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Critique du film
SNOWPIERCER, LE TRANSPERCENEIGE 2013

 

Dans un futur proche, pour lutter contre le réchauffement de la planète, les gouvernements du monde entier modifient le climat de la Terre. Le résultat n'est hélas pas celui attendu puisque la planète est plongé dans une ère glaciaire qui sonne le glas de l'humanité. Seuls quelques survivants ont trouvé refuge dans un train qui fait le tour du monde sans jamais s'arrêter...

Situation peu banale, SNOWPIERCER est l'adaptation d'une bande dessinée... française ! Co-créateur de Superdupont, entre autres, Jacques Lob publie Le Transperceneige durant les années 80 en collaboration avec Jean-Marc Rochette qui s'occupe de l'illustration. Plus de trente ans plus tard, le cinéaste Bong Joon Ho signe donc une adaptation cinématographique d'envergure internationale. Le réalisateur de MEMORIES OF MURDER et THE HOST signe ainsi son premier long-métrage hors de la Corée du Sud, tourné en grande partie en langue anglaise et avec une équipe d'horizons divers. Mais si SNOWPIERCER est la transposition sur grand écran du Transperceneige, le film s'éloigne grandement de l'œuvre d'origine. Peu importe dans le sens où le travail d'adaptation retient l'esprit de la bande dessinée et ce même s'il ne suit pas la narration originale !

S'inscrivant dans le registre post-apocalyptique, SNOWPIERCER est en réalité le portrait assez cruel de nos sociétés. Ainsi, le film de Bong Joon Ho s'avère bien plus proche d'un métrage comme MALEVIL que d'une aventure bourrée d'action. Le dernier refuge de l'humanité, un train révolutionnaire à mouvement perpétuel, héberge une microsociété qui reprend et accentue les travers de l'ancien monde, c'est à dire le nôtre. Le voyage à travers les wagons nous fait remonter les strates d'une organisation où l'égalité entre les hommes est sacrifiée pour des questions de survie. Tout du moins, c'est la raison invoquée pour légitimer un système peu équitable, voire même surréaliste et totalement inhumain. S'il s'agit de science-fiction ou d'anticipation, il ne faut pas se voiler la face, le train de SNOWPIERCER, c'est notre bonne vieille planète ! La démonstration pourrait sombrer dans le discours manichéen ou démago. Mais le métrage se montre plutôt malin, particulièrement dans sa dernière partie, où les situations absurdes sont à même de nous questionner sur la direction que prend l'humanité au XXIème siècle. Le métrage se montre pour le moins pessimiste à ce sujet, nous renvoyant à la figure le schéma d'une société atroce fonçant vers le néant ! Le plus horrible, certainement, c'est de se dire qu'ensuite, après y avoir mûrement réfléchi, on oubliera tout ça demain pour continuer à vivre dans ce système où de petits gamins fabriquent nos chaussures de sport à l'autre bout du monde, où des habitants qui n'ont rien demandé se font massacrer pour les ambitions des uns et le fanatisme des autres. C'est triste mais à moins d'un miracle, d'une véritable prise de conscience, d'un dynamitage complet des mentalités, il apparaît difficile de croire que notre monde, ou plutôt l'être humain, va changer de braquet pour adopter sincèrement «Liberté, Egalité et Fraternité» de manière à ce que tout le monde puisse vivre heureux !

Très ambitieux, SNOWPIERCER est à l'image de l'homme, imparfait. Rien qui soit réellement rédhibitoire et qui soit à même de gâcher la vision de ce métrage surprenant. Le souci de SNOWPIERCER est directement lié à la structure du train. L'histoire avance au gré de la progression de wagons en wagons de manière très linéaire. Cela s'avère logique mais cela provoque des changements de rythmes assez brusques. On notera aussi deux scènes d'action totalement illisibles, les deux localisées dans la première partie du métrage. Heureusement, cet aspect va disparaître au moment où Bong Joon Ho choisit d'illustrer une action au ralenti et, bizarrement, la plupart des séquences mouvementées qui suivront seront plus agréables à suivre jusqu'à l'issue de SNOWPIERCER. De petits défauts qui, comme déjà dit, n'entache pas un film qui s'offre des passages réellement incongrus et ironiques, mais toujours réussis, comme lors d'un passage qui fait un peu penser à l'atmosphère étrange de la série des jeux vidéo Bioshock. Enfin, SNOWPIERCER rassemble pas mal de comédiens qui incarnent à merveille leurs rôles respectifs, de Chris Evans à Kang-ho Song en passant par John Hurt ou Ed Harris. Mais c'est Tilda Swinton, dotée d'un maquillage très particulier, qui capte l'attention en interprétant un personnage veule et abject dans sa façon de suivre les règles d'un système inhumain !

A défaut d'atteindre la perfection, mais c'est peut être aussi ce qui fait son charme, SNOWPIERCER n'en reste pas moins un grand film. Abordant des sujets graves et sérieux, nous laissant face à nos contradictions et à des questions épineuses, il s'écarte grandement des productions actuelles à l'image d'ELYSIUM qui traite de sujets assez proches, sous le prisme lui aussi de la science-fiction. Mais SNOWPIERCER se montre beaucoup plus solide dans son discours, nous évitant aussi une fin mielleuse pour nous laisser sur un épilogue à l'optimisme très relatif !

Rédacteur : Christophe Lemonnier
Photo Christophe Lemonnier
Ancien journaliste professionnel dans le domaine de la presse spécialisée où il a oeuvré durant plus de 15 ans sous le pseudonyme "Arioch", il est cofondateur de DeVilDead, site d'information monté en l’an 2000. Faute de temps, en 2014, il a été obligé de s'éloigner du site pour n'y collaborer, à présent, que de manière très sporadique. Et, incognito, il a signé de nombreuses chroniques sous le pseudonyme de Antoine Rigaud ici-même.
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