Kah, un tyran chinois, se rend en Transylvanie pour y demander l'aide de Dracula. Plutôt que lui rendre cette faveur, le vampire prend la place de Kah et part pour l'Asie où il fera régner la terreur sur une petite région chinoise. Dans sa tâche, il sera aidé par des vampires locaux. Un siècle plus tard, en 1904, le professeur Van Helsing est justement en Chine pour découvrir la vérité sur la légende des sept vampires d'or…
LES SEPT VAMPIRES D'OR est certainement l'une des productions les plus étranges qu'aient pu entreprendre la Hammer Films. Dans le courant des années 70, la Hammer Films est en perte de vitesse et continue à se chercher alors que les effets sanglants et l'érotisme ne suffisent plus vraiment. Dans le même temps, Bruce Lee est devenu une star en Asie grâce à BIG BOSS et le cinéma d'arts martiaux a le vent en poupe. Pour finir d'enfoncer le clou, OPERATION DRAGON, justement une coproduction entre Hong Kong et un pays occidental, rencontre un succès international sans précédent pour ce type de film. De son côté, l'Asie a toujours fait un accueil favorable aux métrages horrifiques de la Hammer. Voilà qui donne un terrain d'entente pour la maison de production britannique et la Shaw Brothers, studio légendaire de Hong Kong.
Pour Michael Carreras, il n'est pas pour autant question de réaliser un nouveau Dracula compte tenu des résultats décevants de DRACULA 73 et DRACULA VIT TOUJOURS A LONDRES. Sans oublier que Christopher Lee n'a aucunement envie de rempiler après qu'on lui ait déjà forcé la main pour reprendre le rôle à moins qu'on ne lui propose, enfin, un scénario qui trouve grâce à ses yeux. Pourtant, la Shaw Brothers demande expressément l'apparition de Dracula dans le film. Michael Carreras n'aurait, paraît-il, même pas proposé le rôle à l'acteur surtout qu'il confie l'écriture à Don Houghton qui a déjà signé ceux des deux films déjà cités mettant en scène le personnage. Le projet est si pressé qu'on demande au scénariste d'assembler tous les éléments, les vampires à la Hammer et les arts martiaux, le plus rapidement possible. Il rendra une première copie sous les quinze jours qui ne sera pas du goût de Roy Ward Baker qui en demandera régulièrement des réécritures.
Mais le réalisateur Roy Ward Baker n'est pas au bout de ses surprises puisqu'il se retrouve dans les studios de la Shaw Brothers pour tourner un film dans des conditions auxquels il n'est pas vraiment habitué. Habitué à tourner à l'anglaise en son direct, il est confronté à des studios qui ne sont absolument pas insonorisés. A son arrivée, on ne lui a même pas mis à sa disposition une équipe locale de techniciens rodés aux scènes de combats d'arts martiaux. Bien qu'il soit en désaccord avec Don Houghton sur le scénario, ce dernier lui sera quand même utile puisqu'il assure la coproduction du film avec Vee King Shaw. Certains problèmes sont résolus, d'autres persistent ou apparaissent au fur et à mesure. L'expérience sera déplaisante pour le réalisateur mais aussi les acteurs dont Peter Cushing surtout lors des scènes tournées en extérieur à Shenzhen. Cela n'empêchera pas Peter Cushing d'apparaître dans SHATTER, un thriller à base d'arts martiaux, deuxième et dernier effort commun entre la Hammer Films et la Shaw Brothers.
L'un des intérêts d'une coproduction avec la Shaw Brothers est évident à la vision des SEPT VAMPIRES D'OR. La Hammer Films, en plus d'offrir des combats d'arts martiaux, obtient aussi des moyens de production bien plus développés que ceux auxquelles elle est habituée en Angleterre. Par exemple, plusieurs passages du film mettent en scène un très grand nombre de figurants, 200 paraît-il, pour des batailles rangées alors que des décors variés et souvent fastueux permettent de renouer avec la grande époque de la maison de production anglaise. Avec un Peter Cushing, à l'énergie débordante, il s'agit là des points forts du film. Mais tout cela ne masque pas vraiment un récit parfois très incohérent. Ainsi, on notera les bizarreries les plus flagrantes comme les cent années qui s'écoulent après le départ de Dracula ce qui n'affecte en rien l'âge de Van Helsing. On notera aussi le fait que sur les sept vampires annoncés par le titre, il y en a seulement six ce qui est expliqué, il est vrai, dans l'histoire !
Puisque Christopher Lee ne reprend pas le rôle de Dracula, il faut bien qu'un acteur l'assume. Roy Ward Baker avait déjà dirigé dans un rôle de vampire John Forbes-Robertson, dont le personnage planait mystérieusement sur THE VAMPIRE LOVERS, et il se retrouve donc mal en point dans LES SEPT VAMPIRES D'OR. En effet, l'acteur est grimé de façon pour le moins ridicule ce qui apparaît comme le choix le plus étrange et incompréhensible de ce film. Conscient que le personnage de Dracula est relié à Christopher Lee, l'acteur est astucieusement remplacé au bout de quelques minutes par une autre incarnation ce qui limite de fait son temps de présence à l'écran. Ce n'est donc certainement pas Dracula la créature centrale du film qui est ici éclipsée par des vampires très différents de ceux vus habituellement dans les films de la Hammer. Ils sont six aidé de plus par des morts-vivants qui s'extraient du sol pour former une armée d'outre-tombe et sautillante. Si ce dernier détail semble incongru, il s'avère en fait une touche plus ou moins respectueuse du folklore chinois. D'ailleurs, on retrouvera des morts-vivants bondissants aux visages parfois très proches dans la série des MR VAMPIRE initiée dans les années 80 à Hong Kong.
La Golden Harvest a Bruce Lee et la Shaw Brothers entend bien lui trouver un substitut et, parmi ceux-ci, il y a David Chiang Da Wei. Déjà une personnalité établie du cinéma d'action à Hong Kong, notamment grâce à plusieurs films mis en scène par Chang Cheh, l'acteur ne connaîtra pas la même renommée que Bruce Lee. L'actrice Julie Ege donne une autre facette au melting-pot international du casting. Ancienne Miss norvégienne, elle se plaindra d'ailleurs qu'on ne lui ait pas donné un rôle plus développé. Etrangement, le film dénude de nombreuses figurantes chinoises mais n'essaye pas de déshabiller Julie Ege dont les talents d'actrice très limités étaient bien mieux mis en valeur dans CREATURES THE WORLD FORGOT, toujours pour la Hammer, où elle dévoilait plus largement ses charmes. Enfin, Robin Stewart incarne assez platement le fils de Van Helsing…
Finissons par la musique qui est composée par James Bernard. Le musicien signait là sa dernière partition pour la Hammer Films à destination des cinémas, en réutilisant son fameux thème employé sur LE CAUCHEMAR DE DRACULA, premier film de la série, mis en scène par Terence Fisher. Si les quelques timides essais musicaux de mixité asiatique sur le générique sont loin d'être du meilleur effet, le reste de la partition de James Bernard est un sans faute.
LES SEPT VAMPIRES D'OR ne peut pas vraiment être considéré comme un film d'épouvante ou d'horreur classique. Il est en fait bien plus proche d'un film d'aventures ce qui était dicté inévitablement par l'étrange idée de mêler le gothique européen avec l'action chinoise. L'histoire donne même l'impression de lorgner vers des classiques dont le nombre inscrit dans le titre renforce le souvenir. En quelque sorte, LES SEPT VAMPIRES D'OR est une sorte de variation vampirique des SEPT SAMOURAIS ou de son remake LES SEPT MERCENAIRES. Un village est assailli et pillé par des brigands, ici des vampires qui enlève des femmes, avant que l'on ne cherche une aide extérieur pour mettre un terme à ces attaques. Le film de Roy Ward Baker inclut même tout un passage où les protagonistes se retranchent dans le village en attendant une attaque rangée qui se termine par l'aide des villageois. En terme d'horreur et d'épouvante, le film est plutôt vide si l'on excepte quelques giclées sanglantes et effets gores bien anodins dans les nombreuses batailles que comptent le film. Certaines sont d'ailleurs parfois parachutées là artificiellement mais participent au rythme soutenu de l'histoire.
Lorsque Run Run Shaw découvre le montage final de Roy Ward Baker, il considère que le film n'est pas au point et qu'il n'y a pas encore assez d'arts martiaux pour le marché asiatique. Le producteur chinois décide de tourner de nouvelles séquences pour aboutir à un nouveau montage auquel il est donné, le plus souvent, le titre de DRACULA AND THE SEVEN GOLDEN VAMPIRES. Toutefois, il existe une troisième version du film qui date de la sortie tardive en 1979 aux Etats-Unis. Le petit distributeur indépendant, Dynamite Entertainment, ayant décidé de couper le film d'une bonne dizaine de minutes, d'organiser un remontage mais aussi d'assurer un nouveau doublage pour ce qui deviendra THE SEVEN BROTHERS MEET DRACULA. Le DVD français ne propose ni la version étendue pour le marché asiatique par la Shaw Brothers, et encore moins la version courte américaine, mais bel et bien le montage européen de Roy Ward Baker.
Le disque édité par Warner offre un très joli transfert qui affiche les couleurs franches et tranchées des SEPT VAMPIRES D'OR. La copie n'est pas exempte de défaut puisque l'on notera pas mal de petits défauts de pellicule qui ne sont en rien un frein au plaisir de voir le film. Le format large est respecté (2.35) et offre l'option du 16/9. Parmi les diverses langues offertes, on retrouvera la version originale anglaise sur laquelle on peut afficher un sous-titrage ainsi que le doublage français. Les pistes sonores sont en mono d'origine et ne comportent pas de véritable défaut. Toutefois, il est à noter que la version française pose un souci. En effet, une séquence du film est en chinois dans la version anglaise. A ce moment là, un sous-titrage anglais brûlé sur la pellicule est affiché. Impossible de le retirer mais il est tout de même sous-titrer en français (si vous regardez le film en anglais, bien entendu !). Mais le doublage français original occultait la langue chinoise pour obtenir une scène entièrement en français. A partir de là, la vision du sous-titrage anglais est assez incongrue mais impossible de le retirer !
Le DVD des SEPT VAMPIRES D'OR ne s'offre absolument aucun supplément. Pas même une bande-annonce, une filmographie ou même un bout de texte explicatif. Cela paraît bien pauvre mais on se consolera avec un petit prix de vente pour ce disque produit pour le marché européen. Une occasion de découvrir cette production atypique dans le paysage cinématographique de la Hammer Films.