du milieu marseillais de l'entre-deux guerres. Ce sera BORSALINO, dans lequel il joue le rôle du gangster Roch Siffredi tandis que Belmondo incarne Capella. Pour la réalisation, Delon choisit Jacques Deray, avec lequel il venait de tourner LA PISCINE. Surtout, on sélectionne une fine équipe de scénaristes : Jean-Claude Carrière, Jean Cau et Claude Sautet ! BORSALINO est un triomphe et Delon a envie de lui donner une suite. Ce sera BORSALINO AND CO.
Toutefois, on n'y retrouve pas Belmondo, son personnage étant tué dans BORSALINO. Jacques Deray reprend son fauteuil de réalisateur. Co-production franco-italo-allemande, on y rencontre des comédiens connus. Riccardo Cucciolla, que Delon venait de croiser à l'écran dans UN FLIC de Melville, incarne Volpone. Il était encore tout auréolé du prix d'interprétation que lui avait valu son rôle de Nicola Sacco en 1971, dans le beau film politique SACCO ET VANZETTI. On l'avait aussi vu dans des films de genre, comme le giallo PERVERSION STORY de Lucio Fulci, ou dans LES CHIENS ENRAGES de Mario Bava.
On retrouve aussi des acteurs allemands, comme le massif Reinhard Kolldehoff (LE DIABOLIQUE DOCTEUR MABUSE de Fritz Lang, LES DAMNES de Visconti, LA POURSUITE IMPLACABLE de Sergio Sollima...) ou Anton Diffring : d'un physique assez sec, ce dernier s'est retrouvé catalogué dans les rôles d'officiers allemands aristocratiques, mais on l'a aussi vu dans des films d'épouvante, comme le Hammer THE MAN WHO COULD CHEAT DEATH ou LE CIRQUE DES HORREURS. Un rôle très court qui peut presque se résumer à la brève apparition surprise de Mireille Darc.
BORSALINO AND CO. s'ouvre sur l'enterrement de Capella, rapidement suivi par la vengeance de sa mort. S'ensuivra alors une impitoyable escalade de la violence, qui va se clore par une très sanglante vendetta. Delon avoue être un grand admirateur de James Cagney, l'immortel interprète des films de gangsters Warner des années 1930-40 (L'ENNEMI PUBLIC de William A. Wellman, LES ANGES AUX FIGURES SALES de Michael Curtiz, L'ENFER EST A LUI de Raoul Walsh...). Il semble donc bien s'amuser à lui rendre hommage en jouant le gangster, les cheveux gominés et portant élégamment le smoking. Le travail de reconstitution du milieu marseillais de l'entre-deux-guerres est bien entendu très soigné : théâtre de music hall, maisons de passes, trains à vapeurs, luxueuses tractions-avant...
Toutefois, on sent aussi l'influence marquante des nouveaux polars américains violents de l'époque, comme L'INSPECTEUR HARRY ou FRENCH CONNECTION. Delon se met à la page et défouraille à la Thompson, au fusil de chasse ou au revolver, sans faire de détails. Le sang gicle, une prostituée est défigurée au vitriol, un humoriste explose en morceaux pendant son spectacle à cause d'un accessoire piégé...
Bien sûr, tout cela n'a rien de bien original. Cette histoire de vendetta, linéaire et classique, n'apporte rien de révolutionnaire au film de gangster. Quant au traitement pittoresque du grand banditisme, il ne s'embarrasse vraiment pas de considérations morales. Il n'en reste pas moins que Delon est très à l'aise, aussi bien dans les scènes d'action que dans les moments un peu plus "psychologiques". La réalisation de Deray, tout à fait solide et classique, est irréprochable. On remarque que le film se termine sur un "à suivre..." semblant promettre un troisième volet des aventures de Roch Siffredi. Toutefois, BORSALINO AND CO. sera un échec critique et recevra un accueil public bien plus tiède que son prédécesseur. Cette idée tombera donc à l'eau.
La copie utilisée pour ce DVD est franchement en excellent état. Le rendu des couleurs et de la luminosité est tout à fait correct. malheureusement, les scènes sombres trahissent des problèmes techniques réels : définition en chute libre, rémanences, bruits vidéo... Le résultat global est honorable, mais sans plus. La bande-son est proposée dans un remix 5.1, particulièrement dynamique lorsqu'il s'agit de rendre les fusillades ou la - célèbre - musique de Claude Bolling.
Hélas, la section de bonus est la même que sur les autres titres de la collection. C'est à dire qu'on ne trouve que la série de treize bandes-annonces, disponible sur tous ces DVD.
Certes, BORSALINO AND CO. ne joue pas dans la catégorie des chefs-d'œuvre que Delon a tourné avec Visconti, Clément ou Melville. Il s'agit néanmoins d'un luxueux et efficace représentant du cinéma populaire des années 1970, à ne pas négliger pour les séances DVD du samedi soir.