WILLARD est, dans un un premier temps, un long-métrage datant de 1971, écrit par Gilbert Raston à partir de son propre livre "Ratman's notebooks". Réalisé par Daniel Mann, il connaît un beau succès, et est rapidement suivi d'une suite nommée BEN. Trente années passent... Alors que la compagnie New Line est à la recherche de titres dont elle pourrait tourner des remakes, Glen Morgan leur soumet l'idée de refaire ce WILLARD.
Morgan a commencé comme scénariste, avec son complice James Wong, pour DE SANG FROID, en 1986, mais c'est à partir de leur participation à AUX FRONTIÈRES DU RÉEL que ce tandem finit par se faire connaître. En 2000, ils passent à l'étape suivante avec DESTINATION FINALE, slasher astucieux produit par New Line, réalisé par James Wong et produit par Glen Morgan. La même équipe est employée, mais avec un résultat commercial légèrement décevant, pour le film de science-fiction THE ONE. Avec WILLARD, la donne change un peu, puisque James Wong prend en charge la production et Morgan s'essaie, pour la première fois, à la réalisation d'un long-métrage. Tourné au Canada pour 22 millions de dollars, ce film met en vedette, dans le rôle-titre, Crispin Glover, plutôt habitué aux seconds rôles (RETOUR VERS LE FUTUR...). Pour interpréter son patron, incarné en 1971 par Ernest Borgnine, on retrouve R. Lee Ermey, le célèbre sergent-instructeur de FULL METAL JACKET, revu récemment en policier texan peu commode dans un autre remake : MASSACRE A LA TRONÇONNEUSE de Marcus Nispel.
Willard Stiles, 27 ans, a tout pour être mal dans sa peau. Vivant dans une vaste demeure poussiéreuse en compagnie de sa mère, une vieille femme méchante et malade, sa vie professionnelle se résume à un job où il s'avère médiocre et où il est constamment martyrisé par son patron, contraint de le garder comme employé depuis le suicide du fondateur de l'entreprise, le père du jeune homme. Willard finit pourtant par se trouver un ami : un rat vivant dans sa cave, qu'il baptise affectueusement Socrate. A travers lui, il s'attire la sympathie des très nombreux rats habitants la cave de sa maison, qu'il décide d'utiliser pour se venger des humiliations dont il souffre quotidiennement.
WILLARD est un film en forme de portrait. Garçon névrosé, infantilisée par sa mère, souffre-douleur de son patron, Willard attire la sympathie du spectateur par son statut de victime, victime sur laquelle les catastrophes s'abattent avec une régularité impitoyable. Pourtant, Morgan n'en fait pas un personnage unilatéralement attachant : il est aussi un lâche, qui esquive toutes les possibilités qui lui sont offertes de quitter son enfer quotidien (mettre sa mère dans une institution, plaquer son travail...) et, lorsqu'il s'agit de se défendre, il a recours à des tactiques pathétiques, comme piquer une crise de nerfs ou solliciter la pitié de ses ennemis.
Il va pourtant se sortir de cette logique en se trouvant de nouveaux alliés : les rats qui peuplent le sous-sol de sa maison. Les utilisant d'abord pour de petites vengeances (crever les pneus de la voiture de son patron), sa position va évoluer, comme les rongeurs commettent des actes de plus en plus criminels, allant même jusqu'au meurtre. Si Willard se lie d'amitié avec la meute de rats, il va aussi multiplier les erreurs en tentant de devenir leur chef, et en leur imposant Socrate comme leader, alors qu'à l'évidence l'horrible gros Ben les dirige réellement...
Drame horrifique teinté d'un humour très noir, WILLARD privilégie la description précise de son personnage, peut-être aux dépends de la notion de rythme, et, surtout, de l'efficacité de ses séquences horrifiques. Ces dernières, déjà assez rares, souffrent de manquer de force, et le film semble ne pas contenir de séquences suffisamment intenses pour lui permettre de réaliser tout son potentiel.
Car, à part cette réserve, il faut reconnaître que ce film se situe au-dessus de la moyenne. Crispin Glover, impeccable, interprète un Willard parfait, gloussant d'aise après ses mauvais tours, pleurnichard quand il est en position de faiblesse. C'est un des rares exemples récents de film d'épouvante réellement porté par son interprète principal. Les seconds rôles l'épaulant sont aussi époustouflants, comme le toujours intense R. Lee Ermey ou Jackie Burroughs, tandis que le travail sur les décors, la photographie ou la bande-son crée une ambiance poussiéreuse et claustrophobe à souhait.
WILLARD est vraiment une des bonnes surprises récentes, et ce conte cruel, bourré d'humour noir, méritait sans doute mieux que l'accueil indifférent qui lui a été réservé. Après s'être lamentablement planté aux USA au cours de l'été 2003, sa sortie en France durant l'automne de la même année a aussi été un flop, quand bien même, un peu partout dans le monde, il recevait des critiques plutôt favorables.
WILLARD sort en France chez Metropolitan, dans une édition au contenu globalement semblable à celui du DVD américain New Line. Le film est proposé dans son format 2.35 d'origine (avec 16/9), dans une copie absolument irréprochable, ce qui est la moindre des choses pour un titre aussi récent. Bien que l'action se déroule les trois quarts du temps dans la pénombre, ce disque s'en sort haut la main, seuls quelques légères instabilités trahissent des soucis marginaux de compression.
La bande-son est proposée en Dolby Digital 5.1 EX, ou bien en anglais, ou bien dans sa version française (absente du DVD zone 1). A nouveau, on ne peut que constater la qualité du travail proposé, notamment sur les pistes arrières très actives, qui font cavaler des nuées de rats à travers tout votre salon ! Le DVD inclut aussi un sous-titrage anglais et, surtout, un en français, exclusif à cette édition Metropolitan.
Les bonus, entièrement sous-titrés en français, proviennent du disque américain. On retrouve ainsi un commentaire audio, effectué par Glen Morgan, James Wong et Crispin Glover, essentiellement tourné vers des détails techniques et les modifications apportés au film au cours du montage. Une courte intervention de R. Lee Ermey, apparemment enregistrée séparément, est aussi incluse dans cette piste.
Puis, on trouve un "Making-Of" de 72 minutes, réalisé par Julie Ng, assistante sur WILLARD. Il revient en détail sur la préparation et la confection du métrage, mais la partie la plus passionnante est sans doute celle qui décrit, sans langue de bois, les diffusions du film en projections-tests, les décisions qui en ont découlées (coupes, nouvelle fin...), et la déconfiture commerciale qui s'en est suivie.
Une section propose 25 minutes de scènes coupées ou remontées, la plupart du temps suite à la volonté tardive de New Line de distribuer un film "PG-13", alors que WILLARD a été tourné en visant une classification "Restricted". On gagne donc quelques jurons et, surtout, des séquences de terreur plus gores. Ces scènes peuvent être visionnées avec ou sans un commentaire de Morgan, Wong et Glover. Enfin, le clip de la chanson "Ben", chanté, réalisé et interprété par Glover, peut être regardé, avec un commentaire optionnel de ce dernier. Un petit documentaire, dont la narration est assuré par Bruce Davison (l'interprète principal du WILLARD de 1971), est dédié aux véritables rats, et à ceux qui les chassent et les détestent, ainsi qu'aux personnes qui les élèvent et les adorent !
Au chapitre des bandes-annonces, on trouve celle de WILLARD, ainsi que trois spots TV américains lui étant consacré. Puis on peut consulter celles d'autres titres Metropolitan, dont FREDDY CONTRE JASON et MASSACRE A LA TRONÇONNEUSE.
Au vu de cette interactivité assez riche, on constate que, malgré le peu de succès de WILLARD au box-office, New Line a tout de même fait des efforts pour sa distribution en DVD, en proposant une édition tout à fait respectable, que Metropolitan reprend fidèlement pour la France.