Header Critique : WOMEN BEHIND BARS (DES DIAMANTS POUR L’ENFER)

Critique du film et du DVD Zone 0
WOMEN BEHIND BARS 1975

DES DIAMANTS POUR L’ENFER 

Un vol de diamants par trois malfrats tourne mal. Le chef de bande tue ses complices, avant de se faire exécuter par sa compagne, Shirley (Lina Romay). La jeune femme est immédiatement incarcérée dans une prison, à la merci du sadisme de ses geôliers. Pendant ce temps, deux détectives essaient de retrouver la trace des diamants mystérieusement volatilisés.

WOMEN BEHIND BARS (alias DES DIAMANTS POUR L'ENFER) est l'un des nombreux films que tourne Jesus Franco en 1975. Coproduit par Eurociné et «écrit» par son directeur Marius Lesoeur, cette oeuvrette d'exploitation creuse le sillon du film de prison de femmes, sous-genre alors en vogue dans lequel Franco s'était déjà illustré avec (entre autres) 99 WOMEN, QUARTIERS DE FEMMES, BARBED WIRE DOLLS puis, plus tard, SADOMANIA. Titre confidentiel noyé dans le magma de pellicules que Franco impressionne à la chaîne à cette époque, WOMEN BEHIND BARS est pourtant remarqué par son sadisme et son érotisme lors de son exploitation en vidéo. Au point d'être consigné sur la fameuse liste noire des «nasties», qui recensait les films interdits en Angleterre pour cause de contenu jugé intolérable (on y trouve aussi bien EVIL DEAD de Sam Raimi, que l'odieux FACE A LA MORT de John Alan Schwartz). Si la plupart des «nasties» ont depuis été réhabilités en Grande-Bretagne, dans des versions parfois coupées, WOMEN BEHIND BARS fait encore à ce jour partie des titres restés interdits.

Cette sulfureuse présentation ne glorifie pas pour autant WOMEN BEHIND BARS. Car quelques minutes de film suffisent à débusquer une belle supercherie, totalement fauchée et improvisée à la vitesse de l'éclair. On nous promet un film de prison, mais Franco et ses producteurs ne possèdent pas de décors de pénitencier. L'action se déroule dans une maison bourgeoise à Nice, que le film essaie de faire passer pour un quartier de haute sécurité d'Amérique Centrale. Les «barreaux» du titre ne sont en fait que le grillage de la clôture du jardinet où batifolent nos prisonnières. Les autres «décors», comme la cellule ou le réfectoire, sont laissés tels quels, ce qui nous vaut un décalage surréaliste grotesque (le bureau du directeur est un salon de thé, la cellule des femmes est une chambre d'amis bardée de prises électriques refaites à neuf). En terme de narration, le film se contente d'improviser dans l'urgence. Tandis qu'une voix-off tente de paraphraser l'action en nous donnant quelques points de repères, les comédiens font ce qu'ils peuvent pour meubler les séquences sous les coups de zoom et les mises au point approximatives d'un chef opérateur n'ayant aucune idée de ce qui va se dérouler sur le plateau.

Jesus Franco n'est sûrement pas dupe de la pauvreté cinématographique de la chose qu'il met en boîte. Aussi, le metteur en scène prend un parti pris radical pour essayer de maintenir son spectateur éveillé : pousser l'érotisme au maximum. Son casting féminin passe le plus clair du film dénudé, souvent frontalement, et le cadreur n'hésite pas à zoomer au plus près de l'intimité broussailleuse des comédiennes. En résulte des plans à la limite de l'hommage à «L'origine du Monde» peint par Gustave Courbet. Outre les papouillettes saphiques entre détenues, Franco va bien évidemment mélanger l'érotisme à son sens bien connu du sadisme. Etranglement collectif en costume d'Eve, séance de fouet cul nu, WOMEN BEHIND BARS est surtout connu pour CETTE scène, sans aucun doute LA scène qui fit rentrer le métrage dans la liste des «nasties» : l'héroïne est torturée dans le plus simple appareil, des électrodes électriques étant enfoncées dans son vagin. Une séquence qui prête aujourd'hui plus à sourire devant l'amateurisme de son exécution et sa provocation naïve.

En toute objectivité, WOMEN BEHIND BARS est un film qui a été imaginé pour exploiter les miettes de BARBED WIRE DOLLS, à savoir l'équipe déjà réunie pour ce projet. Les comédiens rempilent massivement (Lina Romay, Martine Stedil, Roger Darton), les collaborateurs récurrents sont au rendez-vous (comme le compositeur Daniel White, qui signe d'ailleurs un joli thème), tout comme les petites habitudes (Franco se donnant comme de coutume un petit rôle). Une rumeur tenace accusait d'ailleurs Franco d'avoir monté WOMEN BEHIND BARS sur les chutes de montage de BARBED WIRE DOLLS (il faut bien avouer que certaines séquences «dénotent», comme la scène des coups de fouet se passant contre toute attente dans un semblant de décor de cellule). Une calomnie que Franco nie farouchement, affirmant pour noyer le poisson que WOMEN BEHIND BARS est de toute façon son film préféré de sa période «prison de femmes». Une déclaration étrange, qui se justifie plus par l'expérience de tournage du cinéaste que par le résultat final. En effet, Franco avoue avoir réalisé le film sans contrainte ni pression, à une époque où il découvrait sa nouvelle «muse», Lina Romay, qui deviendra sa femme jusqu'à aujourd'hui. Un témoignage touchant qui n'enlève malheureusement rien au rendu exécrable de l'œuvrette.

WOMEN BEHIND BARS était déjà disponible depuis quelques années chez un éditeur allemand. C'est au tour des Américains de Blue Underground d'ajouter le titre à leur catalogue. Malgré la confidentialité du film, le disque US est techniquement soigné. L'image, au format et anamorphosée, souffre juste par moments d'une stabilité un peu hésitante. La piste sonore unique est un mono en anglais assez clair dans son écoute. On regrette en revanche l'absence du doublage allemand et surtout français qui étaient présents sur l'ancienne édition européenne.

Outre la bande-annonce française, la section bonus donne la parole à Jesus Franco sur plus d'un quart d'heure. Grillant cigarette sur cigarette, l'homme rassemble ses souvenirs sur le film en livrant de nombreuses anecdotes personnelles sans pour autant cacher la démarche totalement improvisée de la production. Témoin d'une autre époque, les propos de Franco sont bien évidemment passionnants et rattrapent rapidement les 80 minutes poussives de WOMEN BEHIND BARS.

Rédacteur : Eric Dinkian
Photo Eric Dinkian
Monteur professionnel pour la télévision et le cinéma, Eric Dinkian enseigne en parallèle le montage en écoles. Il est auteur-réalisateur de trois courts-métrages remarqués dans les festivals internationaux (Kaojikara, Precut Girl et Yukiko) et prépare actuellement son premier long-métrage. Il collabore à DeVilDead depuis 2003.
48 ans
1 news
287 critiques Film & Vidéo
On aime
Une édition soignée avec une excellente interview
On n'aime pas
Un film fauché et improvisé, qui tente de faire passer la demeure niçoise de Tatie Jacqueline pour une prison de haute sécurité
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L'édition vidéo
DES DIAMANTS POUR L'ENFER DVD Zone 0 (USA)
Editeur
Blue Underground
Support
DVD (Double couche)
Origine
USA (Zone 0)
Date de Sortie
Durée
1h20
Image
2.35 (16/9)
Audio
English Dolby Digital Mono
Sous-titrage
  • Aucun
  • Supplements
    • Back Behind Bars : Interview de Jesus Franco (17mn05)
    • Bande-annonce
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