Header Critique : VIE REVEE DE WALTER MITTY, LA (THE SECRET LIFE OF WALTER MITTY)

Critique du film
LA VIE REVEE DE WALTER MITTY 2013

THE SECRET LIFE OF WALTER MITTY 

Chef des archives photographiques du magazine Life, Walter Mitty est un employé introverti à la vie routinière. Toutefois, il vit de véritables aventures lorsqu'il s'égare dans des rêves éveillés, le transformant en homme sûr de lui et capable de divers exploits…

Journaliste, James Thurber va se forger un nom en griffonnant des dessins humoristiques ou en rédigeant des articles ainsi que des nouvelles pour le New Yorker. C'est ainsi que «La vie secrète de Walter Mitty» est publiée dans l'édition du 18 mars 1939 de ce magazine. Cela n'a rien d'un roman, «La vie secrète de Walter Mitty» est une très courte histoire narrant l'après-midi d'un homme qui accompagne sa femme chez le coiffeur. La situation est d'une grande banalité mais l'auteur insère des échappées imaginaires dans le quotidien de son personnage principal. Ainsi, pendant un instant, il se voie, entre autres, pilote de l'armée de l'air simplement à la lecture d'un article sur la supériorité aérienne de l'Allemagne. Ce passage en particulier, il sera repris dans LA VIE SECRETE DE WALTER MITTY, l'adaptation cinématographique réalisée en 1947 avec Danny Kaye dans le rôle principal. L'histoire originale est si courte que le film de Norman Z. McLeod modifie l'histoire pour n'en conserver que le trait principal de son personnage, Walter Mitty est un doux rêveur. Pour le reste, Danny Kaye se retrouve embringué dans une histoire d'espionnage où il va devoir sauver une femme fatale qui ressemble trait pour trait à celle qu'il sauve dans ses rêves éveillés.

Depuis de nombreuses années, Samuel Goldwyn Jr. a l'intention de créer des remakes de films produits par son propre père et particulièrement BLANCHES COLOMBES ET VILAINS MESSIEURS ainsi que LA VIE SECRETE DE WALTER MITTY. Pour ce dernier, le projet traînait depuis près de vingt ans, passant de main en main. Ron Howard, Chuck Russel ou encore Steven Spielberg se sont montrés intéressés par une nouvelle version de LA VIE SECRETE DE WALTER MITTY qui aurait mis en vedette Jim Carrey. Perdus dans les méandres hollywoodiens, le projet changera de studio et de scénaristes alors que le rôle principal sera donné ensuite à Owen Wilson, Sacha Baron Cohen ou encore Mike Myers. Autant dire que cette nouvelle adaptation aurait très bien pu rester coincé dans un jeu de chaises musicales sans fin. Mais le projet va prendre un véritable envol lorsque le scénariste de A LA RECHERCHE DU BONHEUR, Steve Conrad, est engagé pour écrire le film à partir de la courte histoire d'origine. Séduit par le scénario, Ben Stiller s'engage en tant que comédien et décide aussi d'assumer la mise en scène du métrage.

En tant que réalisateur, Ben Stiller ce sont les délires ZOOLANDER et TROPIC THUNDER. Mais le comédien a aussi mis en boîte GENERATION 90, une sorte de comédie romantique, ainsi que DISJONCTE où un Jim Carrey exubérant était dépeint, au final, comme un psychopathe, la farce humoristique tournant carrément au tragique. A l'évidence, Ben Stiller n'a pas seulement l'envie de faire rire et il le prouve avec LA VIE REVEE DE WALTER MITTY. Cette nouvelle version de «La vie secrète de Walter Mitty» s'écarte complètement du film de 1947. De la courte histoire parue dans les pages de The New Yorker, il n'en reste rien ou presque… A vrai dire, le tissu original a été totalement réinventé en ne conservant qu'un point de départ ténu, celui d'un personnage à l'imagination débordante. Steve Conrad s'est montré particulièrement malin en donnant une véritable épaisseur à l'histoire. Simple tranche de vie humoristique dans sa version littéraire et amusante comédie cinématographique en 1947, cette fois le concept s'inscrit dans un discours social et humaniste porté par une mise en images extrêmement soignée.

Pris tel quel, LA VIE REVEE DE WALTER MITTY est une comédie romantique dont les grincheux n'hésiteront pas à reprocher une fin pleine de bons sentiments. Mais, en réalité, le film dresse le constat d'une société actuelle qui n'a pas grand chose de reluisant. C'est d'autant plus malin d'avoir placé l'histoire dans le cadre de la transition du magazine Life de sa version papier vers son passage au numérique. Ironie du sort, bien que cela ne soit pas exprimé dans le film, le sort de Life sur internet n'a rien d'enviable pour le moment ! Mais ce mythique magazine a mis en avant des photos d'événements et personnalités marquantes durant une grande partie du XXème siècle. On en retrouve un certain nombre dans LA VIE REVEE DE WALTER MITTY dont celle de Martin Luther King qui avait fait un discours intitulé «I have a dream». C'est tout le sujet du film qui vous exhorte à prendre en mains vos rêves et par la même votre propre vie en développant votre potentiel. Le personnage de Walter Mitty a ainsi perdu de vue, au cours de son existence, ce qu'il aurait voulu être tout comme sa confiance en lui. Mais LA VIE REVEE DE WALTER MITTY ne nous dit pas que tout le monde va devenir, rien qu'en embrassant ses rêves, un John Fitzgerald Kennedy ou un John Lennon en puissance. Il s'agit surtout de vivre sa vie, de faire ses propres choix plutôt que ceux dictés par les autres. Par exemple, dans le film, plutôt que monter dans une voiture en tant que passager, Walter Mitty part seul. Un choix qui débouche sur un moment de liberté et de plénitude pour le personnage principal ! Cela pourrait s'arrêter à cela mais le film est astucieux puisque ce choix aurait pu avoir une issue dramatique sans une aide extérieure d'un héros aussi anodin que Walter Mitty. La quête du film nous mènera jusqu'à deux photos dont l'une n'existera jamais, les deux enfonçant le clou d'un message humaniste qui fait de cette VIE REVEE DE WALTER MITTY une petite perle cinématographique !

Rédacteur : Christophe Lemonnier
Photo Christophe Lemonnier
Ancien journaliste professionnel dans le domaine de la presse spécialisée où il a oeuvré durant plus de 15 ans sous le pseudonyme "Arioch", il est cofondateur de DeVilDead, site d'information monté en l’an 2000. Faute de temps, en 2014, il a été obligé de s'éloigner du site pour n'y collaborer, à présent, que de manière très sporadique. Et, incognito, il a signé de nombreuses chroniques sous le pseudonyme de Antoine Rigaud ici-même.
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