Au Japon, Mayumi rejoint un couvent catholique pour y devenir nonne. Au sein du couvent, elle découvrira un monde assez différent de celui qu'elle pouvait s'imaginer !
Comme le dit Jean-Pierre Dionnet dès le début de sa présentation, LE COUVENT DE LA BETE SACREE est un film de nonnes ou plutôt "nunsploitation". Un courant du cinéma d'exploitation qui aura surtout connu son heure de gloire en Europe et en Asie. Les nonnes elles-mêmes, il s'avère qu'elles apparaissent à l'écran depuis très longtemps dans des situations bien plus pieuses. Des histoires qui se confondent le plus souvent avec les missionnaires (pas la position !) ce qui donne un aspect aventureux aux histoires de ces religieuses. C'est ainsi le cas du NARCISSE NOIR ou AU RISQUE DE SE PERDRE. Entre ces films "sérieux" et les comédies mettant en scène des nonnes, il est difficile de savoir réellement où a pu prendre naissance le genre qui s'amuse à placer sur l'écran des éléments aussi contre-nature que la dévotion des religieuses et des pratiques sexuelles. Il est probable que LES DIABLES de Ken Russell ait marqué le point de départ de toute une vague de films du genre, même si le cinéma porno s'était déjà acoquiné avec l'attrait fétichiste du vêtement et du statut de la religieuse.
Pourtant, si l'on peut voir LES DIABLES comme un point de départ pour des films tels que FLAVIA L'HERETIQUE ou LES RELIGIEUSES DU SAINT ARCHANGE, il est difficile d'affirmer que LE COUVENT DE LA BETE SACREE ait pu y trouver ses racines. Ses origines japonaises, donc ne bravant pas les mêmes interdits que les films européens, ne place pas le film dans le même contexte et celui-ci est en fait l'adaptation d'une bande dessinée. Ce métrage n'étant rien de plus qu'un petit film d'exploitation se servant du décorum catholique pour produire un film érotique et fétichiste aux spectateurs nippons des années 70. Cela se ressent par le ton très léger adopté dans la majeure partie du métrage où le film n'hésite pas à intégrer de véritables passages comiques comme l'intrusion de deux hommes dans le couvent. Cet aspect un peu détaché de la réalité, on le retrouve dans d'autres films asiatiques du genre tels que WET AND ROPE.
Autre divergence avec les films de nonnes européens, LE COUVENT DE LA BETE SACREE s'ingénie à dépeindre les séquences érotiques ainsi que les tortures avec un esthétisme très poussé. La plupart des films du genre faits en Europe ont au contraire une approche bien plus crue ! Le supplice des ronces est l'un des meilleurs exemples puisque sa mise en scène cherche essentiellement à atteindre la belle image et non pas l'efficacité pour transmettre la souffrance de la suppliciée au spectateur. Question esthétisme, il est aussi intéressant de noter que toute une séquence rappelle furieusement le SUSPIRIA de Dario Argento qui sera tourné quelques années plus tard.
Le ton léger du COUVENT DE LA BETE SACREE n'empêche pas le film de se placer comme une réflexion sur la religion et la foi. L'ambiance s'assombrit avec la présence du seul homme d'église de l'histoire qui amène des propos assez vindicatifs à l'encontre de Dieu. Le bombardement atomique de Nagasaki est ainsi utilisé comme une preuve de la non-existence d'un Dieu qui n'aurait pas dû laisser un tel acte se produire. Le film perd un peu de sa légèreté pour sombrer dans le tragique le plus noir.
Les deux pistes sonores, l'une en japonais et l'autre en français, sont d'une bonne clarté et cachent assez bien leur statut monophonique. L'image quant à elle est au format large respecté (2.35 [16/9]) et retranscrit avec vivacité les séquences colorées du film. Seul défaut, la compression se fait sentir par moments !
Studio Canal a retrouvé l'actrice principale, ce qui nous permet de trouver sur le DVD une interview récente où elle se remémore des souvenirs du tournage. Le film aura ainsi été le début de sa carrière et au bout d'une vingtaine de minutes, elle s'étonnera amusée qu'on puisse venir l'interroger à propos de ce film pour une édition DVD. Autre interview, celle d'un critique japonais qui ne réussit pas à passionner tant on a l'impression qu'il n'a finalement pas grand chose de captivant à dire sur le film. Enfin, l'intervention la plus intéressante est celle de Romain Slocombe. Il donne ainsi des points de vue pertinents sur le film et le cinéma érotique japonais tout en replaçant le tout dans son contexte.
En guise de suppléments, il sera aussi possible de se mettre sous la dent une courte galerie de photos et des notes de production qui n'apportent rien de plus que tout ce que l'on a pu déjà entendre à propos du film jusqu'ici dont la présentation de Jean-Pierre Dionnet. Cette dernière est assez étrange car, pour une fois, celui qui aura créé Cinema De Quartier ne semble pas du tout à l'aise ni dans ce qu'il dit et encore moins dans sa façon d'être. Cela ne retire rien du contenu informatif de sa prestation !
Des cinq nouveaux titres de la collection, LE COUVENT DE LA BETE SACREE est le seul inédit à ce jour sur DVD. Il y a même de quoi être étonné de voir surgir un film de nonnes sur DVD et dans notre pays ! Au moins, on ne pourra pas taxer la collection de choisir la facilité dans ses sélections, qui s'avèrent pour le coup une bonne idée tant le film est une curiosité esthétique fort réussie !