Au Japon, une escouade de la force de défense du territoire traverse un étrange phénomène qui les transporte plusieurs centaines d'années en arrière en plein milieu des guerres féodales. Avec peu de chances pour qu'ils soient ramenés à leur époque, ils doivent prendre la décision de prendre parti ou non dans les conflits qui les entourent.
Kadokawa Shoten est l'une des plus grosses compagnies de publication japonaise fondée par Genyoshi Kadokawa. A sa mort, son fils reprend les rênes de l'entreprise et décide de multiplier les activités en se lançant dans le cinéma. Une grande part des métrages qui entrent en production se base au passage sur des livres publiés par Kadokawa Shoten. C'est le cas des GUERRIERS DE L'APOCALYPSE tiré du livre «Sengoku Jieitai» de Ryo Hanmura datant du début des années 70. Un projet très ambitieux qui trouve un interprète de choix ainsi qu'un savoir faire en matière de cinéma d'action avec Sonny Chiba. L'acteur est alors une star du cinéma japonais qui a d'ailleurs fondé à la fin des années 60 le «Japan Action Club» en vue d'entraîner des acteurs et actrices pour qu'ils soient crédibles physiquement à l'écran lors des séquences d'action. Paré de ce gage de qualité, la production fait appel à la force de défense du territoire puisque le film nécessite des troupes militaires et de l'équipement. Malheureusement, il faut faire face à un refus en raison du contenu du film qui ne montre pas les soldats sous leur meilleur jour.
Sans l'aide militaire, la production décide de continuer mais les ambitions du projet en prennent un coup. Le livre original présentait beaucoup plus de soldats et de blindés sur le terrain. Finalement, le film n'aura le droit au sol qu'à un seul char d'assaut, un véhicule blindé et une jeep sans compter un hélicoptère et un bateau. Et il faudra user d'ingéniosité car ne pouvant pas prétendre mettre la main sur un véritable char, on en construit un tout comme il sera fait de même pour la plupart du matériel contemporain. Pour l'aspect médiéval, ce sera déjà plus facile puisqu'il suffira de piocher dans les réserves de costumes et accessoires des studios Toho et Toei. L'affrontement anachronique est alors en bonne voie…
La réalisation du film est confiée à Mitsumasa Saito qui ne fait pas preuve d'un grand génie mais dès qu'il est question de mettre en image des combats, c'est le «Japan Action Club» et Sonny Chiba qui prennent le relais. Il en résulte à l'écran des affrontements dantesques entre d'un côté un armement contemporain et de l'autre des vagues humaines de soldats armés de lances, de sabre ou d'arcs. L'aspect jouissif du film réside en grande partie dans cette idée délirante, mais oh combien géniale, de mettre face à face des troupes d'époques différentes. LES GUERRIERS DE L'APOCALYPSE bénéficie en plus d'une figuration importante à même de retranscrire de façon spectaculaire ce choc militaire hors du commun. On reconnaîtra d'ailleurs Hiroyuki Sanada, issu du «Japan Action Club», en téméraire samouraï qui se lance à l'assaut de l'hélicoptère avant de faire une impressionnante chute, sans trucage, sur des banderoles.
Mais LES GUERRIERS DE L'APOCALYPSE s'arrête tout de même pour se questionner vaguement sur les implications que pourraient avoir la modification du passé sur l'avenir. Pas très longtemps à vrai dire puisque le film préfère dresser le portrait de ses personnages principaux. Bien entendu, le plus intéressant n'est autre que Iba interprété par Sonny Chiba. Dans le présent, il est un militaire un peu inutile puisqu'il n'y a aucun combat à mener. De fait, alors que la plupart de ses hommes ont une motivation pour retourner à leur époque, il est le seul à trouver séduisant qu'on lui donne l'opportunité de combattre et de remporter une victoire militaire. On pourrait être tenté de faire un rapprochement avec ce personnage qui tenterait en quelque sorte de retrouver une part de fierté perdue par l'empire du soleil levant à la fin de la Seconde Guerre Mondiale mais il ne faut probablement pas voir forcément un message politique dans le film même si les valeurs guerrières sont très présentes.
Lorsque le film a été distribué en France au début des années 80, ce fut un petit choc mais les vingt cinq années qui se sont écoulées depuis ne jouent pas en sa faveur. Précisons aussi que le film était sorti dans une version raccourcie d'environ quarante minutes tout comme aux Etats-Unis sous le titre de TIME SLIP ou G.I. SAMURAI. Le DVD américain propose cette fois une copie japonaise intégrale, et seuls les souvenirs de l'époque permettent de cerner ce qui avait pu être coupé dans la version sortie en France. Quelques flash-backs sont apparus mais ils ont bien du mal à totaliser les quarante minutes fantasmée depuis des années. Il se pourrait qu'il s'agisse de l'épisode avec les déserteurs sur le bateau qui soit apparu mais difficile à dire ! Plus étonnant, la musique est pour le moins le plus souvent à côté de la plaque et il faut parfois se taper des passages très clippés sur fond de soupe rock. Encore une fois, le souvenir de la vision du film dans les années 80 ne ramène pas un tel souvenir.
LES GUERRIERS DE L'APOCALYPSE a pas mal de points faibles mais il ne faudrait pas non plus occulter ses qualités. Ainsi, toute l'histoire féodale est bien mise en valeur tout comme l'amitié qui réunit Iba et son alter-ego du seizième siècle. Et bien entendu, l'énorme bataille de plus de trente minutes, point d'orgue du film, reste encore aujourd'hui très spectaculaire même si les prises de vues semblent un peu datées en comparaison avec ce qui se fait aujourd'hui. Et il n'est pas possible de passer sous silence NIMITZ, RETOUR VERS L'ENFER qui raconte une histoire assez similaire. L'approche d'un même sujet diffère complètement dans leur traitement. Les Américains ont préféré occulter les combats pour offrir un débat philosophique alors que les Japonais n'hésitent pas à céder à l'appel des batailles surréalistes. Pour le coup, le film ne suscite aucune frustration et mène à un final bien plus pessimiste !
Adness édite aux Etats-Unis une collection Sonny Chiba et réutilise directement du matériel japonais plutôt que de recycler les vieux masters fatigués qui traînent sur place. L'éditeur s'assure au passage de bénéficier des version intégrales des films. L'image de G.I. SAMURAI souffre de l'apparition de petits défauts de pellicule durant toute sa durée. Toutefois, le transfert 16/9 (format 1.77) est plutôt bien défini et les différences notables en fonction des plans en ce qui concerne la netteté sont certainement d'origine. Le disque n'offre pas des couleurs pétantes mais encore une fois il s'agit certainement d'un choix dicté par la photographie d'origine.
Une seule piste sonore est offerte et elle est en mono. Ce qui est très gênant puisqu'un tel film aurait grandement tiré parti d'une piste sonore techniquement plus évoluée mais bien plus parce que la bande-annonce, sur le DVD, parle fièrement d'une piste sonore en quatre canaux stéréo. A la décharge de Adness, le DVD japonais édité par Kadokawa serait lui aussi proposé en simple mono codé sur deux canaux comme c'est le cas ici.
Les suppléments sont vite vus puisqu'ils se résument aux bandes-annonces des titres de la collection Sonny Chiba. On peut donc y retrouver celles des GUERRIERS DE L'APOCALYPSE. Un peu plus informatif, le boîtier du DVD contient un petit dépliant qui offre des notes de production distillant quelques anecdotes et ajoute qu'un remake plus spectaculaire serait en préparation pour 2005.
La réputation des GUERRIERS DE L'APOCALYPSE avait enflé depuis que la cassette vidéo se soit volatilisé des vidéo clubs français et des boutiques il y a pas mal d'années déjà. Le souvenir s'était donc embelli au fur et à mesure des années et il est difficile de ne pas exprimer une petite déception en redécouvrant aujourd'hui le film. Mais une fois ce sentiment avalé, il ne faudrait pas oublier que ce disque permet aujourd'hui de revoir ce film mais aussi de le découvrir dans sa version intégrale !
