En Autriche, dans une station d'observation juchée à plus de 3000 m d'altitude dans les Alpes, un groupe de scientifiques étudie les effets du changement climatique sur les glaciers, une préoccupation écologique plus que contemporaine. Janek (Gerhard Liebmann) est l'un des scientifiques. Plutôt antisocial et quelque peu alcoolique, il devient une sorte d'anti-héros qui découvre une étrange couleur rouge sang qui est apparue inexplicablement sur le glacier. Les scientifiques étudient ce phénomène en pleine évolution et dont les effets sur les animaux sont dévastateurs. En effet, ces derniers deviennent des hybrides. Le groupe dont les aspirations et les personnalités sont radicalement opposées éclate et se retrouve confronté à ces animaux mutants qui attaquent tout ce qui bouge. Parallèlement à cela la ministre autrichienne de l'environnement, interprétée magistralement par Brigitte Kren (la maman du réalisateur), décide de venir à la station pour se rendre compte des progrès scientifiques de l'équipe. Elle est accompagnée de journalistes mais aussi de Tanja (Edita Malovcic), glaciologue et ex-petite amie de Janek. Le décor est planté !
Après le très réussi RAMMBOCK, Marvin Kren signe avec THE STATION son deuxième long métrage, une nouvelle fois en collaboration avec Benjamin Hessler pour le scénario. Avec leur premier long-métrage, ils avaient d'ailleurs réussis le pari de donner un point de vue original sur un sujet qui avait déjà été traité maintes et maintes fois. Comme sur RAMMBOCK, Marvin Kren privilégie les effets spéciaux mécaniques plutôt que les trucages numériques dans THE STATION. Le cinéaste privilégie au passage la simplicité et le réalisme pour illustrer au mieux les attaques des animaux mutants sans verser dans le sanguinolent outrancier. Ceci dit il y a quand même des scènes où l'hémoglobine jaillit un peu (ne boudons pas notre plaisir !) mais ce n'est pas ce que recherche à tout prix le cinéaste autrichien. Complètement dans la droite lignée de son premier film, Marvin Kren réinvente un sujet déjà usité en allant un peu à contre courant de ce qui se fait de nos jours. THE STATION se rapproche ainsi des bons vieux films d'attaques animales comme le tonitruant RAZORBACK, entre autres. Mais les thèmes de THE STATION ne sont pas non plus sans rappeler LONG WEEK-END. Ainsi, le ton très dramatique de la première partie du métrage fait le constat alarmant d'une nature magnifique endommagée par l'homme. L'image de la montagne qui saigne est ainsi annonciateur d'une Nature qui ne va pas tarder à se venger. Les êtres humains vont alors devoir se battre pour enrayer ce terrible destin...
Cependant, Marvin Kren ajoute à cela des touches d'humour bien dosées qui empêchent le film de basculer dans le mélodrame écologique. Notamment avec l'introduction de personnages volontairement caricaturaux, le Toy Boy de la ministre par exemple. Ou des caractères bien trempés qui font franchement éclater de rire même pendant des scènes d'angoisse ! Telle la ministre elle-même, sorte de matrone qui ne se laisse pas impressionner par le plus petit animal mutant. Et cela n'empêche en rien les scènes de suspense de tenir en haleine. De retrouver la force appréciable de films comme TREMORS ou TROLL HUNTER quant au mélange comico-horrifique.
On constate également que le réalisateur se fait plaisir à mettre en images les bébêtes mutantes. Marvin Kren s'amuse à jouer les apprentis sorciers en mélangeant les ADN des espèces : le renard–scarabée, l'oiseau de proie qui ressemble à un cadavre préhistorique ou encore un sympathique clin d'œil à ALIEN (sursaut garanti !).
En avançant dans THE STATION, se révélant un joyeux mélange de tous ces ingrédients, il y a quand même des limites qui laisseront malheureusement le spectateur sur sa faim. Notamment dans la vision de l'une des créatures qui semble être le clou du spectacle et qui ne sera jamais dévoilée entièrement. A la place elle apparaît uniquement par gros plans avec des prises de vue saccadées au rythme des attaques. A l'évidence, le film a manqué d'un budget suffisant pour pouvoir achever correctement tous les effets spéciaux voulus. Marvin Kren concentre ses efforts (et les moyens) à la réalisation de plus petits animaux, même s'ils sont très réussis. Quel dommage ! On attendait le mutant final comme l'apparition grandiose de l'immense Jotnar blanc de TROLL HUNTER ou le crocodile tueur de ROGUE ! Par ailleurs, quelques incohérences subsistent, comme la joggeuse en short à 3000 m d'altitude : mais que vient-elle faire là ?! Cela se justifie certainement par l'action - cependant au détriment de l'histoire. Cela ne gâche quand-même pas le déroulement du film qui réussit à rester très divertissant .Même la fin demeure dans le prolongement de ce qui a précédé : très décalée et laissant le libre choix d'interprétation au spectateur.
Avec un budget modeste, Marvin Kren nous prouve une nouvelle fois que l'important est avant tout dans l'originalité d'un scénario plutôt que dans l'ampleur des moyens mis en oeuvre. En utilisant un sujet aux préoccupations écologiques résolument moderne, le cinéaste autrichien réussit son huit clos montagneux. Il donne ainsi à son film un ton réellement singulier alors que son décor, mais aussi quelques idées, nous renvoie directement au cultissime THE THING de John Carpenter.
Si l'on évoque ici le film sous le titre THE STATION, c'est parce qu'il a été diffusé sous ce titre au Festival du Film Fantastique de Gérardmer en 2014. Toutefois, il est sorti dans plusieurs pays sous le nom BLOOD GLACIER qui est une traduction anglaise du titre original, BLUTGLETSCHER.