TRANSMUTATIONS se base sur un scénario co-écrit par l'écrivain Clive Barker, d'après une histoire originale qu'il a spécifiquement écrite pour ce long-métrage, à la demande du réalisateur George Pavlou. L'auteur britannique avait déjà flirté avec le monde du cinéma dès les années 1970 en réalisant deux courts-métrages : SALOME et THE FORBIDDEN. Mais TRANSMUTATIONS est sa première expérience dans le cadre d'une œuvre aussi ambitieuse, destinée à une exploitation en salles. C'est aussi la première fois que Pavlou dirige un long métrage, même si il a déjà travaillé, auparavant, sur des publicités et des films courts. Production modeste, TRANSMUTATIONS met pourtant en scène quelques comédiens britanniques bien connus des cinéphiles, comme Steven Berkhoff (BARRY LYNDON, RAMBO II...) dans le rôle d'un gangster, Denholm Eliott (LES AVENTURIERS DE L'ARCHE PERDUE, UNE FILLE POUR SATAN...) en savant fou, ou Ingrid Pitt (THE VAMPIRE LOVERS, COMTESSE DRACULA...) en mère maquerelle.
Motherskille, un gros bonnet de la pègre, demande à Bain de l'aider à retrouver Nicole, une prostituée qui a été kidnappée, en pleine nuit, dans le bordel de Pepperdine. Bain, ancien amant de Nicole, découvre que celle-ci prenait une nouvelle drogue mise au point par un certain Savary. Il comprend aussi que la jeune femme a été enlevée par une communauté d'humains difformes, qui vivent cachés dans les souterrains de la ville et sont tous accrocs à la drogue de Savary...
Cocktail étonnant, TRANSMUTATIONS brasse les genres et les influences avec une originalité certaine. Ainsi, le récit mêle l'ambiance d'un Film Noir à des éléments venant du film de gangster, tout cela étant rehaussé d'éléments fantastiques dans la pure tradition de la science-fiction. Ainsi, Savary s'inscrit dans une longue lignée de savants fous créant, par leurs travaux, des monstres hideux, comme dans L'ILE DU DOCTEUR MOREAU et consorts... Qui plus est, le film bénéficie d'un travail visuel fort, aboutissant à une stylisation appuyée. Les éclairages expressionnistes sont ainsi dans la veine du Film Noir classique, mais aussi, par leur approche de la couleur, dans celle des films d'épouvante que Pavlou citent alors comme ses références (HURLEMENTS de Joe Dante, SUSPIRIA et INFERNO de Dario Argento...).
Outre l'originalité de son propos et de son style, TRANSMUTATIONS séduit en alignant des péripéties très rythmées et des séquences d'action énergiques. Baignant dans une ambiance insolite, il aligne sur un tempo satisfaisant des poursuites et des fusillades, toujours filmées avec entrain. De plus, les maquillages soignés contribuent à la création d'une communauté de monstres marginalisés par la société, lesquels annoncent les créatures du CABAL de Clive Barker. L'interprétation de TRANSMUTATIONS est de bonne qualité, tandis que son ambiance et sa musique, très marquées par la New Wave et les années 1980, apporte un petit cachet nostalgique à sa vision, cachet que certains trouveront agréable ou repoussant, selon les goûts !
La plus grosse faiblesse de TRASMUTATIONS est sans doute son scénario qui, après des débuts éveillant l'intérêt, s'avère de plus en plus confus, voire totalement opaque dans son dénouement, particulièrement en ce qui concerne le personnage de Nicole. Celle-ci est supposée s'être changée, grâce à la drogue de Savary, non pas en une créature hideuse, mais en une mutante douée de pouvoirs surnaturels, capable de concrétiser les rêves. Malheureusement, tout cela est fort mal exploité, la faute, selon Clive Barker, au co-scénariste James Caplin et à l'équipe du film qui, toujours selon l'écrivain, n'ont pas respecté son travail. Enfin, malgré de louables intentions, certains éléments du film trahissent trop des restrictions budgétaires, comme l'antre des monstres, supposé constituer un vaste labyrinthe, mais dont on ne verra que peu de choses.
Malgré ses défauts évidents (direction artistique démodée, script boiteux...), TRANSMUTATIONS s'avère une curiosité intéressante, notamment grâce à sa mise en images soignée et à son ambiance singulière, mélangeant gothisme, Film Noir et expressionnisme. A sa sortie, Pavlou avoua qu'il aurait préféré adapter un autre texte de Clive Barker, à savoir RAWHEAD REX. Son vœu sera exaucé, puisqu'il dirige cette adaptation dès l'année suivante.
Sorti, en son temps, directement en vidéo dans notre pays, TRANSMUTATIONS est publié récemment en DVD en complément du numéro 162 de la revue "Mad Movies". Le film est présenté dans son format 1.66 d'origine (avec option 16/9), et bénéficie d'une qualité visuelle très acceptable. L'image a un peu tendance à fourmiller et les contrastes ne sont pas toujours éblouissants, mais pour une petite production des années 1980, le résultat est satisfaisant, notamment grâce une copie d'une très belle propreté.
La bande-son anglaise est proposée dans son mixage Dolby Stereo d'origine, lequel s'avère propre et énergique, et met bien en valeur la musique, les séquences d'action et les bruitages d'ambiance. La bande-son française, en mono codé sur deux canaux, ne supporte vraiment pas la comparaison, particulièrement à cause d'une dynamique bien moins probante. Un sous-titrage français amovible est disponible. Les bonus se limitent à une biographie, une filmographie et une bibliographie de Clive Barker.
Au vu de son prix, cette édition de TRANSMUTATIONS s'avère en tout cas très convenable, d'autant plus qu'il semble s'agir du seul disque disponible pour ce titre à travers le monde.