Header Critique : KEN LE SURVIVANT : LE FILM (HOKUTO NO KEN)

Critique du film et du DVD Zone 2
KEN LE SURVIVANT : LE FILM 1986

HOKUTO NO KEN 

L'homme est allé trop loin et a engendré sa perte. L'apocalypse tant redoutée a donc eu lieu et rares sont les hommes qui ont survécu. Parmi ceux-ci se trouve Kenshirô, unique héritier de l'école Hokuto Shinken dont le titre est ardemment convoité par ses deux frères d'adoption, Jagi et Raoh. Plus lâche, Jagi pervertira l'esprit malléable de Shin pour arriver à ses fins alors que Raoh, monstre quasi-invincible, tentera de prendre le pouvoir par la force…

Manga à succès dès 1983, «Hokuto No Ken» (littéralement «Le poing de la Grande Ourse») deviendra bien vite une série animée sous l'impulsion de la Tôei. Les aventures sanglantes de Ken éclabousseront donc les jeunes téléspectateurs nippons dès 1984 avec, là encore, un engouement indiscutable. La Tôei Animation décide donc de poursuivre sur sa lancée et de partir à la conquête des salles obscures. Le 8 mars 1986 verra alors l'arrivée sur les grands écrans japonais du long métrage d'animation KEN LE SURVIVANT dont il est question ici… A cette époque, le manga et la série animée qui en découle sont loin d'être terminés. Le film ne se focalisera par conséquent que sur la première des trois «périodes» du manga. Cette première portion du récit débute lors de la fameuse apocalypse et s'étend jusqu'à l'affrontement entre Ken et son demi-frère Raoh. Malgré cette restriction, le récit reste très dense et difficilement adaptable sur la durée d'un seul film. Les mésaventures de Ken seront donc assez lourdement élaguées et verront disparaître bon nombre de personnages plus ou moins secondaires. Rappelons par exemple que Ryûken est père adoptif et grand Maître de quatre enfants : Kenshiro, Raoh, Toki et Jagi. Alors qu'ils ont tous un rôle d'importance dans le manga, le film animé fera totalement fi du personnage de Toki, pourtant le plus puissant des quatre frères. Dans le même ordre d'idée, le métrage réduira considérablement le nombre de disciples de l'école sacrée de Nanto. De six (nommés les «six poings sacrés de Nanto»), ils passeront donc à trois. Seuls resteront donc Rei, ami de Ken, Julia, fiancée de Ken, et Shin, le redoutable adversaire responsable des sept cicatrices visibles sur le torse du héros. Nombreux sont par ailleurs les «bad-guys» dont le rôle devient ici très anecdotique… Reconnaissons malgré tout qu'au final, même s'il s'avère déroutant, le scénario de cette adaptation de 106 minutes rédigée par Susumu Takaku tient ses promesses et respecte au mieux le travail d'origine de Buronson.

A l'époque de son arrivée en France et de son passage au Club Dorothée, la série animée KEN LE SURVIVANT fut le cheval de bataille d'une véritable croisade anti-animation japonaise. Les arguments avancés visaient alors la violence graphique et la laideur des images. Manifestement très perturbé par ce qu'il voyait et ne cherchant probablement pas à comprendre, Philippe Ogouz, comédien et doubleur de son état, accepta de prêter sa voix à la série (et plus particulièrement à Ken) à condition de pouvoir y apporter une «touche personnelle» visant à désamorcer la cruauté des images. Cela se traduira par un doublage catastrophique, très irrespectueux mais en réalité si décalé qu'il fera le bonheur des jeunes spectateurs et restera ancré dans les mémoires… Quelques années plus tard, le long métrage aura à subir, dans une mesure bien moindre, les mêmes affronts de la part de la même équipe de doublage. Quelques dialogues «déroutants» tentent ainsi d'amoindrir l'impact des séquences les plus violentes mais, en réalité, rien n'y fait. Le film d'animation KEN LE SURVIVANT est particulièrement saignant et ce malgré l'autocensure pratiquée par la Tôei (contre-jours, dégradations graphiques, flous, saturation des couleurs, etc...). Les têtes sont fendues à l'arme blanche, les corps explosent suite au touché expert de Kenshirô et les actes de barbarie se multiplient pour un spectacle allant même bien au-delà de ce qui était montré dans le manga. Buronson, scénariste de l'oeuvre d'origine, sera même particulièrement déçu à la vue d'une adaptation qu'il juge «déplorable» car délaissant (effectivement) la psychologie des personnages au profit de nombreuses gerbes rougeoyantes…

Comme dit précédemment, la violence ne fut pas le seul «problème» soulevé par les associations familiales françaises. La «laideur» (très suggestive) des images fut elle aussi mise en cause lors de l'arrivée de la série sur le sol hexagonal. Il est vrai que dans sa version télévisuelle, KEN LE SURVIVANT souffrait d'une animation plutôt simpliste et d'un graphisme relativement épuré. Même si les techniques paraissent aujourd'hui datées, le long métrage palliait sans mal à ces deux problèmes et proposait au spectateur un visuel bien plus riche. Si l'aspect des personnages gagnait indiscutablement en détails, c'est essentiellement les arrières plans qui bénéficiaient d'un véritable lifting salvateur. Bon nombre d'effets visuels, souvent novateurs pour l'époque, mettaient ainsi en valeur les personnages mais aussi la violence irréelle de leurs attaques. A sa manière, le film KEN LE SURVIVANT parvient donc à retranscrire en animé la puissance d'acteurs aussi charismatiques que Bruce Lee ou Sonny Chiba. La dimension martiale du métrage prend alors toute sa valeur même si, bien évidemment, c'est ici l'action qui prime face à la philosophie des différentes écoles…

Aujourd'hui encore, malgré une esthétique accusant son âge et une simplification sans doute inévitable du récit, KEN LE SURVIVANT reste un film d'animation tout simplement hors normes. Riche d'une certaine intensité dramatique, d'une importante galerie de personnages et d'un héros inoubliable, le métrage de Toyoo Ashida s'impose comme un incontournable du film d'animation mais aussi du genre Post-apocalyptique. Mais pas seulement, car si KEN LE SURVIVANT évoque bien évidemment MAD MAX 2 dans sa forme (étendues désertiques, désolation, hordes de punks, etc...), c'est d'avantage du côté de Bruce Lee (mouvements, cris, stoïcisme, etc...) et de la série KUNG FU que le récit ira puiser une essence spirituelle et même philosophique sans lesquelles le succès n'aurait sans doute pas été le même. Devant une mixtion des genres aussi réussie, nous ne pourrons dès lors que pardonner une violence graphique virant nettement au grand-guignolesque et jouant quelque peu la carte de la surenchère aisée…

KEN LE SURVIVANT avait déjà connu les honneurs d'une sortie DVD en France au début de l'année 2003. Malheureusement, le résultat n'était pas des plus brillants et la copie, de piètre qualité, avait une grosse tendance à virer au rouge. L'éditeur AB Vidéo décide donc, cinq années plus tard, de redorer le blason de l'homme aux sept cicatrices. Une initiative fort bienvenue qui aboutie sur l'édition dite «Collector» chroniquée ici. Pour l'occasion, le classique boîtier DVD se voit glissé dans un fourreau cartonné plutôt agréable, faisant la part belle à Ken et à une giclée d'hémoglobine qui n'a rien de mensongère. L'esthétique de la jaquette s'avère en revanche plus douteuse mais se voit largement compensée par une reproduction d'un magnifique dessin promotionnel d'époque, visible une fois le boîtier transparent ouvert. Dans le dit boîtier, nous trouvons bien évidemment le disque mais aussi l'unique bonus de cette édition : Un livret de 32 pages en couleurs.

Son contenu nous permet de nous familiariser avec les différents personnages, l'univers de Ken et les créateurs du film. Nous noterons qu'en plus d'être joliment illustré, ce livret se montre parfaitement respectueux des noms originaux (non, le grand méchant ne s'appelle pas Raoul !). Mais le plus intéressant reste bien évidemment l'évocation, lors d'un court chapitre, de la fin alternative du métrage. Cette fin ne fut exploitée qu'au Japon et voyait l'affrontement final entre Raoh et Ken s'achever sur un «match nul». Concrètement, cette variante n'est qu'une «bidouille graphique» ajoutant simplement un personnage là où il n'apparaissait plus et superposant une image de ce même personnage debout alors qu'il était allongé. Rien de bien transcendant donc mais nous aurions aimé que le livret comporte une poignée d'images, voire une comparaison graphique entre les deux fins. Ce n'est malheureusement pas le cas et l'absence total de bonus sur le DVD ne risque pas de palier ce manque ! La bande-annonce d'origine aurait, elle aussi, été la bienvenue et un documentaire sur la restauration sans aucun doute réalisable mais que nenni : Le disque s'ouvre sur un menu des plus spartiates et n'offre que le simple choix du visionnage en version française ou en version originale sous-titrée. Pas l'ombre d'un menu de chapitrage ici, pas plus que d'un quelconque découpage du reste une fois le film lancé...

Les possibilités d'égarement dans les méandres du disque étant des plus réduites, intéressons-nous maintenant à la qualité de ce nouveau transfert, toujours proposé en 1.33 d'origine. Dès le premier coup d'œil, il est évident que la création d'un master haute définition a été des plus bénéfiques. La définition fait un monstrueux bond en avant, les contrastes se montrent bien plus puissants et, par-dessus tout, les couleurs éclatent enfin de manière naturelle. La colorimétrie douteuse et rougeoyante de l'édition précédente est donc vite oubliée pour un résultat largement plus convaincant et agréable… Malheureusement, tout n'est pas parfait et la copie utilisée pour ce nouveau disque n'est pas dénuée de défauts de pellicule. Les brûlures et autres griffures sont ici assez courantes et l'on regrette que la restauration n'ait pas été complète. KEN LE SURVIVANT n'a pas la richesse visuelle d'un film de Miyazaki mais l'on était en droit d'espérer une disparition quasi-totale des artefacts. Force est de constater que ce n'est pas le cas et qu'il est encore possible aujourd'hui de faire mieux… Ajoutons au sujet de l'image qu'elle apparaît comme très dégradée et ce de manière très régulière. Comme dit précédemment, il s'agit là d'une forme d'«autocensure» quelque peu hypocrite pratiquée à l'origine par la Tôei. Ce qui semble être un défaut n'est donc qu'une curiosité qui n'est en rien imputable à la copie que propose AB Video aujourd'hui. Le film est du reste présenté dans une version totalement «Uncut» et non censurée.

Sur le plan sonore, le spectateur aura donc le choix entre la piste japonaise d'origine et l'alternative française comme ce fût déjà le cas sur l'édition précédente. Notons pour commencer que le doublage français n'a pas été refait. Le bon côté de la chose, c'est que l'on retrouve la voix bien connue de Philippe Ogouz dans la bouche de Ken (entre autres). L'aspect plus litigieux, c'est bien évidemment que l'on n'a d'autre choix que de subir ponctuellement l'humour douteux du monsieur et de ses comparses… Voilà qui en ravira certains mais en déprimera d'autres. A ces derniers, nous suggérerons fort logiquement d'opter pour la piste japonaise, épaulés en cela par un sous-titrage en langue de Molière. Ce sous-titrage est de bonne qualité et, contrairement à l'édition précédente, se montre fidèle aux dialogues originaux et non à l'exotique doublage français. Notons par ailleurs que des sous-titres apparaissent, quelque soit l'option sonore choisie, lors du combat Rei/Raoh et lors du générique de fin. Les paroles des chansons «Heart of Madness» et «Purple Eyes» (respectivement en anglais et en japonais) deviennent dès lors compréhensibles de tous, ce qui n'était là encore pas le cas avec l'ancien DVD...

Techniquement parlant, l'option sonore japonaise se montre bien supérieure à sa consoeur française. La version originale est nerveuse, propre et rend agréablement justice à la puissance des altercations. Le doublage français, bien qu'encodé de la même manière sur deux canaux, est dans un mono d'origine proposant un résultat correct, dénué de parasitage mais indiscutablement plus plat, voire neutre. Quoiqu'il en soit, les deux options sont agréables à l'écoute et délivrent des dialogues clairs.

Terminons ce petit tour d'horizon en évoquant deux des soucis notables de l'édition précédente. Ainsi, après le combat final (à "1:36:30" précisément), la piste japonaise cédait la place à l'alternative française et ce en raison du fameux «problème» de la fin alternative. Mais le plus inquiétant était qu'une fois ce court dénouement achevé (à "1:38:35"), le film devenait définitivement muet sur une durée d'environ six minutes et trente secondes. Ces deux soucis sont totalement gommés de la très respectueuse nouvelle édition qui s'impose de fait comme celle à posséder.

Rédacteur : Xavier Desbarats
Photo Xavier Desbarats
Biberonné au cinéma d'action des années 80, traumatisé par les dents du jeune Spielberg et nourri en chemin par une horde de Kickboxers et de Geishas, Xavier Desbarats ne pourra que porter les stigmates d'une jeunesse dédiée au cinéma de divertissement. Pour lui, la puberté n'aura été qu'une occasion de rendre hommage à la pilosité de Chuck Norris. Aussi, ne soyons pas surpris si le bougre consacre depuis 2006 ses chroniques DeViDeadiennes à des métrages Bis de tous horizons, des animaux morfales ou des nanas dévêtues armées de katanas. Pardonnez-lui, il sait très bien ce qu'il fait...
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On aime
Un très bon film post-apocalyptique
Le livret de 32 pages
Les bugs de l’édition précédente enfin corrigés
Un bond en avant sur le plan technique
On n'aime pas
L’absence totale de bonus sur le disque
Un master encore perfectible
Pas de chapitrage
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L'édition vidéo
HOKUTO NO KEN DVD Zone 2 (France)
Editeur
AB
Support
DVD (Double couche)
Origine
France (Zone 2)
Date de Sortie
Durée
1h46
Image
1.33 (4/3)
Audio
Japanese Dolby Digital Stéréo
Francais Dolby Digital Mono
Sous-titrage
  • Français
  • Supplements
    • Livret (32 pages)
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