Un an après l'énorme succès de KRIMINAL (réalisé par Umberto Lenzi), Fernando Cerchio fut engagé pour réaliser la séquelle directe, IL MARCHIO DI KRIMINAL (littéralement «La marque de Kriminal»). Vieux routier du cinéma populaire qui a commencé sa carrière en 1940, il est resté célèbre pour ses films réalisés avec le comique italien Toto, une adaptation médiocre du Vicomte de Bragelonne avec Georges Marchal mais également quelques péplum de la belle époque (NEFERTITI, REINE DU NIL, LA VALLEE DES PHARAONS, APHRODITE DEESSE DE L'AMOUR).
KRIMINAL est adapté de la BD éponyme de Max Bunker. Les bandes dessinées italienne (nommée fumetti) des années 60 faisaient d'ailleurs la part belle aux criminels en tous genres et furent portée sur le grand écran à plusieurs reprises (DANGER : DIABOLIK, réalisé par Mario Bava, mais également SATANIK de Piero Vivarelli). La particularité de Kriminal : s'habiller d'un costume moulant qui ressemble à un squelette pour perpétrer ses activités (vols, meurtres, etc…)
Pour cette séquelle, on prend les mêmes acteurs principaux et on recommence. Kriminal (Glenn Saxson) et sa complice tiennent une maison de repos à Londres. Ils provoquent la mort de leurs pensionnaires afin d'escroquer les assurances. Ils tombent par hasard sur une statuette de Bouddha contenant un morceau de carte d'un trésor fabuleux et se mettent à la recherche des pièces manquantes éparpillées à travers le monde. L'inspecteur Morlan (Andrea Bosic), croyant Kriminal emprisonné à Istanbul, commence à se douter de quelque chose.
Par contre, le spectateur ne doute plus. En changeant de réalisateur, il n'y gagne pas forcément au change : Moins de budget, moins d'action, moins de cascades, un rythme plus languissant tout en gardant l'humour noir. Kriminal est toujours un criminel vu, à l'instar de la BD, de manière un peu glamour et l'inspecteur de police à sa poursuite est assez idiot. Le ridicule n'est pas aussi clair que dans KRIMINAL, mais le chemin fut tout tracé.
D'un point de vue formel, il reprend de l'original la mise en scène de cases BD qui prennent vie et vice-versa, afin de rappeler l'origine du matériau (ce qui a été repris maintes fois depuis : récemment dans TANK GIRL, par exemple). Le format Scope y est utilisé pour la forme mais sans génie particulier, ce qui est un comble surtout sur le site de Baalbek où ont été tourné les scènes finales. Fernando Cerchio se contente de filmer tranquillement les aventures de son anti-héros, surtout sans forcer la marche. Il faut dire qu'il n'est pas aidé par un scénario qui s'éloigne curieusement des activités plus mouvementées (et plus violentes) du premier opus. Il s'agit ici d'un spectacle plus familial, suivant une mode à la James Bond tout en visitant au passage quelques pays (Liban, Turquie, Grande Bretagne..).
Essayant de surfer sur une vague de cinéma populaire à la croisée des chemins (on pense non seulement à la BD d'origine mais aussi aux sous-James Bond, à Fantomas…) le film rate peu à peu ses cibles. Mais un humour noir bienvenu, qu'il soit dans les répliques ou dans le visuel, sauve de la torpeur
Les acteurs ont la part belle et c'est grâce à eux que le film s'en tire à bon compte. Glenn Saxson (acteur hollandais qui a connu son heure de gloire en Italie tout en produisant quelques bandes sexy) joue de sa mine de beau gosse et balance quelques répliques bien senties (même quand il tue de jolies filles). Il a l'air de bien s'amuser, entre déguisements, cascades, séduction de donzelles et bagarres. Les femmes ne sont pas en reste : d'Helga Line (actrice allemande devenue pilier du bis espagnol) à Franca Dominci, elles sont pétillantes, alertes et affublées de costumes 60's affriolants (et totalement ridicules).
Pulp Video, déjà éditeur du premier volet, n'a pas fait de miracles ici malgré une jaquette des plus attractives. La copie du film demeure relativement moyenne. Certains plans de Londres semblent flous et les changements de bobines se voient à coups de rayures, griffures diverses environ toutes les vingt minutes. Ceci dit, la rareté du produit explique certainement cela : il n'arrive cependant pas à la hauteur de la qualité de l'original.
Le remixage en 5.1 s'avère (comme il est souvent le cas en Italie) inutile : hormis la musique swinguante de Manuel Parada (qui ne reprend hélas pas le thème original), les dialogues s'éparpillent dans les canaux et du souffle apparaît régulièrement. Divisé en seize chapitres, le menu animé offre une originalité plaisante en jouant sur le thème des cases BD (avec en fond sonore le thème du premier KRIMINAL). A noter que la présentation du menu est similaire au DVD du premier KRIMINAL. Seule une version italienne (et des sous-titres italiens) est disponible. La jaquette indique 88 minutes mais la durée du film sur le DVD est en fait de 85.
Côté bonus, on se retrouve en plein désert de Baalbek. Une biographie de Fernando Cerchio et une filmographie (très) sélective défilent à l'écran sans qu'on ne puisse les arrêter : énervant.
Cette coproduction italo-espagnole est inédite partout en DVD et ce disque italien reste, pour le moment, le seul moyen de visionner ce rare témoin d'une certaine idée du cinéma populaire tentant de croiser les genres.