Alors qu'il roule paisiblement sur une avenue déserte de Mumbai, le célèbre acteur Armaan Kapoor donne un violent coup de volant qui lui sera fatal. L'inspecteur Surjan se voit alors confié cette enquête d'autant plus délicate qu'elle attise la curiosité des médias et chamboule les milliers d'admirateurs de la Star. Rapidement se pose la question de la présence de l'acteur dans ce quartier, sans son chauffeur. Les investigations mènent donc Surjan jusqu'à un réseau de prostitution où il fera la connaissance de Rosie, une mystérieuse jeune femme qui deviendra sa confidente nocturne. Car en plus de cette enquête, l'inspecteur doit également faire face à un drame personnel : La mort récente de son jeune fils Karan...
Ayant fait ses armes aux côtés de quelques grands noms de la réalisation, Reema Kagti se lance en 2006 et livre l'année suivante son premier film, HONEYMOON TRAVELS PVT. LTD. Ce métrage constitué de six sketchs sera très bien accueilli par la critique et la réalisatrice se voit alors proposée de nombreux scripts. Aucun ne la séduit cependant et en 2010, elle décide de se mettre à l'écriture d'un scénario en compagnie de sa complice Zoya Akhtar. Dans un premier temps, c'est l'acteur Saif Ali Khan qui sera contacté pour incarner l'inspecteur Surjan. Malgré toute l'affection que nous portons à ce sympathique acteur, nous ne pourrons que nous réjouir de son refus puisqu'après lui, c'est Aamir Khan qui se retrouve impliqué. Or Aamir est sans doute l'acteur indien le plus doué de sa génération et alterne sans peine les blockbusters (3 IDIOTS, GHAJINI...) avec des films au propos plus étoffé (LAGAAN, TAARE ZAMEN PAR...). Le bonhomme brille également en produisant des pépites engagées comme PEEPLI [LIVE] ou des comédies dramatiques à succès comme DELHI BELLY. Nul doute qu'avec Aamir Khan à bord, TALAASH : THE ANSWER LIES WITHIN aura pris une dimension autre. L'homme s'implique ainsi en tant qu'acteur mais également en tant que producteur. Les actrices Rani Mukherji et Kareena Kapoor rejoignent enfin le casting et finissent d'offrir au film une affiche parfaitement digne d'intérêt.
Le tournage s'étirera de mars à novembre 2011 en raison de la disponibilité des acteurs, de certaines exigences d'ordre physique (un entraînement rigoureux à la natation) et des différents lieux de tournage. En effet, bien qu'il soit supposé se dérouler uniquement à Mumbai (ex-Bombay) le film aura également été tourné à Pondichéry (sud-est de l'Inde) mais aussi à Londres, dans les fameux bassins des studios Pinewood. De Mumbai, nous reconnaîtrons l'agréable «Bandstand Promenade» qui sera ici le lieu de l'accident, mais également le Leopold Cafe, connu via le roman «Shantaram» et, surtout, pour l'incroyable tuerie qui y aura eu lieu durant les attentats terroristes de 2008. Dans le film, ce bar n'accueille pas ses habituels touristes en short mais des prostituées et des malfrats de tous poils. L'ambiance y est poisseuse, lourde, et les lumières artificielles. Ce sera le cas d'une bonne partie du film, dont l'intrigue se déroule dans le milieu «underground» de la pègre et des trafics en tous genres. L'univers de TALAASH est ainsi sombre, à l'image de ceux dépeins dans KAMINEY, KAHAANI ou DEV.D. Une vision de l'Inde assez peu engageante et très éloignée de celle véhiculée par la majorité des Blockbusters Bollywoodiens.
TALAASH se démarque également de par sa structure et le fait qu'il s'articule autour de deux personnages principaux. Le premier, c'est bien évidemment l'inspecteur Surjan dont on suit le cheminement, partagé qu'il est entre sa famille détruite et le monde de la nuit qui semble le happer, tout en apaisant sa rage intérieure. Le second protagoniste, c'est le loubard Tehmur qui vit la mort de l'acteur Armaan Kapoor d'une toute autre manière, tire ses propres conclusions et espère en profiter pour toucher le pactole. Quelle que soit la facette du film, le traitement s'avère de qualité et le rythme ne mollit pas. La mise en scène est extrêmement soignée et la face «obscure» de Mumbai portée sur pellicule avec soin. L'alternance des points de vue ajoute de surcroît en mystère avec une inconnue qui demeurera jusqu'en fin de métrage : Les deux intrigues partent d'un même incident, mais où vont-elles se recouper ? Difficile d'anticiper l'épilogue mais un second visionnage permettra au spectateur de pointer la subtilité de certains dialogues, et leur évidente ambiguïté tout au long du film.
D'une manière générale, TALAASH est un film assez «fin» et disons-le même, clairement féminin. L'émotion véhiculée fait bien souvent mouche et les personnages sont dessinés et étoffés avec un soin tout particulier. La femme y est montrée forte, même dans la détresse, alors que l'homme y révèle une certaine fragilité émotionnelle, y compris dans la rudesse de ses actes. L'acteur Nawazuddin Siddiqui, bien qu'incarnant une petite frappe méprisable, sonne ainsi parfaitement juste lorsqu'il déclare sa flamme à une prostituée désabusée. Mais c'est surtout le couple Aamir Khan / Rani Mukherji qui emportera le spectateur, tant ils font preuve une nouvelle fois de leur exceptionnel talent. Kareena Kapoor n'a pas, pour sa part, l'étoffe d'une grande actrice, mais son physique de «Bimbo» lui permet de se glisser habilement dans la peau d'une mystérieuse prostituée, rôle qu'elle avait du reste déjà tenu dans l'un de ses premiers succès : CHAMELI.
A sa sortie, TALAASH a reçu un accueil mitigé des critiques, surtout hors de ses frontières. En revanche, le spectateur ne s'y est pas trompé et a permis au film d'être l'un des gros succès de l'année 2012. Pour un budget d'environ 40 crore (5.7 millions d'euros), le film en aura rapporté 174 (presque 25 millions d'euros) dont un quart hors de son pays d'origine ! Il faut dire que le second métrage de Reema Kagti se prête assez bien à l'export et à un visionnage «occidental». Si la musique s'invite parfois pour épauler les images, les traditionnelles séquences dansées sont ici totalement absentes. Le film est en outre ancré dans un univers tout à fait crédible et très éloigné du strass que le public associe généralement aux œuvres Bollywoodiennes. Dans le même genre, TALAASH évite la démesure et les «tics» de réalisation pour le coup trop courants, comme les ralentis ou accélérés artificiels. Nous avons donc là un film élégant dans le fond et particulièrement soigné dans sa forme, qui mérite à n'en pas douter d'être découvert par chez nous. Cela ne se fera cependant pas par le biais du cinéma et il y a peu de chance que le métrage trouve un jour sa place dans nos bacs à DVD. Le spectateur curieux n'aura donc d'autre choix que de se tourner vers l'import et les différents disques officiels proposés par l'éditeur indien Reliance.
L'édition simple DVD s'avère totalement dénuée de bonus alors que les éditions Blu-Ray et double DVD apportent leur lot de suppléments. Pour notre part, nous avons opté pour cette dernière édition qui offre au film un rendu d'image assez bluffant pour de la simple définition. Aucune trace de compression, des couleurs splendides, des noirs profonds et des contrastes puissants sont donc au rendez-vous. La définition délivrée par l'encodage 16/9ème comblera vos rétines, y compris sur un grand écran. Inutile donc de préciser que le format d'origine 2.35 est respecté et que l'éditeur (contrairement à d'autres en Inde) préserve l'image en n'ajoutant aucun logo disgracieux.
Côté son, nous sommes là encore dans l'irréprochable. La version hindi d'origine sera déclinée dans trois formats distincts, s'adaptant ainsi à toutes les installations. Le stéréo pour les plus modestes, et le Dolby Digital 5.1 ou DTS 5.1 pour les plus performantes. Bien évidemment et dans la mesure du possible, il faudra favoriser les options sur six canaux qui rendent parfaitement justice aux différentes partitions musicales. Ces pistes se montrent claires, équilibrées et dynamiques quand il le faut. Afin de rendre le métrage accessible, cette édition propose des sous-titrages en anglais, néerlandais, arabe et... français ! Alors quand on parle de sous-titrage francophone sur un disque indien, il convient toujours d'être assez prudent. En effet, bien que ceux-ci soient parfois présents, la plupart des spectateurs basculeront rapidement sur l'anglais tant la qualité s'avère réellement douteuse... Et bien à notre grande surprise, le disque de TALAASH fait là encore exception à la règle en proposant une certaine qualité. On notera bien quelques fautes ou approximations, mais rien de comparable avec les traductions automatiques que l'on nous sert régulièrement ! Le sous-titrage anglais est pour sa part quasi-parfait.
Attaquons maintenant la section des bonus avec pas moins de treize scènes coupées à l'intérêt très variable. Certaines sont davantage des prolongements inutiles, d'autres proposent de petites variantes sans grand intérêt, mais quelques-unes apportent un vrai plus. La troisième scène coupée développe par exemple les personnages des différents officiers de police. La réalisatrice leur apporte une dimension plus humaine encore, peut être même trop. Mais la raison de cette suppression semble se trouver ailleurs et notamment dans le fait qu'elle apporte un élément d'enquête supplémentaire qui pourrait faire tiquer le spectateur. Il en sera de même pour les autres séquences dont la durée excède la minute... L'ensemble de ces «scènes coupées» est proposé en enfilade, avec toutefois un chapitrage permettant de passer de l'une à l'autre assez simplement. A noter que de tous les suppléments proposés par ce second DVD, celui-ci est le seul à offrir un sous-titrage anglais (optionnel) qui intervient uniquement lorsque les dialogues sont en hindi.
La section «Snippets» propose quant à elle six petits documentaires allant du parfaitement dispensable au plus pertinent. Dans la première catégorie, on relèvera une succession d'images filmées sur le tournage, à la gloire d'acteurs et actrices souriants et sympathiques. On zappe. A l'opposé, le documentaire dédié au crash de la voiture se montre très bien construit et assez généreux en témoignages dignes d'intérêt. On notera également que l'un de ces mini-documents est dédié à l'apprentissage de la natation. Il convient dès lors de rappeler que peu d'indiens savent nager et qu'Aamir Khan (entre autres) a donc du apprendre pour ce film.
Un petit making-of de quatre minutes et vingt-cinq secondes nous est proposé directement depuis le menu principal. Celui-ci s'intéresse au clip musical utilisé pour la promotion du film. Y interviennent le chorégraphe, le compositeur, une styliste et quelques autres. Le tout est intéressant et se montre même assez pertinent pour le spectateur occidental, lequel n'est pas forcément familiarisé avec ce type de clip pourtant très fréquent en Inde.
Terminons avec le gros morceau de cette édition : Un making-of de plus de 42 minutes ! Le non-anglophone va devoir s'accrocher parce que la plupart des intervenants parlent anglais, nous privant donc d'un sous-titrage salvateur. Reste que le contenu vaut largement l'effort de compréhension. Genèse, production, réalisation, images de tournage, séquences sous-marines... Tout est là, dévoilé sous nos yeux et étoffé de nombreuses interventions des scénaristes, producteur, réalisatrice, acteurs et autres. S'il arrive parfois que l'on flirte avec le promotionnel, ce n'est que bref et très ponctuel. Vous l'aurez donc compris, nous avons là du bon boulot, qui justifie pleinement que l'on opte pour l'édition Blu-Ray ou double DVD plutôt que pour l'édition simple.