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Critique du film
THE BOX 2009

 

1976, Richmond, État de Virginie... Norma et Arthur Lewis forment un jeune couple marié, parents d'un petit garçon, auxquels un futur radieux semble promis. Un malheureux concours de circonstances les confronte à des difficultés financières et professionnelles. Un inconnu étrange se présente alors à leur porte et dépose chez eux une boîte munie d'un bouton rouge. Il leur laisse la boîte durant 24 heures, et si le couple Lewis appuie sur le bouton, un million de dollars sera crédité sur leur compte en banque. En contrepartie, un inconnu mourra au même instant...

THE BOX de Richard Kelly est la transposition cinématographique de la nouvelle «Le jeu du bouton», datée de 1970 et écrite par l'écrivain scénariste Richard Matheson. Elle a déjà été adaptée pour la télévision, sous la forme d'un épisode de «LA CINQUIEME DIMENSION» (mouture années 80 de la série télévisée classique «LA QUATRIEME DIMENSION»). Ce segment était interprété par Brad Davis et réalisé par Peter Medak. Richard Matheson s'en désolidarisa, le jugeant trop éloigné de son œuvre originale.

Le réalisateur Richard Kelly s'est d'abord fait connaître grâce au succès d'appréciation de DONNIE DARKO, en 2001, métrage mêlant science-fiction métaphysique et cinéma hollywoodien indépendant à la mode d'alors. Ce long métrage contenait déjà des éléments aux forts relents de «LA QUATRIEME DIMENSION» - dont Richard Matheson était l'un des plus fameux scénaristes !

La carrière de Kelly prend un virage risqué avec SOUTHLAND TALES, film d'anticipation singulier à la production compliquée, qui, après une présentation controversée au festival de Cannes, connaît une longue période de refonte et de remontage. Il sort dans les salles américaines et s'y voit accueilli dans une totale indifférence. En France, SOUTHLAND TALES sera distribué directement en DVD. Avec THE BOX, Richard Kelly revient à un projet plus modeste. Plus directif aussi, puisque inspiré d'une nouvelle littéraire préexistante, concentrée sur un nombre réduit de personnages. THE BOX tient ainsi sur les épaules de trois acteurs : James Marsden (le Cyclope de X MEN) ; Cameron Diaz (révélé en son temps par THE MASK) ; et surtout Frank Langella, dont l'autorité inquiétante l'a déjà imposé comme une personnalité classique du cinéma fantastique, au travers de métrages tels que le DRACULA de John Badham ou LA NEUVIEME PORTE de Roman Polanski.

On peut donc voir dans THE BOX une volonté de Richard Kelly de revenir à un cinéma plus classique, voire, pour être plus précis, à se tourner vers la science-fiction américaine classique. Il convoque ainsi des noms tels que Richard Matheson et Arthur C. Clarke. A travers le personnage d'Arthur Lewis, il évoque la passion pour la conquête spatiale et la littérature «pulp» fantastique.

Inscrivant l'action de son film en 1976, Richard Kelly invoque toute une atmosphère cinématographique vintage, et ce au travers de sa photographie à la lumière diffuse, de ses choix de cadrage, de ses couleurs et de son montage. Des souvenirs du cinéma américain d'alors se bousculent dans une ambiance évoquant les films de Richard Donner (LA MALEDICTION), Brian De Palma (FURIE), Philip Kaufman (L'INVASION DES PROFANATEURS), Stanley Kubrick (SHINING) ou encore Peter Medak, réalisateur de L'ENFANT DU DIABLE... et de l'adaptation télévisuelle de «Le jeu du bouton» mentionnée plus haut !

En dépit de ces obédiences, Richard Kelly reste fidèle à ses thèmes et à son cinéma. La nouvelle est très largement modifiée et étendue de façon à structurer un long métrage de une heure et cinquante minutes. Seul le point de départ intrigant reste réellement intact. Le goût du mystère, d'une ambiance nocturne et terne caractéristique de DONNIE DARKO, est à nouveau de mise dès l'apparition du très inquiétant inconnu et de sa boîte. Comme dans SOUTHLAND TALES, nous retrouvons un mélange de science-fiction et de mysticisme religieux, dans un récit où se rencontrent conquête spatiale, péché originel et, surtout, menaces de l'apocalypse final, ce thème reliant définitivement les trois films de Richard Kelly.

Ce réalisateur réussit particulièrement le début de son métrage, en prenant le temps de présenter avec rigueur et empathie le couple Lewis, leur vie quotidienne, leurs aspirations et leurs désillusions mélancoliques. Frank Langella excelle dans le rôle du porteur de la boîte, énigmatique et inquiétant personnage tiré à quatre épingles et souffrant d'une défiguration singulière et horrifiante du visage.

Toutefois, si l'ouverture intrigante et retenue de THE BOX nous implique immédiatement, Richard Kelly se perd petit à petit dans une intrigue souffrant de longueurs et de de séquences un brin inutiles (la visite de la bibliothèque par Arthur, vaguement Shyamalanesque). En fin de métrage, il impose à ses personnages un second choix draconien de façon un peu artificielle, semblant surtout une astuce pour relancer l'intérêt dans un récit ne sachant pas trop comment se conclure. Qui plus est, Richard Kelly s'égare, à nouveau, dans des théories fumeuses sur le cosmos et la religion, au travers d'hypothèses qu'il prend bien garde à ne pas trop expliciter, histoire d'assurer à son métrage une apparence de profondeur et de singularité. Il se contente cependant de resservir des thèmes et des idées déjà largement exploitées, en mieux, dans plusieurs classiques du cinéma de la science-fiction américaine anciens ou récents... Nous ne les nommerons toutefois pas ici afin de ne pas gâcher les surprises attendant le spectateur !

THE BOX ne manque donc pas de faiblesses à nos yeux. Partant d'une idée de départ exigeant une suite très rigoureuse pour rester à la hauteur, Richard Kelly s'égare dans un propos vague et un brin pompeux. Pourtant, cela ne retire rien aux qualités intrinsèques de son cinéma, la rigueur classique de sa mise en scène, son ambition artistique certaine, ainsi que son goût sincère indéniable pour une science-fiction de qualité. THE BOX reste en effet un divertissement convenable. Mais nous souhaiterions juste voir Richard Kelly passer enfin du statut de jeune cinéaste prometteur à celui, auquel il paraît aspirer, de grand réalisateur du cinéma fantastique américain.

Rédacteur : Emmanuel Denis
Photo Emmanuel Denis
Un parcours de cinéphile ma foi bien classique pour le petit Manolito, des fonds de culottes usés dans les cinémas de l'ouest parisiens à s'émerveiller devant les classiques de son temps, les Indiana Jones, Tron, Le Dragon du lac de feu, Le Secret de la pyramide... et surtout les Star Wars ! Premier Ecran fantastique à neuf ans pour Le retour du Jedi, premier Mad Movies avec Maximum Overdrive en couverture à treize ans, les vidéo clubs de quartier, les enregistrements de Canal +... Et un enthousiasme et une passion pour le cinéma fantastique sous toutes ses formes, dans toute sa diversité.
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