Dans le futur, Helena (Clara Lago) se trouve seule dans un vaisseau spatial à destination d'une planète nommée Celeste, en passe d'être colonisée par les humains. Elle vit seule depuis que ses parents se sont sacrifiés afin qu'elle puisse vivre avec la réserve d'oxygène restante, en attendant la visite d'un éventuel vaisseau. Arrive alors Alex (Alex Gonzalez), qui vient réparer le souci. Le premier humain avec qui elle a un contact en 20 ans. Cette rencontre bouleverse son quotidien et elle réalise en fait que sa vie n'est pas celle attendue.
La scène d'éveil d'Alex avec Helena le fixant corps à corps ressemble quelque peu à celle avec Chris Pratt dans PASSENGERS, mais la ressemblance s'arrêtera là. Premier long métrage d'un scénariste et auteur de courts métrages, il s'agit d'un pari assez osé pour un long-métrage SF espagnol, d'un montant de 4 millions d'? de budget. Qui depuis très longtemps dame le pion au cinéma français de genre, qui patine lui depuis plus de 20 ans entre gore déployé, référentiel à outrance et film d'auteur chiant (ou les trois en même temps). Un concept ici intelligent, qui croise adroitement les genres : SF, anticipation, fantastique et thriller.
Cette co-production hispano-colombienne tournée à Bogota et Medellin est sortie en avril 2017 en Espagne par Filmax. Avec hélas un échec au bout du compte. Dommage, car le film a rejoint la cohorte de films du catalogue Netflix, où il se retrouve perdu au milieu de nulle part. Le privant ainsi d'une certaine reconnaissance, avec tout le paradoxe de cette chaine offrant une (in)visibilité aux films récents. Une sorte de poubelle de luxe pour DTV, en quelque sorte. ORBITA 9 est malgré tout sorti en Blu Ray fin 2017 sur le territoire espagnol. Et rien ne semble se dessiner pour la France à ce jour pour une sortie en format physique.
Le gros atout demeure son traitement visuel. Un début dans la solitude spatiale, sentiment de claustrophobie technologique dans l'infini. Une esthétique de blancheur irréelle, qui font immanquablement penser à la réussite de MOON. ORBITA 9 ne peut se reposer sur des explosions pour masquer le récit ou rythmer sa progression. Le réalisateur/scénariste opte pour une approche plus minimaliste, cadrant soigneusement ses intérieurs. Des décors minutieux, riches en détails et s'insérant dans une logique de torture technologique savamment orchestrée. Des idées ingénieuses, comme la pièce d'échange avec la psychologue (Belen Rueda, LES YEUX DE JULIA), où un écran donne au visage de son auditrice l'apparence d'une louve, via des capteurs visuels sur le visage. Une société basée sur la dissimulation, jusque dans ses rouages de guérison de l'âme.
Là où le récit change de braquet et où le bât blesse : ORBITA 9 opte pour une autre direction au bout de 20 minutes. (attention, quelques spoilers ci-dessous). Il s'avère qu'Alex est un technicien chargé de surveiller 10 environnements expérimentaux. Où ont été placés des bébés surveillés jour et nuit pour comprendre l'impact de l'isolement spatial, dans le cadre d'un futur programme de colonisation de planètes. Pris de remords, il décide de faire évader Helena. Et de trouver un subterfuge afin que le programme militaire ne se rende pas compte de la supercherie. Ce que le récit lance comme récit cosmique sur la nature de la femme face au vide devient une course à la survie sur Terre. Intelligemment, le cinéaste opte pour le point de vue d'Helena, aveuglée au propre comme au figuré par un extérieur fascinant, lumineux mais brutal et sans pitié. Mention spéciale à Clara Lago, parfaite dans le rôle d'une femme-enfant emprisonnée dans un monde clos, tentant de se libérer de son mode de fonctionnement, pour mieux vouloir y retourner- car finalement plus à l'abri. Ruiz-Zorilla se permet aussi un petit clin d'oeil à BLADE RUNNER en recréant la scène de dégustation de nouilles dans un restaurant extérieur avec la pluie battante, néons et parapluie compris.
Le scénario n'évite pas cependant quelques trous béants et certaines facilités pour mener à bien son aboutissement. De ce fait, certaines scènes semblent traîner quelque peu en longueurs pour des développements qui auraient largement pu être initiés en amont de l'action (comme la découverte des dossiers par Helena de chaque station orbitale). Une progression parfois lente, relancée par une scène d'action aussi brutale qu'inattendue et bien tendue. Sans qu'elle ne soit réellement nécessaire à l'action. Mais l'autre avantage restant que l'on ne sait pas où le film veut nous emmener ? et son issue de demeurer ouverte. A l'inverse des multiples space operas anglo-saxons récents. Une certaine fraîcheur, d'approche, malgré tout. Mais qui s'enfonce dans quelque chose de plus conventionnel au final. Le discours enfonce quelques portes ouvertes bien connues : programme militaire inhumain, consortiums étrangers manipulateurs, valeur de l'être humain face aux enjeux plus grands que lui... tout en conservant l'histoire d'amour comme moteur, central et décisif. Une course-poursuite effrénée des deux héros poursuivis par de méchants tueurs, la violence inutile, le sens du sacrifice...
ORBITA 9 arrive à bon port avec une fin énigmatique. Vengeance en préparation, Sagesse de l'isolement... La meilleure réalité est-elle celle que l'on se choisit ou celle qui nous est imposée ? Cela reste totalement ouvert à l'interprétation du spectateur, ce qui, au fond, mérite l'ouverture d'esprit de l'auteur. Il reste un film imparfait, bancal par moments, mais tentant une science-fiction émotionnelle comme peu auront tenté de faire. Surtout eu égard au budget étriqué qui n'a pas à rougir de son rendu visuel éminemment réussi. Equilibre fait entre une ville aux bas-fonds, insalubres et ses intérieurs technologiques trop propres pour être honnêtes. Une approche cérébrale de l'anticipation.
Un menu animé avec les accès au film, versions, 8 chapitres et suppléments. Au format 2.35:1, d'une durée complète de 94mn38, en 1080p et sur un BD50. Le rendu n'est cependant pas optimal. Si on dénote une certaine précision dans les détails et une copie propre, il existe comme un halo permanent pendant le film. Ce qui donne un aspect nébuleux assez désagréable par instants. On y ajoute des contrastes mal gérés et des noirs aléatoires. Assez gênant pour un Blu Ray.
Une piste DTS HD MA 5.1 castillane du plus bel effet, rendant un bel hommage à la très belle partition électronique et éthérée de Federico Jusid, accompagnant à merveille les moments de doute ou d'action. Répartition adéquate des effets sonores sur l'ensemble des canaux, peu de saturation notable et des dialogues qui se détachent au mieux ; le tout avec des sous-titres anglais et/ou castillans optionnels.
Un making of de quelques minutes, offrant des images du tournage, ainsi que de courtes interviews des protagonistes sur la nature bicéphale du film (en castillan non sous-titré), ainsi que divers films annonces dans la langue originale, sans sous-titres.