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Critique du film
METROPIA 2009

 

Suède, 2024. Le monde est à court de pétrole et un système de metro a été élaboré afin de rejoindre rapidement les différents pays européens. Le metro est dirigé par la société Trexx dont le PDG Ivan Bahn a trouvé un moyen d'espionner chaque humain, même à l'intérieur de leur esprit. Roger un obscur employé lambda vivant une vie mécanique entend une nouvelle voix dans sa tête qu'il pense être sa conscience. Il se rend compte petit à petit que quelqu'un «l'écoute de l'intérieur» et il croise la mystérieuse Nina, objet de ses fantasmes et qui semble bizarrement avoir besoin de lui.

Co-produit entre autres par la société de Lars Von Trier (Zentropa), METROPIA est un film d'animation de science-fiction hors norme, à la fois en terme de technique et de sujet. En effet, la technique d'animation adopte un travail stylisé de photographies (photomontage en 2D) puis animées pour les besoins du film. Cette technique excelle à pointer les détails (chevelure, peau…) avec un visage demeurant relativement inexpressif. Un choix artistique curieux qui pourra en irriter plus d'un et à rapprocher des efforts tels que A SCANNER DARKLY de Richard Linklater ou encore le récent et très ressemblant NUMERO 9 de Shane Acker dans la thématique et la volonté de repousser le cadre filmique de son carcan habituel.

Cela donne, au final, un aspect oscillant entre le cauchemar, le rêve éveillé et le surréalisme tendance Salvador Dali. L'aspect des couleurs passées, donnant dans un grisâtre-bleu permanent, provoque un certain malaise lors de la vision. Le tout pour dépeindre une société déshumanisée, privée de joie apparente et gouvernée insidieusement par une World Company quelconque... Un futur peu réjouissant, aux tendances Orwelliennes.

Le scénario s'avère complexe lors de sa mise en place avec son mélange de science-fiction à dominante sociale (à la 1984) croisé avec du film noir. A ce titre, le personnage de Nina fait office de femme fatale à la dualité évidente, évoquant à la fois des films comme GUN CRAZY ou bien LE FAUCON MALTAIS. D'autres éléments (complot terroriste, manipulation des masses…) venant compléter un tableau déjà bien chargé pour arriver à une contre utopie qui peut rappeler Jonathan Swift et ses Voyages de Gulliver ou encore laisser planer l'ombre d'un Ray Bradbury. Mais en adoptant un ton romanesque, METROPIA parvient à générer un certain suspense qui tient en haleine jusqu'au bout du métrage et ce même si la résolution parait légèrement tronquée. Tarik Saleh convainc de par son ton novateur et parvient à élaborer un univers résolument différent.

La volonté de décrire un métro universel où la vie s'organise/se désorganise n'est pas non plus nouvelle. Il n'y a qu'à remonter le temps de quelques courtes années pour se souvenir du KONTROLL de Nimrod Antall. C'est quelque part ce qui peut nuire à METROPIA. L'originalité du projet et la réussite technique dans des limites budgétaires moindres (environ 3,3 millions d'euros) demeurent indéniables et exemplaires. Mais le film est tiré vers le bas par un scénario très (trop ?) complexe et une ambition démesurée par rapport au résultat final. Les idées esquissées dans la première partie sont quelque peu laissées en friche au profit de l'intrigue terroriste dans le dernier quart. Si bien que cette société en voie d'extinction reste singulièrement à l'arrière-plan au final. Tant et si bien qu'on se trouve définitivement en terrain connu d'un point de vue strictement narratif. Les emprunts et autres références (Orwell, etc...) finissent par plomber un scénario qui sent finalement le déjà-vu. Il reste malgré tout une splendide vision du futur, certes assez blême, et un visuel qui pointe vers une nouvelle forme d'expression artistique.

On voit mal le film effectuer une sortie en salles, le sujet et le traitement «arty» feront probablement offices de repoussoir pour le grand public. A l'instar de sa timide sortie suédoise en novembre 2009 où le film a rencontré un échec patent. Si METROPIA peut séduire, ce devrait être à petite échelle (en circuits spécialisés, par exemple) ou alors directement en vidéo. En effet, le métrage a tout de même un petit parfum de film culte pour happy few, mais dans le déluge des films qui nous parviennent chaque semaine, METROPIA aura beaucoup de mal à sortir de la niche où il s'est lui-même lové.

Rédacteur : Francis Barbier
Photo Francis Barbier
Dévoreur de scènes scandinaves et nordiques - sanguinolentes ou pas -, dégustateur de bisseries italiennes finement ciselées ou grossièrement lâchées sur pellicule, amateur de films en formats larges et 70mm en tous genres, avec une louche d'horreur sociale britannique, une lampée d'Albert Pyun (avant 2000), une fourchettée de Lamberto Bava (forever) et un soupçon de David DeCoteau (quand il se bouge). Sans reprendre des plats concoctés par William Friedkin pour ne pas risquer l'indigestion.
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