Après avoir perdu sa femme et ses deux enfants dans une explosion criminelle, le détective Franck Castle (Dolph Lundgren) devient un justicier nommé Punisher. Passé pour mort, il exécute sommairement les membres de la pègre locale. Après 125 meurtres, le seul flic à ses trousses (Louis Gossett, Jr) pense avoir trouvé le moyen de le localiser. Mais il n'est pas le seul.
Adapté de la bande dessinée Marvel éponyme, PUNISHER a connu des fortunes très diverses. Tourné en Australie, vendu à travers le monde mais avec une destinée DTV aux USA, à la faveur de la reprise du studio New World, qui ne voulut pas entendre d‘une sortie cinéma. Et qui devint malgré tout un énorme succès en Video. Sorti le 25 octobre 1989 en France, il rencontra un succès d'estime avec un peu plus de 355 000 entrées au compteur. Un résultat que n'atteindra même pas la toute molle version 2004, faisant moitié moins, sans parler de PUNISHER WAR ZONE, pourtant largement supérieur, qui s'échoua sur les bancs du DTV.
Un casting de choix pour épouser la vision de Mark Goldblatt : Dolph Lundgren, auréolé des succès de ROCKY IV ou encore LES MAITRES DE L'UNIVERS - même si l'acteur principal voulut assez vite en oublier les faits. Idem pour son contrepoint Louis Gossett, Jr, sortant d'un oscar pour OFFICIER ET GENTLEMAN, et un énorme succès public pour AIGLE DE FER. Le néerlandais Jeroen Krabbe (LE 4E HOMME) officie en qualité de vilain de l'histoire de manière plutôt magistrale. L'ensemble est complété par le seul rôle féminin à peu près dessiné, à savoir Nancy Everhardt, échappée de MUTANT AQUATIQUE EN LIBERTE.
Si le compositeur Dennis Dreith a connu une carrière très discrète, il n'en est pas de même du scénariste Boaz Yakin. Réalisateur de FRESH, il se commit graduellement dans des oeuvres hollywoodiennes de masse relativement impersonnelles comme LE PLUS BEAU DES COMBATS, FILLES DE BONNE FAMILLE ou le récent MAX sur un chien soldat marine de son état en Afghanistan. Etonnant de le voir écrire PUNISHER de manière aussi sèche et directe. Déformé par le système?
Il est par contre logique de retrouver l'australien Ian Baker à la photographie. Ce directeur photo fut le collaborateur en chef d'un metteur en scène les plus intéressant (et injustement méprisé) des années 70/80, à savoir Fred Schepisi, et ce depuis THE DEVIL'S PLAYGROUND en 1976. Il livre ici des éclairages bruts, sales, glauques, en parfaite adéquation avec le sujet et le ton souhaité par le réalisateur.
Presque 30 ans après sa sortie, force est de reconnaître que le film garde un sens de l'âpreté et du rentre-dedans comme peu de séries B des années 80 auront su élaborer. Lundgren en tête, avec pour une fois la chevelure brune, peau burinée, regard sombre. Une performance remarquable, tant jusque là il ne lui fut demandé de n'être qu'une montagne de muscles au potentiel neuronal digne d'un géranium mort.
Un costume certes différent de la bande dessinée que les puristes vont regarder d'un sale oeil. Nous sommes cependant dans une vision personnelle, comme pour toute adaptation littéraire quelle qu'elle soit. Donc correspondant à une vision d'auteur. Et on sent que Goldblatt essaye vraiment d'élever le film au-delà d'une simple série B. Le budget apparait plus confortable que pas mal de ses confrères de la décade 80/90. Même l'interprétation semble un poil plus adaptée, moins calibrée. Preuve en est avec Lundgren qui se sort de l'ornière des films d'actions dont on pouvait avoir l'habitude (pour y retomber aussi sec derrière, MEN OF WAR mis à part).
En fait, si le récit suit vaguement la BD d'origine, l'aspect de pure vengeance qui anime le caractère principal transpire sur le reste du film. Ce qui confère quelque chose de rassurant pour la tonalité du produit. mais il ne faudra rien en attendre d'autre. Il y a de bien pires constats que de voir un long métrage tenter (et réussir) à divertir - tout en maintenant un côté adulte de l'expression visuelle. PUNISHER reste très violent (certes, moins que PUNISHER WAR ZONE!), tout en posant des éléments ambigus. certes, Castle/Punisher embrasse sa position de vengeur et de briseur de loi. Tout en parallèle mettant en danger, entre autres, des enfants. La fin justifie-t-elle les moyens? La conclusion est pas aussi claire à ce sujet, sauvant le film des X pellicules d'auto-défense qui pullulaient depuis le début des années 70.
Goldblatt réussit en fait à chorégraphier des scènes d'action de manière clairement esthétisantes. Eclairages baroques, longs travellings latéraux de Catsle en train de courir et mitrailler ses assaillant, caméra sur filin suivant le POV d'une cascade… entre influence HK et comic book, la caméra prend la force d'un uppercut de manière régulière, pour le plus grand bonheur du spectateur qui en prend plein les yeux.
Pour la première fois en France, un éditeur s'intéresse au destin d'un film contrarié comme le fut THE PUNISHER. Excellente initiative, qui plus est couronnée par une présentation du plus bel effet. la notion de « Collector » s'applique parfaitement via le fourreau en trois volets, reproduisant dessins originaux et jaquette déviant sciemment du visuel original lors de la sortie cinéma et VHS de la fin des années 80. Un objet à part entière, tout du moins pour le coffret que nous avons acheté pour l'occasion. Il arrive donc en Blu Ray zoné B, édition limitée à 1000 exemplaires, en 1080p et d'une durée complète de 89mn07, ceci pour la version « cinéma ».
Via un débit binaire somme toute régulier, les tons de peau restent naturels, la notion de détail abonde, sans cependant céder à la réduction de bruit trop visible. On note un bon niveau de grain, même si le côté excessif de sa présence se fait parfois sentir - notamment dans des moments où règne une tonalité plus sombre de l'image. Le choix délibéré de noyer le film dans des images de ténèbres ne joue pas forcément en faveur d'une belle image HD, les niveaux de noir n'étant pas optimaux. Mais les éclairages savants, comme ceux émaillants le long travelling avant sur Franck Castle agenouillé nu de dos au fond des égouts labyrinthiques, demeurent largement mis en valeur.
La piste sonore utilisée arrive en anglais DTS HD MA 2.0, émanant vraisemblablement du mixage sur 4 canaux Dolby Stereo d'origine. Agréable à l'oreille, on ne peut néanmoins pas dire qu'elle porte le film aux nues. Des dialogues clairs, restant en central, et des effets (explosions, tirs d'armes…) largement dans la moyenne et parfois électrisants. Une stéréo discrète, même sur la musique du générique de début qui, bien que puissante, apparait compacte et ne se libérant que très peu sur les canaux latéraux. Elle offre néanmoins une expérience immersive largement préférable à la version française mono, bien plus plate, souffrant d'un souffle évident, de voix peu naturelles et manquant d'espace sonore. Il existe diverses versions DVD à travers le monde (Artisan aux USA, notamment), mais toutes ont comme caractéristiques de proposer un mix en 2.0. Sauf l'édition allemande de chez Xploited qui offrait elle un 5.1. Et le Blu Ray anglais, pour information, proposant un mixage DTS HD MA 5.1.
Côté suppléments, les fans du film auront de quoi se réjouir. L'éditeur a pu ajouter une version dite « workprint », ou copie de travail si on a envie de parler vraiment français. Aucunement cautionnée par le réalisateur ceci dit, elle n'est présente qu'à titre de rareté, ce qui la transforme illico en objet de collection. La durée : 93mn34, dont les différences commencent dès le logo New World Pictures, le titre du film… plus de 70 éléments notés qui changent d'une version à l'autre - sans mentionner évidemment les morceaux musicaux fatalement repiqués à d'autres films préexistant…, dont les compositeurs (Horner, Silvestri..) n'ont pas du vraiment savoir que certaines de leurs mélodies ont été repiquées pour l'occasion!
Des changements notables, en termes de durée et de contenu. Notamment toute la séquence initiale a été excisée de la version finale (à la voir, on comprend aisément pourquoi), soit un peu plus d'un quart d'heure de prologue. La qualité de la copie est médiocre, soyez prévenus, mais les aficionados y trouveront très largement leur compte. On y trouve également plusieurs scènes de famille avec Lundgren qui elles aussi ont été laissées sur la table de montage. Vraisemblablement élaborées afin d'accentuer la dimension humaniste initiale de Castle. Une certaine redondance inutile vis-à-vis des courtes mais très évocatrices images de bonheur pré-explosion. Une vraie logique de montage : non seulement de rythme du film, mais également de rigueur narrative.
Il existe également une troisième version dite « uncut », donc une version « intégrale » qui ravira les exégètes, d'une durée de 89mn16. Il faut vraiment être un fan hardcore du film afin de pointer les modifications effectuées entre la version cinéma et celle-ci! A noter que ces suppléments se trouvaient déjà sur le Mediabook Allemand, entre autres. Le gros plus étant que chacune des trois versions du film ont l'apport de sous-titres français optionnels, propres à chaque métrage. Très bel effort.
Pour les autres suppléments, un morceau de choix : l'interview de Mark Goldblatt (avec sous-titres français), illustre monteur donc et réalisateur pour la circonstance. Tourné de manière plutôt pro, bien éclairé, il y apparait humble, assez peu critique. Son intervention précise aborde brièvement les étapes du tournages, conditions et équipe australienne et de la sortie du film. C'en est cependant quelque peu frustrant, tant on aurait apprécié une vision à plus grande échelle. Tout est très politiquement correct au final, un discours qu'on sent bien rodé, ne trouvant entre autres exemples rien à redire sur les autres adaptations de la bande dessinée. Après tout, pourquoi pas? Mais le sentiment dominant reste un manque. A noter que cet entretien est entrelardé de séquences provenant largement du making of.
Justement, ces coulisses du tournage (6mn11), d'une qualité visuelle plutôt surprenante malgré les nombreuses rayures inhérentes au temps. Sur fond musical du PsychoKiller des Talking Heads (bien vu), on découvre scènes manquées, tournage, ambiance, décors… très fun! (mais répétitif par rapport à l'interview du réal)
Concernant le matériel publicitaire propre au film, l'éditeur a pu retrouver le 1e teaser français cinéma, le film annonce officiel ainsi que celui de la sortie en vidéocassette chez Delta Video. Puis deux versions américaines (teaser et film annonce) en stéréo et un film annonce japonais Deux autres films annonces du catalogue de l'éditeur, à savoir LE JOUR DE LA COMETE et QUI L'A VUE MOURIR? complètent le tableau de la galette. En plus, dans cette édition limitée, un livret de 24 pages, avec entre autres écrits, la reproduction d'une interview de Dolph Lundgren parue dans le magazine Impact.
On ne peut que louer l'effort d'un petit éditeur français à mettre en avant la HD en support physique, à l'instar du Chat qui Fume. Un pari risqué car l'impact économique d'un titre aussi peu porteur que PUNISHER version 1989 reste loin d'être sécurisé, surtout lorsqu'on songe à la disponibilité du produit en Europe. Mais avec un packaging différencié et des options francophones, Ecstasy of Films a frappé juste.