Tornade extra-terrestre ! Quel titre ! Quelle promesse ! Quelle... mais que peut-on vraiment attendre d'un film qui se nomme ALIEN TORNADO ? Quelle nouvelle trouvaille hydride nos amis bricoleurs de série B ricaines vont-ils nous balancer en pleine tête ? Des tornades provoquées par des aliens, donc. Mais pourquoi tant de haine ?
Judd (Jeff Fahey) est un fermier veuf tranquille qui voit sa ferme dévastée par une tornade inédite. Ces phénomènes sont aussi remarqués par Gail, une chasseuse de tornades (Kari Wuhrer), alertée par une bloggeuse locale (Claire Conti). Il faut se rendre compte à l'évidence : le gouvernement n'en parle pas, les medias non plus mais de curieux officiels sont sur place. Les tornades semblent viser quelque chose et menacer Chicago.
Vu le look, l'odeur et le sujet, ça suinte le produit à vocation de diffusion sur SyFy et donc un produit fait pour le câble. Bingo. Pour commencer : des acteurs en perte de vitesse, avec des noms connus (plus ou moins) mais suffisant pour une tête d'affiche. Donc Jeff Fahey. On le connaît bien Jeff. BODY PARTS, CHASSEUR BLANC CŒUR NOIR, LE COBAYE, PSYCHOSE III, WYATT EARP... et comme beaucoup, l'enchainement de série B voir C (BLUE DEMON, quand même) et un retour en grâce plus récent dans la série LOST ou encore MACHETE. Et la jolie Kari Wuhrer, au destin plus ou moins similaire : DAR L'INVINCIBLE 2, LA PEAU SUR LES OS, ANACONDA, la série SLIDERS, ARAC ATTACK, KING OF THE ANTS et... enchainement de série B (avec HELLRAISER DEADER, quand même). Très dur de rester au top toute une vie d'acteur. Les plus cinéphiles verront Terry Kiser lui aussi en fin de parcours : de son petit début dans RACHEL RACHEL en 1968 en passant par WEEKEND AT BERNIE'S et VENDREDI 13 CHAPITRE 7 : UN NOUVEAU DEFI, il y a une marge terrible avec ALIEN TORNADO. Idem pour David Jensen, qui fait partie de ces visages qu'on oublie pas mais incapable de dire où et quand on l'a vu, pas plus quand. C'est également le constat quant au réalisateur Jeff Burr. Qui pouvait être considéré comme un espoir du film de genre avec THE OFFSPRING, MASSACRE A LA TRONCONNEUSE 3 où à la rigueur LE BEAU PERE 2. Malheureusement, une fois enchainé PUPPET MASTER 4 et PUPPET MASTER 5 ou encore WEREWOLF REBORN ! c'était plié. J'allais oublier Griff Furst (qui fait un cameo ici) et qui se trouve au générique en qualité de producteur. Ahem! Le réalisateur de LAKE PLACID 3, SWAMP SHARK ou des prochains GHOST SHARK (un requin fantôme !) et de RAGIN CAJUN REDNECK GATORS n'a franchement rien pour rassurer sur l'aspect qualitatif de l'ensemble.
Inutile d'attendre le graal, ALIEN TORNADO n'est en pas un. Du tout. C'est nonsensique, stupide dans son essence-même. SyFy dans l'âme, quoi. Le début du film tente maladroitement de faire vivre des personnages dont la destinée semble toute tracée. La fille adolescente vivant seule avec son père fermier et qui veut s'émanciper en devenant «une grande scientifique». Guéguerre avec papa qui comprend rien. Puis une jolie spécialiste de tornades célibataire. Vous me suivez ? Le fermier veuf ? La météorologiste seule ? Spectateur, ne sens-tu pas poindre l'amour et la réunion d'une famille disloquée, hein ?. Il y a aussi cette bloggeuse obèse qui suit Gail comme son ombre. Ca ajoute d'ailleurs un peu au charme du film, avec des dialogues enlevés et on se dit que, finalement, le film trouve peut-être une once d'originalité dans les seconds rôles. Dont Barney (Caleb Tourres) un informaticien de génie agoraphobe nain. Le scénariste Paul A. Birkett (auteur de ALTITUDE ou encore de ARACHNOQUAKE) possède quelques petites trouvailles puisque généralement, les obèses et les nains, entre autres minorités visibles ou invisibles, sont réduits à la portion congrue et moqueuse du cinéma B...
Le problème demeure que ca ne dure pas longtemps et que l'histoire va enfiler du non-sens au kilomètre. Entre le fait que Fahey laisse sa fille sur la bas-côté de la route «cache-toi sous le pont, je te dis» en pleine poursuite avec les méchants fédéraux et avec les tornades aux fesses, on peut se demander si le père de famille est vraiment responsable de sa progéniture ! Ou encore la mère Wuhrer qui s'ingénie à filmer au smartphone des tornades fluo malgré leur proximité extrême et subitement «vite, barrons-nous» : on pense secrètement à une bonne Nabillade pour le dialoguiste/scénariste qui a du fumer grave pour pondre de telles énormités. On passera aussi sur l'ado qui va craquer un code que même les grosses têtes du gouvernement n'auront pas réussi à faire. Les trois agents fédéraux aux lunettes noires se faisant avoir comme des bleus avec l'ado rebelle, habillés à la hâte en cuir menaçant (et ridicule).
Le meilleur vient cependant des tornades extra-terrestres. Pourquoi les tornades, visiblement des créatures faites d'énergie, veulent-elles détruire la Terre ou tout du moins la campagne d'Illinois pour commencer, puis Chicago ? Pourquoi aspirent-elles des humains en l'air ? PARCE QUE ! Voilà. C'est tout. Parce qu'elle le peuvent. Aucune raison à chercher. Rien de rationnel. Il n'y a qu'à entendre le ramassis d'explications championnes de l'à-peu-près à la 66ème minute du film. On est sur du cinéma abscons. Faut avaler le concept à sec et au gravier car sinon, ça ne marche pas. Donc accepter le fait que : les tornades, elle sont violentes, méchantes et elle sentent mauvais. L'alien de chacal, qu'elles possèdent. C'est pour ça qu'elles sont si méchantes. En fait, en regardant des bandelettes Bis comme cela à longueur de temps, on deviendrait presque des experts en pression atmosphérique, on parlerait hectopascal comme on pourrait disserter sur le pouvoir hypnotique de ZOMBI HOLOCAUST. Ou de la séduction innée des zooms de Bruno Mattei. Ou encore des brisures des conventions cinématiques chez Charles Band. On devient des experts, quoi. Et là, on peut dire : ALIEN TORNADO, c'est très très très con.
Ce qui amène à se poser des questions importantes. Les tornades changent–elles les couleurs de vêtements après leur passage ? La réponse est oui. Il n'y a qu'à faire attention aux deux bloggeuses qui montent dans leur pickup avec habits de couleurs X et qui en ressortent au plan d'après avec des couleurs Y. Le gouvernement américain est-il TELLEMENT sûr de son coup face à l'invasion extra-terrestre qui se prépare qu'il envoie TROIS agents sur le terrain. TROIS AGENTS ? Si on était en plein Andorre, on comprendrait mais là... non, vraiment pas sérieux. Les tornades ne pouvaient-elles pas directement attaquer Chicago, voire la Terre entière dès le début du film ? Non, car il n'y aurait pas eu de film !
Comme on se rattrape comme on peut, le film nous montrera peut-être de bons effets spéciaux numériques ? Mouais. On dira poliment qu'ALIEN TORNADO demeure dans une honnête moyenne. La destruction de Chicago avec son stade de base-ball qui virevolte par morceau reste, comment dire, rigolote et peu crédible avec ses pixels qui s'envolent. Mais sans être gratuitement méchant, certains effets méritent le respect vu le budget engagé. Et en fait, ALIEN TORNADO fait office de digne représentant de cette mouvance série B pour le câble US. On se surprend à suivre le film de manière plaisante, la narration s'évertuant à faire apparaître l'action à tous les coins de l'écran. La première tornade est par ailleurs filmée de manière efficace, comme par ailleurs la majeure partie du film. On passera à Jeff Burr sa volonté tenace de faire trembloter sa caméra aux scènes de tornade, histoire de faire croire à un minimum de drame d'action où il se passe quelque chose. Ca peut compenser, sans ce tour de passe-passe, le jeu catastrophique de certains acteurs notamment le shériff à la 77ème minute, mimant très mal la proximité de vents violents. Pour une bonne rigolade, un petit fast-forward à cette scène sauvera quelque peu le reste. On aura une pensée émue pour l'ensemble du casting qui fait ce qu'il peut pour demeurer sérieux à l'écran, livrer une performance d'acteur qui doit croire à la stupidité intense du projet auquel il adhère. Rien que les trois agents coincés dans leur costume bricol'boy genre soirée SM à la con : respect.
Le DVD français s'avère au diapason de ces quelques lignes. Minimum syndical requis. Accès/Découpage en 12 chapitres avec menu animé. Au format 1,77:1 et 16/9e et d'une durée complète de 83mn53. Version française doublée à la hussarde (qui provoque une irrépressible envie de napalmer le studio qui a permis ça) et une version originale anglaise avec sous-titres obligatoires toutes deux mixées en 5.1. La piste doublée privilégie le dialogue en français, qui est enregistré plus fort au détriment de l'environnement sonore. Ce qui n'est pas le cas avec la version originale, équilibrée par rapport à la partition musicale, les bruitages et l'atmosphère élaborée. Si vous avez le courage de regarder le générique jusqu'au bout en version française, vos oreilles seront déchirées par un crachouillis sonore-effet-larsen insupportable ! La définition de la copie est agréable à l'œil, mais il ne faut pas trop regarder lors de scènes se déroulant de nuit ou pendant la panne d'électricité vers la fin du métrage. Les contrastes ne sont pas très heureux. Mais la couleur de peau demeure naturelle et les détails abondent en précision. Et pour couronner le tout, les tornades ont tout emporté sur leur passage, y compris les éventuels bonus.