Une troupe de théâtre décide de s'enfermer toute
une nuit dans sa salle de représentation afin de boucler une
comédie musicale horrifique. Désirant avancer au maximum
la première de la pièce pensant profiter d'un fait divers
mettant en scène un tueur à l'image de leur fiction, les
voilà pris à leur propre jeu. Un véritable serial
killer s'infiltre parmi eux et, prenant le costume du tueur du musical,
va les supprimer un par un.
STAGE FRIGHT, alias AQUARIUS aux USA, alias DELIRIA en Italie, alias BLOODY BIRD par chez nous, est le premier film (de fiction) de Michele Soavi. Cet ancien assistant de Dario Argento (sur TENEBRES ou OPERA) était auparavant passé derrière la caméra pour signer un documentaire sur son "maître" (DARIO ARGENTO'S WORLD OF HORROR), avant de lancer sa véritable carrière de metteur en scène avec STAGE FRIGHT. Pour parrainer le petit jeunot, ce n'est pas Argento mais un autre nom connu du fantastique italien qui va assumer le rôle de producteur : Aristide Massaccesi, plus connu sous le pseudo Joe d'Amato (réalisateur immortel du "gerbouillatoire" ANTHROPOPHAGUS, avant de devenir définitivement spécialiste du film canaillou jusqu'à sa mort en 1999).
Comme l'on pouvait s'y attendre, STAGE FRIGHT est un pur giallo dans la lignée des Argento. N'allez pas chercher du côté du scénario, c'est un prétexte plutôt paresseux à une succession de scènes chocs (on peut noter au passage que ce dernier est écrit par Luigi Montefiore alias George Eastman, mythique acteur du même ANTHROPOPHAGUS cité plus haut). Ce qui intéresse ici Soavi, c'est de montrer de quoi il est capable derrière une caméra. Et bien que notre mâchoire soit souvent titillée par le bâillement lors des scènes dialoguées, il faut bien avouer que Soavi se montre très inspiré lors des scènes de suspens et de meurtres.
La grande qualité de ce premier essai est donc cette exigence visuelle lors des scènes fortes. Les plans de Soavi sont visiblement réglés au millimètre afin d'envoyer certaines séquences de STAGE FRIGHT directement au panthéon du giallo. Outre des meurtres à l'arme blanche (marque de fabrique du genre), le film se réclame d'une certaine modernité en employant une batterie d'ustensiles plus contemporains (tronçonneuse, chignole). On reconnaît ici la probable influence de d'Amato dans des scènes gores lorgnant plus volontiers vers les pellicules américaines.
A la vision du film, on ne
peut s'empêcher de penser que le but non avoué de Soavi
est de prendre sa revanche sur Argento
en chassant sur les mêmes terres d'expérimentation et de
sophistication visuelle. Si Soavi
ne réussit pas la plupart du temps à se dégager
totalement de l'ombre de son mentor, il faut bien reconnaître
qu'il va enterrer Argento
lors d'une scène absolument gigantesque : alors que le vrai tueur
s'est immiscé lors de la répétition d'une scène
de meurtre, le voilà contraint d'obéir à la direction
vindicative du metteur en scène lui hurlant de tuer la comédienne
Un artiste dirigeant malgré lui une réelle scène
de meurtre non simulée, voilà une mise en abîme
qui aurait plu à Argento.
Sous une jaquette typée bédé japonaise, le DVD hollandais du film est une bonne surprise. L'image est de très bonne tenue, ce qui est toujours à saluer. Une option pas si bête qu'elle n'en a l'air va vous permettre de customiser votre visionnage. Le film ayant été tourné plein cadre pour être ensuite matté au cinéma (adjonction de cache sur le projecteur), le DVD vous permet d'ajouter ou non deux bandes noires sur l'image (façon letterbox) afin de vous laisser choisir le type de vision souhaité. Seul inconvénient du procédé, il n'est pas compatible 16/9. La bande sonore quant à elle est une piste stéréo surround de bonne tenue sauf un problème plutôt gênant : le niveau des dialogues est bien au-dessous du niveau de la musique. Vous devrez ainsi monter régulièrement le son afin d'entendre ce qui se raconte, pour ensuite baisser violemment le volume tant la musique vous aura déjà rendu sourd d'une oreille. Un film à regarder avec la télécommande à portée de main donc.