Gravement exposé à des radiations Gamma à la suite d'un accident de laboratoire, le docteur Bruce Banner a disparu de la circulation depuis cinq ans. Poursuivi par le général "Thunderbolt" Ross, il se cache en Amérique du Sud à la recherche d'un antidote pour guérir de sa terrible malédiction. A la suite d'une maladresse de Banner, Ross est alerté de la localisation du fugitif. Il lance alors ses troupes, menées par l'ancien SAS Emil Blonsky, à la poursuite du docteur Banner et de son lourd secret...
Seconde production des Marvel Studios, après le très réussi IRON MAN, cet INCROYABLE HULK nouvelle version a pour lourde tache d'enfoncer le clou déjà excellemment planté par le film de Jon Favreau. Force est de constater que la vénérable maison d'éditions muée en studio de production cinématographique a redressé la barre en matière d'adaptation de comic car les deux métrages déjà cités laissent augurer de bonnes choses pour la suite (et surtout pour la future franchise "Avengers").
Cette nouvelle adaptation de Hulk est pour le moins étonnante. D'une part, elle a l'ambition de relancer une franchise pourtant déjà transposée à l'écran récemment par Ang Lee (avec plus ou moins de succès selon les sensibilités). D'autre part, on sera surpris du choix du réalisateur puisque l'on trouve le français Louis Leterrier aux commandes de ce block-destructeur. Ex-poulain de l'écurie Europa, l'enthousiasme contagieux du cinéaste et son sympathique DANNY THE DOG a certainement su convaincre Avi Arad et les pontes de la Marvel de lui laisser les rênes. Bien entendu, et c'est surtout valable en France, face au flot de critiques à venir, il va être difficile de correctement défendre le film sachant que Leterrier n'a pas forcement la côte. Qu'il soit considéré uniquement comme un "yes man" (et encore, cela reste à prouver), et peu importe s'il signe ici un très bon film d'action, son passé (passif ?) chez Besson cristallisera toujours la mauvaise foi de ses détracteurs. Mais ce jeune réalisateur par ailleurs très sympathique fait très bien son boulot, et surtout il semble si passionné par son sujet qu'il livre une adaptation très respectueuse du mythe associé au colosse de jade (comic book et série TV). Fort logiquement, il signe donc ici son meilleur film.
La Marvel souhaitait donc faire table rase de l'adaptation signée par Ang Lee, c'est donc de manière totalement absurde que ce HULK commence… là où le film de 2003 s'était arrêté ! Si les événements précédents sont résumés dès le générique d'ouverture, on se réjouit de cette astuce qui permet à la fois de situer ce nouveau film dans l'univers Marvel tout en s'économisant les scènes réglementaires à chaque premier épisode ayant la charge d'exposer les origines du héros. Ou comment profiter du travail fait précédemment tout en remettant à zéro les compteurs. Malin ! Lorsque le film commence, Banner est ainsi en fuite après son accident, sa nature double n'est donc plus un secret. L'enjeu principal du film repose sur la possibilité ou pas de soigner ce mal qui le ronge.
Les notes d'intention du réalisateur étaient de se rapprocher à la fois de la bande dessinée, mais aussi de la série télévisée qui a popularisé le personnage dans les années 70-80. Si le docteur Banner est ici un fugitif comme dans la série, les scènes d'actions mettent en vedette le(s) monstre(s) sortant tout droit des pages du comic (jusqu'au fameux "Hulk Smash !"). Les caméos de Lou Ferrigno (le Hulk de la série télé) et Stan Lee (co-créateur du personnage avec feu le grand Jack Kirby), la reprise du thème musical de la série dans la partition musicale signée par Craig Armstrong ou encore le clin d'œil à Bill Bixby (qui fut l'interprète du docteur David Banner à l'écran) sont autant d'hommages appuyés. Sur la durée du film, les intentions du cinéaste sont ainsi bien respectées, avec toutefois une bonne grosse louche de références destinées principalement aux fans du comic book original. Notamment par le biais de quelques personnages secondaires, tel Samuel Sterns aka "Le Leader", ou lors d'un épilogue établissant un lien direct avec les autres (futures) franchises de la Marvel.
Là où Ang Lee livrait un très bon film ambitieux dans sa forme, très personnel dans son fond par une filiation avec la tragédie grecque, il faut bien reconnaître hélas que le projet ne semblait pas complètement abouti mais surtout trop bavard et un tantinet mollasson au vu de ce que l'on pouvait espérer d'une adaptation de Hulk. Louis Leterrier, à la manière de Jon Favreau, se contente lui d'un film d'action efficace, très bien rythmé et plaisant de bout en bout, bien que linéaire et sans réelle surprise. Si cet académisme a plutôt bien réussi à IRON MAN, cela convient tout aussi bien à ce HULK. Pourtant, comparé à son homologue métallique, le body buildé "gammaïsé" souffre d'une distribution moins brillante bien qu'excellente tout de même avec Tim Roth en tête. Celui-ci incarne un Emil Blonsky terriblement psychopathe, sans aucun excès de cabotinage, tout en colère froide et en menace sourde. Un bon rôle de méchant, qui permet de faire briller le héros du film. Edward Norton (co-scénariste) est, lui, un Bruce Banner probant, insufflant assez de fragilité dans son rôle pour contraster avec le monstre qui sommeille en lui. Ses relations (en tant que Banner ou en tant que Hulk) avec Betty Ross sont mises en valeur au travers de quelques scènes prévisibles mais qui fonctionnent bien en grande partie grace au talent des acteurs plutôt qu'à de réelles qualités d'écritures. On pourra trouver que Liv Tyler est cantonnée dans un rôle presque trop statique ou que William Hurt s'efface derrière sa moustache et les galons de général de son personnage mais, là aussi, le comédien ne doit se contenter que de quelques apparitions ne lui permettant pas de se mettre réellement en valeur. Ni lui, ni son personnage bien fade malheureusement.
Si, au regard du travail fourni sur IRON MAN, le scénario ou les personnages apparaissent ici bien moins fouillés, le film compense par d'énormes qualités explosives tout à fait en rapport avec son protagoniste principal. La créature est modélisée dans un style graphique inspiré du comic book, avec muscles proéminents et faciès agressif, bien moins neutre que dans la précédente adaptation. Là où les premiers extraits abondamment diffusés sur le net laissaient craindre une overdose d'effets numériques, le rendu sur grand écran est en définitive très lisible lors des apparitions et des actions du colosse contrairement au final du film de Ang Lee, par exemple. Notamment au cours d'un combat gigantesque entre Hulk et l'Abomination, véritable climax du film, une séquence d'action d'une dizaine de minutes qui pourra sembler presque issue, par instant, d'une démo de jeux vidéos. Mais elle restera toutefois digne d'une empoignade "larger than life" typique d'un comic book, et c'est bien là l'essentiel.
Car au final, ce nouveau film dédié au géant vert est avant toute chose un bien bon moment d'entertainment, un blockbuster divertissant, assez bien ficelé et spectaculaire de façon à le rendre plutôt attachant. Certes, la fantaisie artistique et la créativité sont bridées par la fidélité au matériau de base mais les attentes du public de fan seront comblées, ce qui n'a pas souvent été le cas par le passé. Après IRON MAN, cet INCROYABLE HULK est donc un nouveau pas en avant pour la Marvel qui semble avoir retenu les leçons des erreurs du passé. Si l'avenir des franchises Marvel s'annonce florissant, il faudra pour cela que le studio continue a être aussi rigoureux quant au travail d'adaptation, les projets futurs devront profiter du regain de forme ainsi démontré par ces deux films successifs. Croisons les doigts car, jusqu'ici, tout va très bien !