L'inspecteur Halloran (Callum Keith Rennie) se trouve à la poursuite d'un mystérieux tueur qui est l'instigateur d'un jeu morbide mettant en scène cinq personnes se trouvant prises au piège de révélations sur leur passé. Deux pathologistes: Logan (Matt Passmore) et Eleanor Bonneville (Hannah Emily Anderson) vont lui prêter main forte dans cette enquête. Très rapidement, tout porte à croire que le terrible John Kramer (Tobin Bell) ne serait pas mort ou bien qu'une autre personne continue son oeuvre !
En 2010, la série de films SAW bouclait la boucle avec SAW 3D : CHAPITRE FINAL en voyant revenir le Dr Gordon (Cary Elwes) mettre un terme «final» aux circonvolutions menant jusqu'au personnage joué par Costas Mandylor. Comme pour tout franchise qui contient le mot «final» ou «chapitre final», les fans (et les autres) savent pertinemment qu'il ne s'agit en RIEN de la fin. Voir VENDREDI 13 : CHAPITRE FINAL pour s'en rendre compte et 7 ans après, les producteurs qui ont lancé la mode du «torture porn» se gratouillaient les méninges et le portefeuille.
JIGSAW sent de ce fait fortement la tentative de relance de la franchise SAW. A ne pas s'y tromper, puisque le neuvième opus serait déjà en développement chez Twisted Pictures. Ceci malgré des résultats décevants aux USA (38 millions de dollars de recettes pour un budget de dix), mais un succès rencontré à travers le reste du monde (102 millions de dollars). Une opération toujours rentable avant le retour sur investissement juteux des ventes DVD/Blu Ray, et autres plateformes de streaming ou VOD. Premier changement : il s'agit du premier film à avoir été tourné en Format Scope pour la saga et le second en numérique. Si l'équipe de production demeure identique, tout comme le musicien (Charlie Clouser, qui retravaille le thème principal « Zep»), le monteur Kevin Greutert (qui effectue un travail expert ici), la réalisation est confiés aux frères Spierig. Pas des inconnus, puisqu'ayant oeuvré au sein de très respectables série B comme UNDEAD, DAYBREAKERS ou encore PREDESTINATION. jusqu'au récent WINCHESTER avec Helen Mirren. Une curiosité, toutefois : il semble qu'il n'existera pas de version « Unrated » ou « Uncut » du film et que cette version sortie chez Metropolitan en Blu Ray sera la seule existante, contrairement à la plupart des opus précédents.
Il existe un réel changement en termes de choix de couleurs, de décors, d'imagerie sonore. Les frères Spierig ajoutent leur indéniable patte dans l'univers SAW. Tout en conservant ce qui fait le charme (si on peut parler de charme pour un film d'horreur!) et la reconnaissance de ce que représente SAW pour les fans - et les autres. On se trouve plus dans un «Whodunit» sanglant qu'autre chose.
Les amateurs de la franchise auront bonheur à retrouver divers éléments et références aux précédents films. Avec justement un scénario qui va s'ingénier à entremêler ses propres pièces du puzzle à destination du spectateur aguerri. Mais tout en respectant également celui qui découvre l'univers SAW, car même sans saisir l'étendue des points présents dans les épisodes précédents, le plaisir n'en pas pour autant gâché, loin s'en faut. Les plus attentifs auront noté un certain parallèle de structure avec SAW IV sur les deux histoires progressant côte à côte. Mais il s'agit plutôt d'un retour aux sources à l'original, avec comme moteur de récit une forme plus orientée thriller que "torture porn". Et hormis les évidents clins d'oeil aux différents films, la mise en abîme de la mort de John Kramer (officialisée dans SAW III et réinitialisée dans SAW IV, justement), la possibilité d'éléments surnaturels et finalement, une réplique de l'original quand à l'affrontement final. Une réplique ? ou une répétition ?
Rien de révolutionnaire toutefois pour celles et ceux qui connaissent le terrain pratiqué. JIGSAW se révèle même assez routinier et curieusement, mettant la pédale douce sur la torture et le Gore. Certes, ça reste du SAW - mais avec une emphase sur le côté claustrophobe du déroulement, que sur l'aspect graphique des mises à mort. En fait, c'est du côté d'un scénario retors, rebondissant de manière adroite et à l'arrivée plutôt malin qu'il réussit à englober l'ensemble des sept précédents épisodes pour leur donner une nouvelle logique - et donc une nouvelle direction. Il plane un curieux sentiment de série TV policière par instants, entre LES EXPERTS et COLD CASE, avec un look certes beaucoup plus travaillé. Mais les scènes d'exposition des pathologistes et des policiers manquent cruellement de nouveauté. On comprend toutefois la volonté des auteurs de donner à ces moments un sens d'apaisement - après les agressions répétées des victimes dont l'histoire de leurs démembrements, énucléations, réduction en charpie et autres joyeusetés se déroule en parallèle. Avec toujours ce ton évidemment moralisateur qui caractérise le modus operandi du (des) non-tueur(s). Tout en se reposant sur le magnétisme évident de Tobin Bell, avec sa voix douce et aux mots tranchants. Et, malgré tout, un petit manque de peur viscérale et de chocs animant la série de films.
Quoiqu'il en soit, il reste évident que Twisted Pictures et Lionsgate veulent continuer à traire le sujet jusqu'au bout. ne serait-ce que pour la dernière image qui semble indiquer qu'autre chose demeure en préparation. Beaucoup de questions restent sans réponse au sein du «Grand Plan» de Jigsaw.
Après son succès français (537 081 entrées), Metropolitan sort le film en Blu Ray (BD 50), zoné B. Le disque s'ouvre sur la précision de l'interdiction aux moins de 16 ans du film, ainsi que de la très importante indication de la présence d'une piste en audiodescription.
Un menu animé sur fond de Charlie Clouser opte pour les choix d'accès au film, de langues/sous-titres, d'un agréable accès par 16 chapitres et de la partie suppléments. JIGSAW est présenté au format 2.40:1, en 1080p et encodé en AVC - MEPG 4. Le film est d'une durée complète de 92mn28. Tourné avec la caméra numérique Arri Alexa Mini (et mixé en Dolby Atmos), le transfert sur Blu Ray offre une variété de tons sombres, aux couleurs parfois volontairement ocres foncés et rougeoyantes. Même si l'ensemble adopte une tonalité métallique qui semble être la norme actuellement'
Une majorité de scènes en intérieurs, passant de la grande à pièges au laboratoire d'analyses post mortem. Les plans teintés d'obscurité sont excellents, pas de noirs bouchés. Le piqué d'image reste précis, même si de manière perverse, révèle un peu trop le côté numérique de certains effets visuels. On dira que les détails des scènes sanglantes se voient à merveille (la tête sectionnée en deux et le splendide et très original «effet fleur» final!). Tout comme la caméra se trouve en extérieur, comme la scène d'ouverture, où l'équilibre des couleurs et la précision de l'ensemble sont remarquables.
Un mixage Dolby Atmos des plus précis pour la version anglaise (avec sous-titres français amovibles), au débit exemplaire, reproduisant à merveille tous les craquements, déchirements et autres casse que le film offre au gré de sa progression. Qu'il s'agisse d'accidents, de tranchages de jambes ou des bruitages de mécanismes des pièges, la restitution multicanale est parfaite pour mettre dans l'ambiance. Les dialogues étant enregistrés au quasi même niveau que musique et effets, l'ensemble se révèle un très bel exercice audio.
DTS HD MA 5.1 pour la piste française, avec clairement le doublage français placé au dessus de la piste sonore originale. Des voix puissantes, parfois trop bruyantes qui couvrent musique et effets sonores. Bien plus que le mixage anglais original qui s'avère plus équilibré en la matière.
La piste en audiodescription reste la troisième possibilité, couvrant le doublage français suivant (et de manière très rapide) ce qui se déroule à l'écran - le tout au cordeau, avec une voix qui sait laisser transparaitre l'urgence et le suspense.
Metropolitan a mis le paquet en invitant un nombre très impressionnant de suppléments à cette édition de JIGSAW. Des points judicieux par l'équipe de production, tournage et acteurs, à mi-chemin entre exercice marketing obligatoire et l'étendue du travail ardu sur ce type de production. Qui possède un budget réduit mais qui, au vue des images de tournage et de ce qui parait au produit fini, montre à quel point l'implication de chaque personne peut rendre un film réussi - ou pas. Il s'agit du pari du documentaire et du commentaire audio de cette galette.
Un commentaire audio (en anglais avec stf) très prenant des producteurs Oren Koules, Mark Burg et du producteur exécutif Peter Block. Ils reviennent ardemment sur le processus créatif, l'élaboration des scènes de piège, les difficultés rencontrées' on sent que les bonhommes ont eu plaisir à faire le film. Et ils le transmettent bien! Des commentaires à la mitraillette, il faut parfois bien les suivre, avec cette envie de communiquer l'enthousiasme. Et avec des références inattendues (comme celle pour A LA POURSUITE DU DIAMANT VERT à partir de la 35e minute), avec les explications des effets spéciaux mécaniques pour donner les effets voulus - notamment sur la torture de l'ensevelissement. A noter aussi que pas mal de scènes ont été écrites pendant un tournage déjà bien entamé, principalement sur les scènes d'exposition tentant de renforcer les soupçons pesant sur Eleanor Bonneville (qui se retrouve affublée au final d'un flingue inspiré de DIRTY HARRY !). Avec des éléments sans langue de bois « les films sont souvent à propos de faire des choses que vous ne voulez pas faire, mais que vous devez faire ». Tout en défendant leur point de vue sur le besoin de respecter à la fois les fans et le fait d'ouvrir vers de nouvelles directions. Avec également de larges partages sur la scène à compter de la 75e minute, où les effets visuels ont été élaborés 4 mois après le tournage : de constater ainsi le travail des acteurs en la matière pour rendre crédible une scène dans laquelle ils ne comprennent absolument pas ce qui va être le travail fini à l'écran. Et un point intéressant sur la mécanique du suspense : les auteurs semblent plutôt faire pencher leur écriture non pas sur la surprise de qui est le tueur - car ils se doutent que les spectateurs auraient devinés. mais sur leur capacité à faire douter le spectateur sur ce qu'il pense savoir. Très enrichissant.
L'autre gros morceau reste I Speak for the Dead : The Legacy of Jigsaw : plus de 81 minutes de concentré de SAW avec tout ce qui fait l'attrait pour cette série de films horrifiques atypiques. détestés par certains, adulés par d'autres -rien ne laisse indifférent. Ce large documentaire très complet est toutefois accessible en plusieurs chapitres à l'unité, détaillés ci-dessous :
The Truth will set you free : des scénaristes aux réalisateurs en passant par Tobin Bell et Ben Knott (directeur photo): ce qu'apporte cette nouvelle direction. Avec un maximum d'effets réalisés devant la caméra pour plus d'impact et ce souhait de faire plus un thriller horrifique qu'un «torture porn». Malgré tout, peut être le segment le moins intéressant car le plus dispersé en termes de thématiques.
You Know His Name : laisse la parole à Tobin Bell et sa perception de Jigsaw/John Kramer et ses motivations - la différence apportée à chaque film et son approche, avec la chance et la richesse de développer la psychologie du personnage à travers chaque film. Et l'appui des scénaristes sur la qualité de l'homme derrière Jigsaw.
Death By Design : les réalisateurs ainsi que les maquilleurs parlent du look du film et de celui des morts et autres prothèses réalistes qui parcourent le film.
Blood Sacrifice : les frères Spierig, Oren Koules , Peter Block et le chef décorateur Anthony Cowley reviennent sur les idées des pièges , l'influence des films passés et la volonté d'offrir quelque chose de différent.
The Source of Fear explore l'univers musical de Charlie Clouser, sa manière de travailler, ses instruments et surtout, sa source d'inspiration. Amateur d'ambiances électrisantes, ce segment est pour vous. Clouser est un passionné, ça se sent! De son premier travail sur SAW jusqu'aux explications de guitares doublées de sons percutants pour la scène avec Mandela Van Peebles, il y a de quoi comprendre ce qui le motive. Surtout quand il admet qu'il n'y a rien de mauvais à s'amuser un petit peu dans un film à la SAW, surtout sur les plaisanteries dosées d'humour noir. Ce qu'il tente de transcrire dans la musique.
Survival of the fittest : ce segment montre le choix équilibré du casting, tout en élaborant l'aspect du scénario lu par les acteurs qui ne savaient pas qui étaient les bons ou les méchants - les dernières pages du scénario n'étant pas envoyées. Puisque lues simplement au début du tournage. Cela embraye sur les motivations des acteurs... tous fans de la série. Comme par hasard.
The Choice is yours : Un focus très amusant sur l'accessoiriste du film. D'autant plus qu'il s'agit d'interviews peu courantes dans des suppléments - et pourtant un homme capital dans la construction du mythe Jigsaw et des éléments qui l'accompagnent. Vous saurez tout sur le reconstitution des pièges les plus célèbres qui parsèment JIGSAW. Passionnant! (NB : sur le disque US, ce segment était classé à part de I Speak for the Dead. Il a été réintégré ici sur le disque français).
Il s'agit d'une réplique à l'identique des bonus présents sur le Blu Ray US sorti le 22 janvier 2018. Le plus étant le lien internet vers le site de l'éditeur pour le reste des films annonces. A noter l'absence de tout film annonce original du film, toujours décevant pour les amateurs (dont je fais partie). Encore une so(m)bre histoire de droits' Le moins étant que la piste anglaise en Dolby TruHD 7.1 a été perdue au passage pour l'édition française.
Toujours est-il que le changement de direction est salutaire à la saga, lui redonnant un coup de jeune. Même s'il s'agit à l'évidence d'une juteuse opération commerciale. Comme ce qu'est le cinéma en grande majorité aujourd'hui, personne n'est dupe. Malgré tout, pourquoi bouder son plaisir avec une telle édition' aucun reproche à faire sur la partie visuelle et audiophile (hormis la VF), un documentaire impressionnant, un commentaire audio prenant... un Blu Ray très recommandé.