Header Critique : HURLEMENTS (THE HOWLING)

Critique du film
HURLEMENTS 1980

THE HOWLING 

Karen White, présentatrice de journal télévisé, sert d'appât pour capturer un serial killer. Celui-ci est abattu mais Karen reste traumatisée par la rencontre. Son médecin, George Waggner, lui prescrit du repos dans une institution rurale appelée la "colonie".

Steven Lane, un exploitant de salles de cinéma, a l'idée d'adapter le roman «Hurlements» de Gary Brandner. Il trouve un accord de production avec AVCO Embassy, une petite compagnie. Celle-ci lui retire le projet des mains et le confie à Joe Dante, sur lequel le succès de PIRANHAS produit par Roger Corman a attiré l'attention.

Entre-temps, Dante aide à terminer LE LYCÉE DES CANCRES, comédie collégienne mettant en scène le groupe punk «The Ramones». Ce film surfe sur une vague lancée par AMERICAN GRAFFITI de George Lucas et, surtout, AMERICAN COLLEGE de John Landis. Il s'agit de son dernier travail pour le producteur Roger Corman et sa firme New World.

Après PIRANHAS, Joe Dante se voit proposer divers projets de films de monstres aquatiques dans la lignée des DENTS DE LA MER. Tels un ORCA II ou évidemment PIRANHA 2 : LES TUEURS VOLANTS qui sera finalement réalisé par James Cameron et Ovidio G. Assonitis.

Joe Dante préfère donc travailler sur HURLEMENTS, projet de film de loup-garou rejoignant son goût pour le cinéma d'épouvante traditionnel. Le script de Steven Lane est abandonné et Dante en écrit un nouveau avec l'aide de John Sayles, déjà son complice sur PIRANHAS. Les effets spéciaux doivent être confiés à Rick Baker (LE MONSTRE EST VIVANT, LA GUERRE DES ÉTOILES), mais il est pris par la préparation du LOUP-GAROU DE LONDRES de John Landis. Baker confie ce travail à son jeune collaborateur Rob Bottin (PIRANHAS, FOG).

Le casting réunit une galerie de sympathiques comédiens plutôt spécialisés dans la série B, toutes générations confondues : Dee Wallace Stone (LA COLLINE A DES YEUX), Patrick MacneeCHAPEAU MELON ET BOTTES DE CUIR »), Kevin McCarthy (L'INVASION DES PROFANATEURS DE SÉPULTURES), John Carradine (LA MAISON DE DRACULA)...

Avec les succès de ROSEMARY'S BABY, L'EXORCISTE ou LES DENTS DE LA MER, l'épouvante gothique et son bestiaire (vampire, monstre de Frankenstein, loup-garous) tombent en désuétude. Pourtant, des films ambitieux comme ZOMBIE de George A. Romero et DRACULA de John Badham tentent de renouveler ces mythologies. HURLEMENTS essaie aussi de fusionner un mythe classique (le loup-garou) avec la nouvelle esthétique de l'horreur mise en place par LA NUIT DES MORTS-VIVANTS, ROSEMARY'S BABY ou L'EXORCISTE.

C'est de ce dernier film dont avoue s'être inspiré Joe Dante pour ancrer son récit dans une réalité quotidienne. Ainsi, il reprend la structure de L'EXORCISTE. Après un prologue troublant, une bonne moitié du métrage se déroule dans un univers contemporain où l'étrange n'est sensible que par des affleurements. Puis la seconde partie de HURLEMENTS plonge dans une horreur plus explicite.

Pour mettre à jour le thème du loup-garou, Dante s'appuie sur sa nature dualiste pour révéler le conflit entre l'être humain urbain et civilisé de la fin du vingtième siècle d'une part et ses pulsions naturelles et refoulées, érotiques et violentes d'autre part. Ainsi, le début de HURLEMENTS nous plonge dans l'univers technologique et hypocrite de la télévision, tandis que la suite se déroule dans la colonie du docteur Waggner, en pleine nature sauvage, au milieu d'une grande forêt.

Pourtant, cela ne fonctionne pas bien : à force de refuser l'action et le fantastique au cours de la première heure de HURLEMENTS, Dante provoque l'ennui. Nous sentons une volonté de jouer sur une ambiance fantastique et érotique au cours des événements dans la colonie. Mais Joe Dante ne retrouve pas la sensualité ou la subtilité atmosphérique d'un Brian De Palma (PULSIONS) ou d'un Mario Bava (LE CORPS ET LE FOUET). Malgré la musique langoureuse de Pino Donaggio (CARRIE), la froideur ennuyeuse et la banalité de la réalisation sont sensibles.

Dante affirme un aspect de son style déjà perceptible dans PIRANHAS : en multipliant les références au cinéma fantastique populaire, il place son travail dans la lignée de ses grands prédécesseurs et indique sa conscience de s'inscrire dans l'histoire d'un genre. Il cherche à renouveler le film de loup-garou avec HURLEMENTS, et il ne cherche nullement à tourner le dos aux classiques du genre ou à s'en moquer.

Ainsi, de nombreux personnages portent des noms de fameux réalisateurs d’œuvres mettant en scène des lycanthropes : George Waggner (LE LOUP-GAROU), Terry Fisher (LA NUIT DU LOUP-GAROU), Fred Francis (LEGEND OF THE WEREWOLF) ou Erle Kenton (LA MAISON DE FRANKENSTEIN). De même, Dante s'offre comme figurants des grandes figures du cinéma fantastique, comme le producteur-réalisateur Roger Corman ou Forrest J. Ackerman, fondateur de la mythique revue américaine « Famous Monsters of Filmland ».

Si ce goût pour la référence devient une banalité dans les années 1990, avec RESERVOIR DOGS de Quentin Tarantino ou SCREAM de Wes Craven, c'est alors assez nouveau en 1981. De plus, ces citations sont parfois "littérales", puisque, par le biais d'écrans télévisés, Dante nous montre des extraits des films l'ayant inspiré : LE LOUP-GAROU, LES TROIS PETITS COCHONS produit par Walt Disney...

Parfois, ce goût de la citation se ressent avec lourdeur et distrait l'attention du spectateur. Certaines facilités de montage (l'alternance entre LES TROIS PETITS COCHONS de Disney et l'agression de Terry par le loup-garou) manquent de subtilité.

La dernière demi-heure de HURLEMENTS est la plus satisfaisante. L'interprétation de Dee Wallace Stone y est émouvante, notamment avec son sacrifice final, dans la tradition mélodramatique du LOUP-GAROU ou de LA NUIT DU LOUP-GAROU. Nous apprécions aussi la réussite des effets spéciaux. La vision qu'a Joe Dante du lycanthrope est neuve. Jusqu'aux années 70, le loup-garou est souvent un homme excessivement poilu et dentu, marchant de façon voûtée. Désormais, les progrès des effets spéciaux mécaniques et des maquillages (LA PLANÈTE DES SINGES, L'EXORCISTE) ouvrent de nouvelles portes.

Si dans LE LOUP-GAROU DE LONDRES, lui aussi de 1981, Landis et Baker optent pour un réalisme infaillible (une fois métamorphosés, les lycanthropes ressemblent vraiment à des loups), Dante et Bottin créent des monstres inspirés par les personnages de dessin animé, comme les loups de Disney ou de Tex Avery, ou le Coyote de Chuck Jones.

Dans HURLEMENTS, les loup-garous sont menaçants car ils sont de très grande taille. Ils se tiennent debout bien qu'ils aient de véritables pattes arrières de loup. Leurs oreilles, mufles et dentitions sont disproportionnés, comme s'ils étaient perçus par une vision caricaturale. Si leur apparence d'ensemble est  réussie, les séquences de métamorphoses sont moins satisfaisantes. Certes, Bottin emploie des techniques très nouvelles, avec des prothèses animées par des moteurs et autres effets spéciaux mécaniques spectaculaires. Mais la réalisation trop statique et les éclairages trop francs ne les mettent pas bien en valeur.

HURLEMENTS nous a en fin de compte déçu, notamment à cause de la faiblesse narrative de ses deux premiers tiers. Pourtant, ce sera un succès commercial ouvrant de nouvelles portes à Joe Dante. Spielberg lui fait réaliser un segment du film à sketch LA QUATRIÈME DIMENSION, puis lui confie le projet de GREMLINS, appelé à devenir le film le plus fameux de Joe Dante.

HURLEMENTS sort la même année que plusieurs autres films d'épouvante jouant sur la mythologie des loup-garous, dont LE LOUP-GAROU DE LONDRES, WOLFEN de Michael Wadleigh et FULL MOON HIGH de Larry Cohen.

Steven Lane va, de son côté, exploiter en tant que producteur la franchise HURLEMENTS dans diverses suites jusqu'à HOWLING VI : THE FREAKS de 1991. Puis la compagnie New Line en acquiert les droits et produit un épisode supplémentaire de cette série : HOWLING : NEW MOON RISING de 1995. En 2011, THE HOWLING REBORN tente de relancer la série, mais il arrive trop tard dans la mode des remakes de classiques horrifiques des années 70-80 : il sort directement en DVD dans l'indifférence. Toujours pour le petit écran, il est annoncé en 2020 que Netflix a recruté Andy Muschietti (ÇA) pour réaliser une nouvelle adaptation du roman «Hurlements» de Gary Brandner.

Rédacteur : Emmanuel Denis
Photo Emmanuel Denis
Un parcours de cinéphile ma foi bien classique pour le petit Manolito, des fonds de culottes usés dans les cinémas de l'ouest parisiens à s'émerveiller devant les classiques de son temps, les Indiana Jones, Tron, Le Dragon du lac de feu, Le Secret de la pyramide... et surtout les Star Wars ! Premier Ecran fantastique à neuf ans pour Le retour du Jedi, premier Mad Movies avec Maximum Overdrive en couverture à treize ans, les vidéo clubs de quartier, les enregistrements de Canal +... Et un enthousiasme et une passion pour le cinéma fantastique sous toutes ses formes, dans toute sa diversité.
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