La maléfique Ocron et ses hommes loups sèment la mort dans les tribus vivant aux alentours. Ilias, en quête d'héroïsme et de justice, ne peut rester insensible et décide de mettre un terme à ce règne de terreur. Sur son chemin, il rencontre Mace, un guerrier qui déteste les hommes et aime les animaux, mais qui ne veut pas prendre parti.
L'association entre Lucio Fulci et le producteur Fabrizio De Angelis touche à sa fin avec LA MALEDICTION DU PHARAON. Pendant la production du film, un autre producteur en profite pour démarcher le réalisateur italien et lui proposer un contrat pour la mise en scène de deux métrages. Lucio Fulci accepte l'offre de Gianni Di Clemente et s'engage sur une coproduction entre l'Italie et l'Espagne qui deviendra CONQUEST. A l'époque, deux succès vont susciter une petite vague de films mêlant Heroïc Fantasy et préhistoire. D'un côté CONAN LE BARBARE de John Milius et de l'autre LA GUERRE DU FEU vont donc permettre la mise en chantier, entre autres, de LA GUERRE DU FER de Umberto Lenzi, YOR LE CHASSEUR DU FUTUR d'Antonio Margheriti, THOR LE GUERRIER, ATOR de Joe D'Amato, HUNDRA, SANGRAAL ou CONQUEST !
Suite au tournage du film qui se déroule en Sardaigne et dans les studios Elios de Rome, la post-production sera troublée puisque Lucio Fulci décide de rompre son contrat avec Gianni Di Clemente en refusant de tourner un second film pour le producteur. Le réalisateur n'est pas satisfait de la relation qu'ils ont pu avoir pour CONQUEST. L'histoire sera portée devant les tribunaux et Lucio Fulci aura gain de cause, ce qui lui permettra de reprendre sa liberté pour embrayer sur 2072 LES MERCENAIRES DU FUTUR, un autre film qui surfe sur un autre courant porteur.
CONQUEST organise son histoire en démarrant par un préambule qui semble issu des légendes antiques voire sortir d'un Péplum mythologique. Passée cette introduction de l'un des personnages principaux, le récit nous permet de rencontrer un jeune héros muni d'un arc (L'ARCHER ET LA SORCIERE ?), un guerrier qui aime les animaux (DAR L'INVINCIBLE ?), une tribu sympa mais qui vit encore à l'âge de pierre (LA GUERRE DU FEU ?) et une maléfique nana qui aime bien les serpents (CONAN LE BARBARE ?). L'originalité n'est pas pour autant absente dans un film qui s'ingénie à prendre des chemins de traverse pour une histoire somme toute tracée comme une ligne droite.
Avec CONQUEST, on assiste à une aventure d'Héroïc Fantasy plutôt décadente. La méchante de l'histoire, Sabrina Siani nue mais dont on ne verra jamais le visage, se shoote à la cocaïne avec ses troupes d'hommes loups avant de reposer lascivement en compagnie d'un serpent. Alors que Lucio Fulci voulait échapper à son image de réalisateur gore, il insère pourtant un lot de séquences particulièrement corsées comme l'écartèlement d'une jeune femme, la dégustation d'un cerveau, des décapitations et du sang qui gicle en veux-tu en voilà. Mais le scénario simpliste, bien que souvent peuplé de détails ineptes, ne réussit pas à transcender tout cela. Surtout que les incohérences sont nombreuses, à l'image de Mace doté d'une psychologie très versatile : il n'aime pas les humains mais devient ami de Ilias et l'emmène dans une tribu amicale qu'il connaît bien !
En plus d'un scénario pas spécialement passionnant, CONQUEST accuse surtout deux énormes défauts. Le premier est l'utilisation d'une musique signée pourtant par Claudio Simonetti et qui s'avère pour le moins en décalage total avec l'univers dépeint dans le film. La composition aurait eu bien plus sa place dans un STARCRASH en dehors d'un évident manque d'intérêt apporté par Claudio Simonetti pour son écriture. D'ailleurs Lucio Fulci n'a jamais rencontré le compositeur puisqu'il était à ce moment-là occupé par ses démêlés en justice avec le producteur. Ceci explique peut-être cela !
Mais ce qui apparaît comme incroyable, c'est la mise en image du film avec aux commandes un directeur de la photographie loin d'être un débutant (Alejandro Alonso Garcia). Outre l'impression qu'un filtre atténue la perception de ce qu'a pu capter la caméra, le film baigne quasi continuellement dans une brume artificielle et adopte souvent des effets de surexposition. Il est probable que l'envie était à ce moment-là d'offrir une sorte d'aspect d'un autre monde pour des décors peut-être jugés un peu trop communs. Pas mal de plans, un coucher de soleil par exemple, sont dénués de brume ou même de filtre, ce qui tendrait à nous conforter dans cette idée d'une approche esthétique. Mais au final cela a de quoi surprendre puisque l'on a bien du mal à discerner ce qui se déroule à l'écran dans une grande partie du film. A un tel point gênant que le film se traîne à présent la réputation d'être totalement flou, ce qui est à vrai dire un peu faux.
Lucio Fulci réutilise Andrea Occhipinti qu'il avait déjà dirigé dans L'EVENTREUR DE NEW YORK pour lui donner le rôle de son héros candide mais la véritable tête d'affiche est Jorge Rivero. L'acteur mexicain s'est frayé un chemin en commençant à tourner dans des films de lutteurs masqués, il apparaît aux côtés de John Wayne (RIO LOBO) et continue vers l'Italie et l'Espagne, ce qui finit de l'imposer comme une véritable vedette des pays latins. Bien entendu, CONQUEST connaîtra une meilleure carrière dans les salles de cinéma mexicaines sur le seul nom de l'acteur, ce qui n'en sera pas de même dans les autres pays. En France, le film ne sortira finalement que directement en vidéo !
Blue Underground distribue à présent CONQUEST dans une édition DVD commercialisée en même temps qu'un disque de L'ENFER DES ZOMBIES remasterisé. Le transfert de l'image de CONQUEST a du être un véritable cauchemar pour l'équipe de l'éditeur américain mais le résultat est parfaitement maîtrisé. Pourtant, entre la brume, un grain très prononcé et le filtre qui adoucit l'image plus que de raison, c'était la porte ouverte à d'énormes problèmes de compression. L'image du DVD retranscrit la vision très particulière du film sans gros soucis.
Seule la piste anglaise est disponible et le disque ne contient aucun sous-titrage. Mixée en Dolby Stéréo à l'origine, elle ne fait pas d'étincelles. Blue Underground n'y a manifestement pas touché et s'il y a une véritable dynamique sur l'embarrassante musique de Claudio Simonetti, le reste de l'action semble entièrement localisée sur les enceintes avant alors que certains dialogues sont plus ou moins difficile à cerner, particulièrement le prologue du film ou les hommes loups.
La partie des suppléments n'a rien d'une orgie mais s'avère plutôt satisfaisante. On peut y découvrir la bande-annonce du film accompagnée d'une bio/filmographie de Lucio Fulci (la même que sur l'édition américaine de L'ENFER DES ZOMBIES ou de 4 DE L'APOCALYPSE). Blue Underground ajoute aussi une galerie de photos réparties en plusieurs sections et qui a sûrement nécessité un minimum de recherche (affiches, photos d'exploitations…).
Ce film de Lucio Fulci n'est certainement pas son œuvre la plus réussie et Blue Underground en est conscient. L'éditeur assure tout de même une retranscription audio/vidéo de qualité et une part de suppléments limités. CONQUEST se paye donc un transfert de référence à destination des amoureux hardcore de Lucio Fulci ou des curieux voulant découvrir cette œuvrette d'Héroïc Fantasy.