Envoyé à la cour de Catherine de Russie, le séduisant Baron de Munchhausen entame une amourette avec l'impératrice. De fil en aiguille, il va alors prendre part à la guerre entre l'Empire Russe et l'Empire Ottoman. A partir de là, le Baron de Munchhausen va vivre des aventures de plus en plus étranges, croisant Cagliostro ou Casanova jusqu'à s'égarer sur la lune…
Fondé à la fin de la Première Guerre Mondiale en vue de réaliser des films de propagande ou d'intérêt public, la maison de production UFA (Universum Film AG) va s'imposer durant les années 20 avec de nombreux métrages renommés : METROPOLIS, LES NIBELUNGEN, LA FEMME SUR LA LUNE, L'ANGE BLEU... Mais dans le courant des années 30, avec la montée du national socialisme, la maison de production allemande va de nouveau se remettre au service de la politique avant d'être littéralement nationalisée par le régime nazi. C'est dans le contexte de la Seconde Guerre Mondiale que Joseph Goebbels, ministre de la propagande allemande, entend marquer le coup en produisant un spectacle sans pareil qui célébrerait, au passage, le 25ème anniversaire de l'UFA. Mais cette grosse production n'aura finalement pas grand chose à voir avec un film de propagande à l'instar du TRIOMPHE DE LA VOLONTE, des DIEUX DU STADE ou, beaucoup plus gênant, LE JUIF SUSS. L'UFA lance donc la mise en chantier d'une adaptation d'un classique de la littérature allemande du XVIIIème siècle, Les Aventures du Baron Munchhausen. L'ouvrage narre des mésaventures rocambolesques et exagérées du Baron de Munchhausen, un véritable mercenaire allemand qui aurait d'ailleurs été irrité par la publication du livre. La version cinématographique mise en chantier par l'UFA ne se montrera pas totalement fidèle et va prendre des libertés avec l'œuvre originale, autant que la plupart des traductions du livre et des adaptations cinématographiques. Quoi qu'il en soit, le métrage prend des proportions démesurées pour un film produit en temps de guerre ce qui va lui faire prendre du retard. Au point de rater l'anniversaire visé puisque le film ne sortira qu'en 1943 en Allemagne, soit 26 ans après la fondation de la maison de production.
L'adaptation se montre plutôt astucieuse. Le prologue du film, dans un bal où les convives dansent dans des costumes du XVIIIème siècle est un pur moment de roublardise. Ce qui s'avère plutôt logique dans le sens où LES AVENTURES FANTASTIQUES DU BARON DE MUNCHHAUSEN expose les histoires d'un individu considéré comme un fieffé menteur. Le film démarre donc sur un faux semblant assez déroutant. S'ensuit alors l'évocation d'une partie de la vie du Baron de Munchhausen narré par l'un de ses descendants. Le film va alors se montrer plus ou moins inégal. En racontant quelques passages mémorables des aventures du personnage, on a, au final, un peu l'impression de suivre une sorte de film à sketches dont le fil conducteur est, par endroit, un peu artificiel. Heureusement, si le film n'est pas d'une grande cohérence, il a l'avantage d'être somptueux, de ne jamais lésiner sur les décors grandioses et une foultitude de figurants. Il s'agit avant tout d'un grand spectacle pour les yeux et qui réussit, par endroit, à entrer en état de grâce.
Si l'introduction du film joue sur le mensonge, la narration de l'histoire va au contraire rester au premier degré et ce même si certaines péripéties défient toute crédibilité. Néanmoins, on notera deux passages où le fameux Baron se montre plus filou qu'il n'y paraît. Ainsi, lorsqu'il est prisonnier d'un sultan, il s'arrange pour jouer de son imagination de manière à sauver sa tête chaque jour. Une idée qui est bien évidemment reprise des 1001 Nuits. Plus tard, le côté affabulateur du personnage se révélera de manière bien plus poétique lorsqu'il se met à souffler sur les voiles d'un navire. De petites touches de poésie, le métrage en contient pas mal et c'est aussi ce qui fait tout son charme. De même, si aujourd'hui le personnage est souvent associé à un univers plutôt enfantin, cette adaptation cinématographique dépeint un personnage plutôt grivois, cédant très facilement à la bagatelle. Le film se montre même plutôt osé en montrant un harem où les femmes se baignent seins nus ou encore lorsque Cagliostro présente une peinture aussi magique qu'érotique ! Le film se montre aussi surréaliste ou saugrenue comme lors des duels. L'un dans l'obscurité, sorte de cache-cache mortel, et l'autre où le Baron obtient réparation en humiliant son adversaire à l'épée. Evidemment, les aventures du personnage le mènent donc à défier les lois de la physique. Il voyage en chevauchant un boulet de canon ou bien se transporte sur la lune tout comme, avant lui, Cyrano de Bergerac. Evidemment, en fin de métrage, il apparaît donc évident qu'une grande partie n'est qu'un tissu de pure invention. Mais dans un épilogue, dont la surprise est un peu éventée, LES AVENTURES FANTASTIQUES DU BARON DE MUNCHHAUSEN se termine sur une dernière touche de poésie, donnant au personnage un aspect plus humain et paradoxalement venant entériner la véracité du récit ! Pas étonnant, dès lors, que Terry Gilliam se soit inspiré de cette version pour sa propre adaptation, LES AVENTURES DU BARON MUNCHAUSEN.
La version du film qui est proposée sur le DVD est une restauration récente initiée par la Fondation Murnau. Cela permet de découvrir le métrage dans une version de 110 minutes avec une image nettoyée de ses nombreux défauts de pellicule. Néanmoins, le rendu n'est pas totalement parfait. Certains plans se montrent très imprécis et sont probablement dû à des soucis avec le système de pellicule couleur. Le métrage n'était, à l'époque, que le quatrième film a avoir été produit en Agfacolor, un procédé encore balbutiant au cinéma. Mais si la copie n'est pas parfaite, le spectacle est tout de même largement bien mis en valeur avec ses costumes colorés et ses décors imposants. En soit, cette édition DVD permet de retrouver le film dans d'excellente condition compte tenu de son âge et de ses particularités. Il en va de même pour le son puisque l'on peut choisir de visionner le film en version originale allemande sous-titrée ou bien avec un doublage français vraisemblablement d'époque. Ce dernier se montre un poil agressif à l'oreille. La version allemande est donc plus agréable à l'écoute mais, bien évidemment, il faudra alors se reposer sur la compréhension de cette langue ou bien une traduction par sous-titrage. Dans les deux cas, les pistes audio sont en mono et codées sur deux canaux.
En complément, comme souvent chez Artus Films, on trouve une longue interview réalisée spécialement pour le film. On retrouve donc Alain Petit qui partage ses connaissances à propos des AVENTURES FANTASTIQUES DU BARON DE MUNCHHAUSEN. Il évoque ainsi la genèse du métrage, les diverses adaptations au cinéma avant de s'intéresser au comédien principal et au réalisateur. Ces trente six minutes font malheureusement un peu doublon avec le deuxième DVD. En effet, cette édition propose un documentaire en trois parties intitulés UN MYTHE EN AGFACOLOR. Le premier segment se focalise essentiellement sur le procédé Agfacolor et son histoire. La deuxième partie expose la genèse ainsi que le tournage des AVENTURES FANTASTIQUES DU BARON DE MUNCHHAUSEN avec des interviews diverses dont celles d'une comédienne du film. Enfin, le troisième morceau, le plus court, évoque les effets spéciaux du film. La présentation des trois parties sur le DVD est un peu étrange. En effet, elles sont collées les unes après les autres sans indication. Certains spectateurs étourdis risquent donc de s'arrêter au générique de fin de la première partie sans se rendre compte qu'il en reste encore deux derrière. Car rien n'indique nulle part le nombre de morceaux que compte ce documentaire et le menu du DVD est ultra basique à ce sujet ! Pendant environ une heure et quart, on découvre donc la plupart des informations concernant LES AVENTURES FANTASTIQUES DU BARON DE MUNCHHAUSEN. La partie consacrée aux effets spéciaux est d'ailleurs particulièrement étonnante puisqu'elle révèle les astucieux trucs mis en œuvre. De même, on peut découvrir, dans la partie dédiée au cinéma allemand en couleur, des extraits de métrages peu connus et plus particulièrement un spectaculaire, KOLBERG. Ou bien la partie dédiée au film va jusqu'à sa restauration numérique. Néanmoins, on notera aussi des anicroches sur le sous-titrage du documentaire. Car si les interviews et la voix off sont bien traduits, les extraits de films ainsi que les documents d'époque ne propose aucun sous-titrage !
Hormis le documentaire sur le deuxième DVD et la présentation de 36 minutes d'Alain Petit, l'édition française des AVENTURES FANTASTIQUES DU BARON DE MUNCHHAUSEN proposent aussi une petite galerie essentiellement composée d'affiches de divers pays. On trouve aussi une option « Bande-annonce » sur le menu des suppléments mais il s'agit en réalité, ce qui paraît bizarre, d'un simple extrait du film d'environ deux minutes. Si l'on peut toujours critiquer ceci ou cela, ce double DVD consacré aux AVENTURES FANTASTIQUES DU BARON DE MUNCHHAUSEN est, en tout cas, une belle façon de redécouvrir le film !