Los Angeles, 2027... Alex est un policier cybernétique, mi-homme
mi-machine, luttant contre un réseau de terroristes : les "Hammerheads".
Ces derniers cherchent à saper les bases de l'ordre social en
place. Ils parviennent à détruire Alex au cours d'une
poursuite très violente. Mais la police de Los Angeles le reconstruit
et le remet en marche. Désormais, le cyborg doute : est-il encore
vraiment un humain ? Est-il une machine ? Qu'est-ce qui différencie
vraiment l'un de l'autre ? Il fuit alors en Amérique centrale
pour tenter d'échapper à son destin. Mais celui-ci le
retrouve, en prenant la forme des chefs du LAPD, qui le forcent à
repartir à la chasse aux terroristes...
Quoi qu'on pense des qualités cinématographiques des films du réalisateur de NEMESIS, tout le monde est d'accord sur une chose : si la "série B" des années 1980-1990 avait un nom, ce serait peut-être bien Albert Pyun. Surfant sur les modes du cinéma populaire (heroic fantasy en 1982 avec L'EPEE SAUVAGE, kickboxing en 1990 avec BLOODMATCH, science-fiction musclée avec ce NEMESIS...), il tourne, avec des budgets modestes, des produits pour des firmes indépendantes (il a d'ailleurs été, aux côtés d'un Joseph Zito ou d'un Sam Firstenberg, un pilier de la Cannon dans les années 1980), destinés le plus souvent à des circuits d'exploitation permettant une rentabilité rapide, tel que le marché de la vidéo. Dès lors, on ne s'étonne pas que ce réalisateur se mette au service de visages ornant très régulièrement les rayonnages des vidéo-clubs, comme Ice-T, Rutger Hauer, Christophe Lambert, Charlie Sheen, Dennis Hopper, Steven Seagal et autres Jean-Claude Van Damme.
Dans la lignée de ce dernier est apparu le français Olivier Gruner, au parcours assez proche. Après un service militaire effectué dans les commandos de la marine française, il se met au kickboxing, sport dont il devient champion du monde en 1987. Puis, il abandonne cette discipline, avant d'être repéré à Cannes, où il était agent de sécurité dans le cadre du Festival. C'est ainsi qu'il obtient le rôle principal dans le petit film d'action ANGEL TOWN. Gruner joue ensuite dans ce NEMESIS, produit par la petite compagnie Imperial, surtout associée à des oeuvrettes "musclées" (CORRUPT de Pyun avec Ice-T, MORT SUBITE de Peter Hyams avec Van Damme, le film DOUBLE DRAGON avec Mark Dacascos...).
NEMESIS mêle science-fiction et action dans un métrage qui a au moins le mérite de ne pas masquer ses influences. Dès le premier plan du film, Gruner affiche la mine sévère d'un TERMINATOR en vadrouille, tandis qu'une voix off désabusée nous narre, dans un style très "série noire", le portrait d'un Los Angeles futuriste et en crise. Difficile, dès lors, de ne pas penser à BLADE RUNNER, d'autant plus que la garde-robe d'Alex est fort semblable à celle de Deckard, qu'il oeuvre comme un éliminateur de robots, et qu'il en vient à se poser des problèmes métaphysiques sur les différences entre les machines et les hommes. On retrouve même, dans un coin du casting, Brion James, un des replicants du chef-d'oeuvre de Ridley Scott. TERMINATOR et TERMINATOR 2 sont eux-aussi sollicités à divers degrés : pour les scènes d'action et les cascades spectaculaires, pour la guerre humanité-machine, et pour des effets spéciaux à base de prothèses cybernétiques, parmi lesquelles il ne manque même pas un squelette mécanique par ici ou un il à diode rouge par là. Enfin, l'histoire de ce flic robotique nous renvoie aussi aux aventures violentes d'Alex Murphy, le ROBOCOP de Paul Verhoeven.
Bien que réputé
pour son budget relativement confortable, NEMESIS n'en reste
pas moins une assez modeste production. La plupart des scènes
d'action sont tournées dans des terrains vagues ou des zones
industrielles désaffectées de Los Angeles. Les voyages
internationaux d'Alex sont rendus avant tout par la magie de stock-shots
touristiques (notons toutefois que certains passages ont vraiment été
tournés à Hawaï, île natale de Pyun).
Avec Gene Warren
Jr., cette oeuvre s'offre néanmoins les services d'un superviseur
des effets spéciaux réputé, collaborateur de Cameron
sur TERMINATOR,
TERMINATOR
2 ou ABYSS.
Si les prothèses sont globalement d'un niveau acceptable, il
faut tout de même regretter que l'affrontement final entre les
robots dans l'avion, "clou final" du film, laisse franchement
à désirer au niveau technique. Au rang des regrets, il
est aussi dommage que le récit de science-fiction ne tienne pas
ses promesses. Alors que NEMESIS semble annoncer le portrait
mélancolique de son cyborg solitaire, ainsi que qu'une amorce
de réflexion sur l'essence de "l'âme" et sur
l'intelligence artificielle, on a tôt fait de se retrouver entraîné
dans une succession de poursuites désordonnées, au cours
desquelles le scénario se trouve réduit au rang de très
vague prétexte (gentils humains contre méchants robots).
NEMESIS n'est pas non plus dénué de qualités. Les scènes d'action sont extrêmement énergiques : la première fusillade reste ainsi un grand moment de bourinnage , tout comme l'assaut de l'hôtel. Il n'y a pas à dire : quand ça pète, ça pète vraiment pour de bon, et avec une réalisation souvent fort inventive, évoquant irrésistiblement les délires spectaculaires des polars de John Woo ! Gruner apporte une certaine sincérité à son personnage, et NEMESIS ne radine à aucun moment sur les nudités masculines ou féminines, ainsi que sur les torses nus ou les décolletés en tout genre : il y en a pour tous les goûts ! Signalons aussi cette scène complètement folle, au cours de laquelle une petite grand-mère, venue d'on ne sait trop où, sort de son panier à provisions un énorme flingue, butte un cyborg, avant de reprendre lentement son chemin en maugréant à propos de l'insécurité du quartier ! Il s'agit, à n'en pas douter, d'un grand moment de surréalisme cinématographique !
Proposé à un prix ultra-compétitif, ce DVD souffre tout de même de limites techniques évidentes. Tourné en 1.85, NEMESIS nous est proposé dans un recadrage 1.33 du plus mauvais goût, alors même que le laserdisc NTSC était, en son temps, présenté au bon format (merci à Superwondersope pour ces infos). Qui plus est, la définition est nettement en retrait, notamment dans les séquences mouvementées. Les noirs manquent cruellement de profondeur, les contrastes laissent à désirer et les couleurs sont globalement assez pâles. Bref, on a affaire à un travail plutôt médiocre.
La bande-son est proposée dans un anglais stéréo de facture acceptable. Par contre, contrairement à ce qu'indique la jaquette, vous ne trouverez pas de doublage français ou espagnol sur ce DVD. Il y a toutefois une "piste polonaise" : en fait il s'agit, comme souvent, d'un unique narrateur polonais ânonnant sans conviction tous les dialogues du film, tandis qu'on trouve, en fond sonore, la bande-son anglaise, dialogues inclus !!! Il n'y pas de sous-titrage disponible.
La rubrique bonus est relativement correcte si on veut bien la rapporter au prix de vente ridicule de ce DVD. On y trouve une bande-annonce, plusieurs spots TV, un petit "making of" (c'est-à-dire une featurette de sept minutes, au discours purement promotionnel) ainsi que des petites biographies du réalisateur Albert Pyun et des acteurs Olivier Gruner, Tim Thomerson, Cary-Hiroyuki Tagawa, Deborah Shelton et Brion James.
Série B d'action assez brouillonne et inégale par certains côtés, NEMESIS contient aussi de vrais morceaux de bravoure et fait preuve d'une énergie parfois étonnante. En France, ce film fut exploité directement en vidéo alors que Pyun en réalisa trois suites dont les deux dernières sont demeurées inédites dans notre pays alors que le second film a connu le sort d'une sortie directe en vidéo : NEMESIS 2, NEMESIS III : PREY HARDER et NEMESIS 4 : DEATH ANGEL.