Maya est appelée pour aider des hommes d'Eglise à pratiquer
un exorcisme sur un tueur possédé par le Malin. La conjuration,
d'une extrême violence, manque de tuer le Père Lareaux,
qui s'en sort profondément traumatisé. Maya emporte l'enregistrement
réalisé et les notes de l'assassin, qu'elle décrypte
une fois arrivée chez elle. Elle découvre ainsi le nom
d'un homme, Peter Kelson, dont elle ne connaît pas le lien avec
le possédé. C'est par hasard qu'elle va entendre prononcer
son nom, dans une émission télévisée où
il est invité pour parler de son dernier livre, une étude
qu'il a menée sur un criminel notoire. La jeune femme découvre
que l'Antéchrist se prépare à revenir pour régner
sur le monde. Son enquête la conduit chez l'écrivain, dont
elle est de plus en plus convaincue qu'il est l'élu. Elle va
se battre à ses côtés pour faire échouer
les desseins de Satan et de ses complices.
Premier film de Janusz Kaminski en tant que réalisateur, LES AMES PERDUES profite pleinement des compétences professionnelles de celui-ci. En effet, il a été pendant très longtemps directeur photo sur de nombreux films, parmi lesquels on trouve de grands succès. Citons pour seuls exemples LA LISTE DE SCHINDLER, pour lequel il a obtenu un Oscar de la meilleure photo, mais aussi de certains autres films de Steven Spielberg, leurs dernières collaborations en date étant A.I. et MINORITY REPORT. Pour LES AMES PERDUES, Janusz Kaminski n'a pas grand mal à trouver un directeur photo digne de sa première réalisation, puisqu'il fait appel à Mauro Fiore, dont il connaît déjà et apprécie le travail. Ce dernier était en effet directeur photo de la seconde équipe de AMISTAD et de JURASSIC PARK II : LE MONDE PERDU ou encore ARMAGEDDON. Deux solides techniciens qui travaillent depuis longtemps autour de Steven Spielberg.
Aidé par un casting de haut niveau, LES AMES PERDUES est une production dans laquelle on trouve une brochette impressionnante de stars, tant devant que derrière la caméra. Des productrices aux acteurs, en passant par le chef-monteur, tout ce petit monde qui constitue les équipes du film a un CV impressionnant, jalonné de nominations aux oscars et autres distinctions prestigieuses. Rien d'étonnant à ce que le film soit irréprochable du point de vue de la technique. Sur le plan scénaristique, malgré de très bonnes idées et mises en images, on pourra juste regretter que certaines n'aient pas été approfondies et exploitées à fond, comme la scène de la cassette audio. Il nous avait d'ailleurs semblé que cette scène était plus longue dans la version que nous avions découverte au cinéma. Même impression pour la scène où Peter rejoint Maya, qui veut lui présenter le premier exorcisé, bien qu'il soit improbable que la version présente sur ce DVD ait été amputée de quoi que ce soit.
LES AMES PERDUES souffre de quelques idées déjà vues et revues qui auraient tendance à desservir ce film par ailleurs assez bien ficelé. Il faut dire qu'on sort difficilement de certaines croyances, celles relatives notamment au règne prochain de Satan sur le monde. Ainsi, on remarquera des similitudes avec le scénario de l'excellent ROSEMARY'S BABY, mais aussi des réminiscences de L'EXORCISTE auxquelles on ne peut de toutes façons pas échapper dans un film traitant ce sujet. Pour coller au plus près à la réalité des séances d'exorcisme, des histoires de possessions démoniaques, l'équipe s'est très largement documentée, n'hésitant pas à rencontrer des prêtres ayant pratiqué de vrais exorcismes, dont le Père James Lebar, un prêtre new-yorkais qui a rapporté à Janusz Kaminski un certain nombre de faits dont il a été le témoin et qui lui a donné de précieux conseils pour la réalisation de son film. Le réalisateur confesse qu'il a été ébranlé par ce que lui a rapporté le Père de ces rituels qui nous semblent pourtant d'une autre époque. Le Vatican reste par ailleurs extrêmement discret sur ces pratiques.
L'idée des auteurs du scénario était de confronter deux univers antagonistes : le spiritualisme et la science. Ceux-ci sont représentés par Winona Ryder, pétrie d'une foi inébranlable, et Ben Chaplin, qui lui représente le monde moderne, ancré dans ses certitudes et d'un cartésianisme à toute épreuve. Le rôle de la jeune femme étant de faire admettre à ce dernier qu'il existe une porte entre ces deux mondes dont elle lui révèle qu'il est la clef de voûte inconsciente. Le film a été injustement (y compris par moi-même) cassé à sa sortie, par des critiques blasés et difficile à surprendre. Pourtant, il faut reconnaître que LES AMES PERDUES, malgré une relative lenteur, est servi par une mise en image très soignée. On a davantage affaire à un film où l'ambiance feutrée le préfère à une action de tous les instants, que l'on pourra ou non apprécier. En tous cas, le réalisateur ne tombe pas dans la surenchère, préférant miser sur la dimension psychologique pour traiter son sujet que mettre le paquet sur des effets spéciaux racoleurs. Il s'autorise tout de même quelques démonstrations assez efficaces, notamment dans les scènes où Maya a des hallucinations et dans la dernière scène d'exorcisme, mais ça reste relativement sobre et bien amené.
Une belle édition
DVD que nous offre Seven 7 avec ce disque des AMES PERDUES. Non
pas que l'on ait droit à un disque parfait, mais plutôt
parce que celui-ci aligne de belles caractéristiques techniques.
Une image de bonne facture qui s'en sort relativement bien malgré
la photographie sombre du film et un choix de bande-son conséquent.
On peut ainsi être content de voir l'apparition d'une version
DTS pour la version originale et pas seulement pour le doublage français
comme nous l'avions vu avec FAMILY
MAN.
Pour en revenir à l'image, il faut savoir qu'elle retranscrit
la vision du réalisateur et du directeur de la photo. Alors que
dans les années 50, on assistait à des feux d'artifice
de couleurs, les films contemporains préfèrent en quelque
sorte dé-coloriser l'image (voir aussi récemment LES
MORSURES DE L'AUBE). Dès lors, le rendu général
est très sombre avec des contrastes pouvant paraître excessif.
Le grain apparent et ce type d'image n'est pas sans rappeler IL FAUT
SAUVER LE SOLDAT RYAN, film dont la photo avait été
signée par Janusz
Kaminski.
Le même sujet traité dans d'autres films donne une surenchère sonore cataclysmique. Les bandes-son du film sont à l'unisson avec son ambiance. Malgré quelques effets faciles, le rendu sonore est souvent feutré et sobre. Un excellent moyen pour décupler l'intensité des séquences fortes en déchaînant les possibilités des bandes sonores multi-canaux. Lors du premier exorcisme, on peut entendre tournoyer les voies des âmes damnées tout autour de soi. Ou alors la fameuse scène de la cassette nous permet de passer d'une ambiance silencieuse à une horreur sonore dont une vieille dame antipathique ne se remettra pas ! La version française en DTS est étonnante de dynamique. Les voix sont nettement plus fortes sur l'avant, ce qui n'est pas une surprise. L'arrière pâtit très légèrement de cette nuance, on le remarque notamment pendant les scènes d'exorcismes, où les hurlements sont plus confus bien que plus agressifs sur l'arrière que dans la version originale où on les distingue plus clairement. Le doublage français est pourtant très efficace, peut-être même plus impressionnant d'ailleurs que la VO mais y perd en subtilité. A vrai dire, la version DTS n'est pas très différente de la version Dolby Digital 5.1. Même s'il est possible de changer de langue à la volée et de passer de l'une des bandes-son à une autre, on ne trouvera pas de différence notable.
Cette édition des AMES PERDUES est soignée. Les menus animés sont sobres et d'un design raffiné tout comme le film, en quelque sorte... Premier bonus, le commentaire audio du réalisateur accompagné de son directeur de la photo. Pas de surprise, ce commentaire audio est présenté avec un sous-titrage ce qui en facilitera la compréhension. Malheureusement, les deux intervenants se perdent souvent dans des considérations techniques qui pourront être un peu rébarbatives au commun des mortels. Toutefois, le commentaire donne tout de même la possibilité au réalisateur de s'exprimer sur ses choix et ses motivations non pas au niveau de la technique mais de l'histoire et de son déroulement.
On comprend aisément pourquoi les scènes coupées l'ont été, puisqu'elles ne représentent aucun véritable intérêt, si ce n'est faire traîner en longueur une intrigue qui prend déjà suffisamment son temps pour se dérouler. Certaines des scènes coupées sont en fait des montages alternatifs. On ne retiendra ainsi qu'une séquence à première vue anodine (l'accident de vélo) montrant le personnage de Kelson sous un meilleur jour. On comprend mieux ainsi pourquoi le personnage de Maya a tant de scrupules à agir. Notons tout de même qu'à l'instar du commentaire audio, celles-ci sont sous titrées et on peut choisir de les regarder avec le commentaire du réalisateur, qui se contente souvent de paraphraser la scène au lieu d'expliquer réellement ses choix de montage. On préfèrera visionner ces scènes sans ses explications. Comme souvent, la qualité d'image des scènes coupées est sensiblement différente de celle du film.
On passera rapidement sur les filmographies pour jeter un oeil aux bandes-annonces. On en trouve trois sur le disque mais une seule pour LES AMES PERDUES. Les deux autres n'ont pas grand chose à voir puisqu'il s'agit de 15 MINUTES et THE VERY BLACK SHOW. Une attention de l'éditeur pour attirer le consommateur vers d'autres DVD. On aimerait pourtant que d'autres éditeurs en fassent autant et ce de manière systématique. Il faut dire que l'on apprécie les bandes-annonces !
LES AMES
PERDUES n'a en général pas une bonne réputation
en raison de la comparaison évidente avec L'EXORCISTE.
Une comparaison facile et incontournable. Pourtant, LES AMES PERDUES
est un film bien réalisé et ne se place pas vraiment dans
le même style que le film de William
Friedkin.