Le Roi des singes est un personnage extrêmement célèbre de la culture chinoise. Il est le héros du roman "Le Voyage en Occident", écrit par Wu Cheng En et inspiré par le voyage du moine Xuanzang, qui, au VIIème siècle, ramena en Chine les écrits de Bouddha (ce qui fut le point de départ de la diffusion de cette religion dans ce pays). Le Roi des singes est donc un pélerin accompagné par des compagnons de voyage, dont le bonze des sables qui ne rit jamais, et Pourceau, un cochon qui ne pense qu'à manger. Ses aventures ont déjà été portées au cinéma, notamment dans le ravissant dessin animé chinois LE ROI DES SINGES. Il a aussi largement influencé les premiers épisodes de la série DRAGONBALL.
MONKEY KING est un téléfilm produit par Hallmark, spécialisé dans les téléfilms et les mini-séries de prestige, souvent des adaptations de classiques de la littérature mondiale (MERLIN, ALICE AU PAYS DES MERVEILLES...). Plutôt que d'adapter littéralement "Le Voyage en Occident", le scénariste David Wang a inséré certaines aventures du Roi des singes dans un récit original où se croisent, dans un monde de légendes, des personnages contemporains (le sinologue Thomas Gibson...), des figures historiques (l'écrivain Wu Cheng En...) et des créatures imaginaires (le Roi des singes...). La trame d'ensemble est assez compliquée : dans le monde des légendes chinoises, des démons malveillants et censeurs tentent de faire disparaître le livre "Le Voyage en Occident" ; ce livre a été si important dans le développement de l'humanité que cette disparition a pour conséquence de faire retourner notre monde dans le passé et le chaos. Pour éviter ce désastre, une divinité chinoise se rend dans notre univers et demande au sinologue Nicholas Orton de l'accompagner dans son monde fantastique afin d'y déjouer les plans malfaisants des démons. Il pourra compter sur le Roi des singes et ses compagnons pour lui venir en aide à travers ses multiples aventures.
Ainsi, MONKEY KING exalte la force des livres en général et des classiques de la littérature populaire en particulier. A travers la rédaction des aventures palpitantes de héros de légende, les grands écrivains rendent accessibles au plus grand nombre des idées stimulantes et intelligentes, encourageant les hommes à faire preuve d'optimisme, de courage et de bonne volonté dans leurs entreprises. Le fantastique est donc porteur d'espoirs pour l'humanité et les grandes œuvres sont des sources d'inspiration positives, universelles et intarissables pour les individus et les sociétés.
La liberté de l'écrivain est opposée à la cruauté des tyrans et des démons censeurs qui, sous prétexte de protéger les traditions de la Chine, veulent faire disparaître "Le Voyage en Occident" des mémoires humaines. Ces esprits incarnent un mauvais traditionalisme, replié sur lui-même, refusant la nouveauté et censurant l'imagination et la fantaisie. A l'impertinence du Roi des singes, qui, avec humour et bon sens, remet en question l'autorité et les coutumes du passé, ils préfèrent une Chine tournée vers ses racines et vouée à la stagnation et à une autarcie stérile.
Mais, ce film réfléchit aussi sur les rapports nouveaux entre l'Occident et la Chine qui semblent s'ouvrir progressivement aux influences extérieures. Aux hommes d'affaires qui ne voient la Chine que comme un terrain pour faire de l'argent (en ouvrant un parc d'attraction autour de l'armée des soldats d'argiles du tombeau impérial de Qin Shi Huangdi), MONKEY KING oppose le sinologue Nicholas Orton, qui va préférer s'enrichir spirituellement et intellectuellement au contact de la culture chinoise.
Ainsi, par ces quelques exemples, on voit que MONKEY KING est une oeuvre ambitieuse, porteuse d'idées généreuses. Il se présente sous la forme d'une épopée fantastique pleine d'aventures fabuleuses et de rebondissements : on y combat des dragons, des tigres, des démons, on vole sur des nuages, on visite de gigantesques cités de jade... Les décors sont soignés, les trucages nombreux et plutôt réussis (si on veut bien garder à l'esprit qu'il s'agit d'une production pour la télévision) et le rythme est suffisamment soutenu pour qu'on ne s'ennuie jamais trop longtemps, bien que le métrage dure pratiquement trois heures. Il est toutefois nécessaire de prévenir le spectateur puriste de passer son chemin : comme on l'a vu, il ne s'agit pas d'une adaptation littérale des aventures du Roi des singes. Le récit a été adapté de manière à se centrer sur un personnage occidental, qui vivra même une histoire d'amour avec une divinité chinoise. Le point de vue peut donc paraître outrageusement occidental, surtout aux amateurs du cinéma fantastique de Honk Kong habitués à voir les légendes chinoise racontées "de l'intérieur". Pourtant, si l'approche peut paraître maladroite, on peut aussi voir un encouragement à aller étudier les cultures des autres civilisations et, en fin de compte, une ode au métissage.
Au chapitre des regrets, il faut noter que les scènes d'action restent quand même très "télé". Lourdes, statiques, trop découpées en plans courts, certains combattants y font preuve, pour le moins, de maladresse. Évidemment, les moyens de réalisation de la télévision exigent des délais de préparation incompatibles avec une formation physique sérieuse des comédiens. D'autre part, la présence au poste de réalisateur de Peter Mac Donald (RAMBO III, LEGIONNAIRE...) n'est pas la garantie d'une grande originalité. Pourtant, il se met bien au service de son scénario. Regrettons encore que la dernière demi-heure (l'affrontement assez lourdingue avec les démons dans la ville chinoise contemporaine), outre qu'elle rappelle SUPERMAN II, paraît tout à fait inutile au récit qui semble déjà achevé auparavant. Sans doute fallait-il jouer un peu les prolongations pour atteindre la durée réglementaire...
L'image du DVD est un quasi sans faute. A l'exception d'un arrêt sur image un peu inopiné (un deuxième changement de couche ?!!?!?) et de rares sauts, l'image est absolument impeccable, très lumineuse et colorée. Les scènes sombres sont très convaincantes et ne laissent paraître aucune remontée de la granulation ou de fourmillement.
Le DVD propose deux bandes-son en dolby stéréo (français et anglais), ainsi qu'un sous-titrage français (imposé) sur la version anglaise.
Pour les bonus, c'est la routine : on signale deux bande-annonces en français, un petit making of assez correct (12 minutes), ainsi que des bio-filmographies de Peter Mac Donald, Thomas Gibson, Bai Ling et Russell Wong. Pas un mot par contre pour Kabir Bedi rendu célébre par SANDOKAN, la mini-série télévisée d'aventure italienne réalisée dans les années 70 par Sergio Sollima...
MONKEY KING est donc un divertissement familial de bonne qualité, prônant l'amour de la littérature et présentant le fantastique et l'imagination comme vecteurs des progrès de l'humanité. Ses idées intéressantes font, en fin de compte, pardonner les faiblesses de sa réalisation et l'approche un peu maladroite de la culture chinoise. Les fans de cinéma de Honk Kong sont toutefois prévenus : MONKEY KING est bien plus proche d'un téléfilm américain classique que d'un film de Tsui Hark !
