Nous sommes au début des années 1600 et les militaires hollandais viennent d'investir le territoire Indonésien, soumettant le pauvre peuple à un joug terrifiant. Fort heureusement, Samson veille… Etant jeune, ce fils d'une esclave ridée et d'un violeur hollandais dut compenser son faciès d'endive par une activité physique de très haut vol. Cet entraînement quotidien et, pour tout dire impensable, fit de lui un homme hors du commun, un monstre de puissance capable de briser sans le moindre effort des rochers à main nue. Alors que l'équilibre semblait atteint entre peuple opprimé et tyrans esclavagistes, ces derniers franchissent les limites du convenable en s'attaquant au village de Samson. Monumentale erreur qui va réveiller la bête de combat qui sommeillait en lui. Le héros idiot mais costaud devra donc, pour libérer ses pairs, braver ce que nul autre homme avant lui n'avait affronté…
LA REVANCHE DE SAMSON, c'est avant tout un récit historique… Le Peplum italien connût ses véritables heures de gloire durant les années 50, avant de décliner pour finalement pratiquement s'éteindre au milieu des années 60. Hercule, Ulysse, Maciste et leurs confrères musculeux eurent durant cette période bénie l'occasion d'affronter toutes sortes de créatures, allant du simple alligator au plus exotique des golems, à travers les siècles et sans réel souci de cohérence. Cette liberté historique dont firent preuve nos héros d'antan se trouve ici encore une fois mise à rude épreuve puisque c'est au début XVIIème siècle que ce Samson nouveau décide d'oeuvrer. L'action se situe donc en Indonésie, alors que celle-ci est colonisée par la Hollande et que la population locale est asservie par la force. En ce temps là et si l'on en croit le film, les jeunes Indonésiens vêtus de short à bandes lapidaient gaiement leurs camarades au teint pâle. C'est donc dans ce climat pour le moins tendu que notre héros blafard apprendra devant nos yeux ébahis à devenir grand, fort et terriblement souriant...
Car LA REVANCHE DE SAMSON, c'est aussi un magnifique hommage au charme et à la puissance. Ainsi, tout comme ses camarades Gordon Scott, Steve Reeves ou encore Lou Ferrigno, Paul Hay fût tiré d'une salle de musculation pour venir casser de l'envahisseur. L'homme au palmarès athlétique complet –quoique risible- (il fût Monsieur Australie aux trois coins du continent) se lança donc dans l'aventure cinématographique en 1987 pour notre plus grand plaisir. Totalement inexpressif, étonnamment juvénile et tout simplement laid, l'homme nous offre en toute modestie ce qui pourrait bien être l'une des pires prestations jamais observées à l'écran. Alors qu'il semblait donc promis à un avenir des plus enthousiasmants, ce monstre de sensualité sera stoppé net dans ses élans et privé d'occasion de récidiver, rendant ce rôle de Daman/Samson unique à bien des égards…
Pour s'accoquiner avec cet aimable laideron, le réalisateur terriblement malsain Sisworo Gautama Putra décide de transformer l'actrice Suzzanna en une grande et séduisante princesse. Manque de chance, la demoiselle (qui terminera sa carrière sur ce film) se situe aux antipodes de ce que l'on pourrait espérer d'un tel rôle. Irascible et vulgaire, elle incarne ici la fille asiatique du gouverneur hollandais, celle qui tombera sous le charme bestial de Daman et le rebaptisera «Samson» pour les besoins mercantiles du métrage. La plupart des autres rôles, à l'image de ce gouverneur à la fausse moustache impressionnante, seront interprétés par de piètres acteurs au curriculum vitae cinématographique étrangement vide ou fort peu flatteur…
Mais LA REVANCHE DE SAMSON, c'est aussi une bien belle brochette de créatures et d'ennemis hauts en couleur. Le premier rival de Samson sera ainsi une vache. Bien évidement placide et pour tout dire maigrichonne, la pauvre bête sera perçu par l'illuminé Samson comme une menace nécessitant une intervention rapide et musclée. L'animal qui ne réclamait alors qu'un simple droit de broutage sur un carré d'herbe brûlée sera ainsi malmenée par notre héros au point de finir les quatre fers en l'air des suites d'un magistral «ippon-seoi-nage». Cette scène offre bien entendu tout loisir au réalisateur d'user d'effets clippés, de cornes en plastiques et de plans accélérés simulant avec ingéniosité la frénésie du combat engagé. Spectacle étourdissant et euphorisant nous offrant au passage quelques étranges gros plans sur l'anus de la bête sauvage…
Quelque peu intrigué par cette étonnante altercation, c'est donc avec une impatience non feinte que le spectateur de bon goût se languira de connaître le prochain rival de Samson. Celui-ci ne tardera pas à se matérialiser sous la forme d'un mercenaire cyclope. L'œil charmeur du monsieur ne manquera pas de conquérir son public et c'est avec entrain que l'aberration de la nature part éliminer le culturiste chevelu. Là encore, Samson imposera sans mal son point de vue définitivement rebelle et anéantira la créature avide de sang. Car du sang, il y en aura. Ce cyclope de carton pâte marque en effet l'arrivée dans le film des premiers effets gores qui éclaboussent. Du gore maladroit à base de papier mâché et d'encre rouge bien évidement mais du gore tout de même… Dès cet instant, les ennemis et situations s'enchaîneront, rivalisant d'ingéniosité et nous offrant par exemple un sage en pièces détachées aux capacités physiques fort respectables. L'homme peut ainsi être découpé à loisir sans qu'aucune grimace de douleur ne vienne entacher son faciès rigolard. Mieux encore, une fois ses jambes libérées du poids inutile de son buste, celles-ci peuvent continuer de se montrer agressives en distribuant frénétiquement quelques coups de pieds bien sentis. Régulièrement mis à mal, notre héros n'obtiendra finalement de réconfort que dans les bras de son aimante potiche, la princesse Delilah…
Car LA REVANCHE DE SAMSON, c'est aussi une dose respectable d'érotisme classieux. Il va de soi que lorsqu'un couple dégage autant de charisme que nos deux nouilles, tout bon réalisateur se doit de les mettre en scène de la manière la plus torride qui soit. C'est ainsi que le spectateur aura droit à deux scènes réellement marquantes. La première, sorte de préliminaire ludique, nous montrera à quel point Samson sait y faire avec la gent féminine. Alors qu'ils sont seuls sur la plage, notre héros au cœur tendre prend sa bien aimée dans ses bras aux muscles bandés. La houle s'abat sur le sable et c'est alors que notre homme décide de lâcher sa belle, tout simplement. La princesse à la coiffure improbable s'écrase bien évidement mollement sur le sol en hurlant de tout son souffle. Amusé, Samson entreprend alors de la rouler encore et encore dans le sable humide, la réduisant de fait à l'état de vilain pâté granuleux échoué sur la côte… Manifestement satisfait de cette première expérience, notre héros benêt quitte alors sa douce pour de nouvelles aventures…
La seconde expérience du couple repousse cette fois les limites du sexuellement acceptable. Assis face à face, nos amoureux s'observent. Plagiant honteusement NEUF SEMAINES ET DEMI, Samson saisit délicatement une banane qu'il pèle de ses doigts boudinés. L'excitation est bien entendu à son comble lorsqu'il la fourre dans la bouche de sa partenaire avec un mouvement de va-et-vient d'une sensualité rare. Une fois le fruit réduit à l'état de bouillie, l'homme au tact indéniable donne l'ordre à sa moitié de tirer la langue. Celle-ci s'exécute et se voit alors aspergée de miel au point que son visage ne semble plus être qu'un masque tiré de LA MAISON DE CIRE. Après avoir souillé son visage et brûlé sa gorge, le culturiste ordonne qu'elle écarte les cuisses. Là encore, elle obtempère et là encore, le châtiment est immédiat : Un bon litre de miel vient s'écouler sur l'intérieur ô combien sexy des jambes de cette compagne décidément très ouverte… Rarement séquence «érotique» aura été aussi surprenante, graveleuse et pour finir, hilarante. Le mauvais goût qui semble régner sur l'ensemble du métrage prend ici une dimension totalement hors normes et pour tout dire, quasiment sans limites.
LA REVANCHE DE SAMSON ne s'arrête pourtant pas là et offrira au spectateur avide de folie visuelle et d'incompétences filmiques bien plus de satisfaction qu'il n'en espérait. Entre dialogues grotesques et scènes abominablement ridicules viendront se caler en vrac une séquence de torture qui réjouira notre héros masochiste, de multiples bruits d'impacts alors qu'aucun coup n'est porté et une guérisseuse dévoilant sa poitrine horriblement brûlée pour faire recouvrer la vue… Impossible de parler de maladresse : LA REVANCHE DE SAMSON souffre bel et bien d'un phénomène d'incompétence aigue généralisée à l'ensemble de l'équipe, qu'ils soient devant ou derrière la caméra. Le niveau déplorable des effets spéciaux, des acteurs, des dialogues et du scénario sont tels que LA REVANCHE DE SAMSON parvient sans mal à se hisser au panthéon des ratages absolus. Une distinction généralement source de révolte qui, dans le cas présent, révèle avant tout une pièce maîtresse du comique involontaire…
Cette véritable expérience qu'est LA REVANCHE DE SAMSON méritait donc d'être découverte sur support numérique. C'est aujourd'hui chose faite grâce à l'éditeur F.I.P. qui nous propose de découvrir le film pour une somme bien souvent inférieure à l'euro symbolique. Proposé en 4/3 au format 1.85 d'origine, le DVD nous offre une image franchement laide, fade, sale et de plus assez mal encodée. La piste sonore se montre de son côté étouffée mais suffisamment claire pour permettre de profiter de l'envoûtante bande originale réalisée avec un synthétiseur à trois touches. La piste d'origine n'est en outre pas proposée. Une grave erreur qui nous obligera à opter pour un doublage Français mono à l'image du film : Désastreux. Un ensemble homogène en somme qui se verra agrémenté d'une fiche de film à l'intérêt plus que douteux et de quatre maigres bandes annonces. Parmi ces dernières, nous noterons la présence peu recommandable de celles de l'épouvantable GALAXIS (renommé STARFORCE pour l'occasion) et du très ennuyeux CHAINED HEAT. Une édition donc très limitée, qui ne vous permettra que de découvrir un film mariant l'envoûtant et le repoussant comme nul autre.
LA REVANCHE DE SAMSON, c'est une femme qui se balade avec une paire d'yeux en plastique dans sa poche. A plusieurs reprises, de mauvais seconds rôles lui adressent la parole et lui disent «Mais… On ne peut pas redonner la vue comme cela…». Obstinée, la femme répond sans cesse «C'est d'la magie». Et ça marche. Malgré son mauvais goût constant, sa laideur globale et son idiotie permanente, LA REVANCHE DE SAMSON ne manquera pas de provoquer la stupeur, l'envie d'en découvrir toujours plus et, bien entendu, de nombreux fou rires. Le pire du cinéma devient alors une petite perle, un DVD que l'on est fier de sortir de sa poche et dont on parle avec amour. Et ça, «C'est d'la magie».